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Napoléon

Napoléon

Titel: Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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faisant autant. Les voilà qui se mettent à leur aise ; ils étaient serrés dans leurs uniformes par des chiffons pour se faire une poitrine large ; c’était dégoûtant à voir tomber ces chiffons. Il nous arrive deux aides de camp, un de notre Empereur et un de l’empereur de Russie, pour nous prévenir de ne pas bouger, que nous allions recevoir leur visite. Les voilà qui arrivent ; du signe de la main, notre Empereur dit que personne ne bouge ; ils firent le tour de la table, et l’empereur de Russie nous dit :
    — Grenadiers, c’est digne de vous ce que vous avez fait.
    Après leur départ, nos Russes qui étaient à leur aise recommencèrent à manger de plus belle... »
    Entre les deux souverains en train de se partager l’Europe, c’est une véritable amourette. On les rencontre, le soir, se tenant tous les deux par le bras, « Moi, passer mes journées avec Bonaparte, écrit le tsar, être des heures entières avec lui ! Je vous demande un peu si tout cela n’a pas l’air d’un rêve ? »
    Napoléon propose à l’empereur de Russie de lui donner la Pologne prussienne, c’est-à-dire tout le territoire s’étendant entre le Niémen et la Vistule. Par pudeur vis-à-vis de son allié, Alexandre n’ose pas accepter. Les projets n’en bouillonnent pas moins... La Russie aurait l’Orient, la France l’Occident ! On parle même d’une alliance ! Et Alexandre, stupéfait, écrit à sa soeur Catherine : « Dieu nous a sauvés, au lieu de sacrifices, nous sortons de la lutte avec une sorte de lustre ! »
    Pour le tsar, les conditions de paix sont étonnamment favorables. Sans doute le roi de Saxe reçoit-il le duché de Varsovie, mais Alexandre se tire d’affaire en abandonnant ses possessions méditerranéennes auxquelles l’Empereur tient beaucoup, car il désire que la Méditerranée devienne une mer exclusivement française. Un traité d’alliance avec Napoléon est prévu et – surtout – le tsar prend l’engagement d’être le médiateur entre la France et l’Angleterre. Si son rôle d’arbitre ne parvenait à aucun résultat, la Russie déclarerait la guerre à Londres et adhérerait au Blocus continental. Enfin, Alexandre reconnaissait la Confédération du Rhin, les royaumes napoléoniens, et approuvait la mutilation projetée de la Prusse...
    Napoléon avait même pensé détrôner le roi de Prusse. « Un petit Hohenzollern qui figurait à l’état-major de Berthier, racontera l’Empereur, me demanda à l’asseoir sur le trône. Je l’y aurais bien mis, s’il fût descendu de Frédéric, mais sa branche était depuis trois cents ans séparée de son aînée et je crus aux protestations que me prodigua le roi de Prusse. »
    Le tsar a, en effet, put obtenir, non sans mal, que l’on fasse enfin venir Frédéric-Guillaume à Tilsit. Le malheureux arrive piteux, lamentable, amaigri, telle une victime. Coignet s’exclame :
    — Le vilain souverain !
    Lorsque les trois monarques partent à cheval, les deux empereurs, meilleurs cavaliers, distancent le roi. Et Napoléon de constater, impitoyable :
    — C’est un homme entièrement borné, sans caractère, sans moyens, un vrai benêt, un balourd, un ennuyeux !
    Le tsar avoue son impuissance au malheureux souverain venu mendier un morceau de sa couronne.
    — J’ai fait tout ce qui était possible humainement. Il m’est cruel de perdre jusqu’à l’espoir de vous être utile autant que mon coeur l’aurait désiré.
    Napoléon enlève à Frédéric-Guillaume la moitié de ses États, en précisant bien au ministre de Prusse :
    — Ayant achevé mes affaires avec l’empereur Alexandre, je n’ai même pas l’intention de négocier avec la Prusse. Votre roi doit tout à l’attachement chevaleresque de l’empereur Alexandre ; sans lui, la dynastie royale aurait perdu le trône et j’aurais donné la Prusse à mon frère Jérôme. Dans ces circonstances, votre souverain doit accepter comme une faveur de ma part si je laisse encore quelque chose en sa possession.
    Il ne reste au roi qu’un espoir : faire venir à Tilsit sa femme, la ravissante, sentimentale et intelligente reine Louise. Frédéric-Guillaume compte que la beauté de sa femme pourra attendrir le vainqueur. Bien qu’elle aimât d’un amour platonique Alexandre – elle le considérait comme un dieu –Louise était une épouse modèle. « Les conditions sont effroyables », lui fait savoir son mari en la suppliant de prendre le

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