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Napoléon

Napoléon

Titel: Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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Vistule.

    — Dieu, quelle joie pour nous ! s’exclame le brave Coignet en apprenant, avec toute l’armée, la prochaine entrevue entre les deux empereurs.
    Assurément, le chemin de Paris va bientôt s’ouvrir pour les vainqueurs de Friedland ! « Tout le monde était fou. Les officiers étaient parmi nous pour que rien ne manque à notre belle tenue : les queues des coiffures bien faites et bien poudrées, les buffleteries bien blanches. Défense de s’éloigner ! » Massés sur les rives, on regarde en se réjouissant le radeau placé au milieu du fleuve, et sur lequel les pontonniers s’affairent pour élever une maisonnette composée d’un grand salon et d’une antichambre. Le tout joliment meublé et décoré de guirlandes de fleurs et de verdure.
    Le jeudi 25 juin, Alexandre – uniforme noir à parements rouges, culotte blanche, chapeau orné de plumes blanches et noires – monte en barque pour se rendre vers le radeau où l’attend déjà Napoléon,vêtu avec sa simplicité habituelle. À ses côtés : Berthier, Duroc, Caulaincourt et Bessières.
    Les deux empereurs s’embrassent.
    — Sire, déclare Alexandre, je hais les Anglais autant que vous.
    — En ce cas, s’exclame l’Empereur, la paix est faite.
    Il est d’ailleurs probable que les deux phrases ne furent jamais prononcées... bien que les sentiments qu’elles exprimaient aient été conformes à ceux qui animaient les deux adversaires. La Russie et la France devaient s’entendre seules. Napoléon ne voulait même pas que la Prusse prît part aux discussions. Frédéric-Guillaume se trouvait pourtant directement intéressé à l’affaire puisqu’il était question de dépecer ses États.
    — J’ai souvent couché à deux, s’exclame Napoléon, jamais à trois.
    Alexandre trouve le mot charmant et se montre de plus en plus séduit.
    — Que ne l’ai-je connu plus tôt constate-t-il, le voile est déchiré et le temps de l’erreur est passé.
    Cependant, le tsar se méprend sur les mobiles qui poussent Napoléon à ne pas traiter son adversaire en vaincu. Il ne voit dans cette modération et ce désintéressement que l’orgueil d’un parvenu nommé Buonaparte, qui ose parler d’égal à égal avec un tsar, et il écrit à sa mère : « Avec tout son génie, il a un côté vulnérable : la vanité, et je me suis décidé de faire le sacrifice de mon amour-propre pour le salut de l’Empire. » Peut-être était-ce simplement là une excuse destinée à apaiser à l’avance sa mère horrifiée en pensant que son fils puisse entretenir des relations amicales avec celui qu’elle nommait le Corsicain !
    Napoléon trouve Alexandre « un fort beau, bon jeune homme, ayant plus d’esprit qu’on ne pense communément ». Il précise même : « C’est un héros de roman. Il a toutes les manières d’un des hommes aimables de Paris. » Après une deuxième entrevue, le lendemain, on estime que les conversations peuvent difficilement se prolonger sur un radeau flottant, aussi, afin de ménager la susceptibilitéd’Alexandre, décide-t-on de neutraliser le bourg de Tilsit où, seuls, demeureront les deux empereurs, leurs états-majors et leurs gardes.
    Napoléon, après avoir accueilli son hôte avec tous les honneurs possibles – coups de canon, et présentation des troupes – conduit Alexandre à sa demeure en lui disant :
    — Voilà la maison de Votre Majesté.
    — Sire, réplique le tsar, permettez-moi de parcourir jusqu’au bout la rue, pour voir toute la Garde, que je trouve superbe !
    Pendant que les deux empereurs prennent ensemble leur repas, la Garde impériale reçoit à dîner la Garde russe. « Il fallait voir nos cuisiniers bien poudrés, en tabliers blancs pour servir, racontera encore Coignet ; on peut dire que rien n’y manquait. Nous plaçâmes nos convives à table, entre nous, et le dîner fut bien servi. Voilà la gaieté qui se fait parmi tout le monde !... Ces hommes affamés ne purent se contenir ; ils ne connaissaient pas la réserve que l’on doit observer à table. On leur servit à boire de l’eau-de-vie ; c’était la boisson du repas, et avant de la leur présenter, il fallait en boire, et leur présenter le gobelet en fer blanc qui contenait un quart de litre, son contenu disparaissait aussitôt, ils avalaient des morceaux de viande gros comme un oeuf à chaque bouchée. Ils se trouvèrent bientôt gênés ; nous leur fîmes signe de se déboutonner, en en

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