Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Néron

Néron

Titel: Néron Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
Vom Netzwerk:
ambition.
    Ne disait-elle pas d’ailleurs d’une voix forte, défiant tous ceux qui l’entouraient dans l’une des salles du palais où elle réunissait les magistrats de la cité, qu’elle était la première Romaine depuis la fondation de la ville à être à la fois fille d’imperator, sœur, épouse et mère des souverains du monde ?
    Elle avait ainsi nommé Germanicus, Caligula, Claude et Néron. Elle annonçait donc la désignation de son fils alors que Claude régnait encore.
    Mais qui pouvait empêcher le destin qu’elle annonçait de s’écrire ?
    Déjà Néron, en tunique et toge brodées d’or, couronné de lauriers, paradait dans Rome à l’égal des généraux vainqueurs et des empereurs.

 
     
11
    Rome tout entière me paraissait ainsi déjà soumise à Agrippine.
    J’entendais la plèbe acclamer son fils lorsque, debout sur un char, le corps cambré, tirant sur les rênes de ses quatre chevaux, il passait au galop en tête de la course, faisant jaillir sous les sabots et les roues le sable du cirque.
    On l’applaudissait encore dans les salles des villas de l’Aventin ou de l’Esquilin. Mais le public n’était plus composé de pauvres citoyens qui espéraient une mesure de grain, un flacon de vin ou une poignée de deniers pour prix de leur enthousiasme sur les gradins de l’amphithéâtre.
    Là, dans ces pièces décorées de statues et de fresques, devant des tables croulant sous les fruits, les pâtés, les viandes, les beignets, qu’éclairaient des flambeaux qui faisaient briller les carafes contenant les meilleurs vins d’Italie, d’Espagne, de Gaule narbonnaise et même de Grèce, se pressaient les plus riches, les plus puissants, les plus savants et les plus cultivés des Romains.
    Ils étaient sénateurs, avocats, tribuns, poètes. Les uns se piquaient d’écrire à l’égal de Virgile, d’Ovide, de Cicéron, voire d’Homère et de Thucydide. Ils avaient pour la plupart suivi à Rhodes l’enseignement des maîtres grecs. Certains étaient de jeunes écrivains : ainsi Pétrone, Lucain ou Martial qui avaient conquis leur place autour de ces tables généreuses grâce à leur talent ou à la protection d’un parent, d’une famille originaire de la province d’où ils arrivaient, Espagne ou Gaule. Ces hommes là avaient l’esprit et le regard affûtés. Leur langue était aiguisée comme la plus cruelle des lames. Ils n’étaient dupes de rien. Ils savaient que l’argent était le sang de Rome. Qu’on y était d’autant plus citoyen, d’autant plus libre qu’on en possédait. Alors on pouvait prendre à son service des dizaines d’esclaves, des pueri et des puellae pour animer les nuits.
    — Si je n’avais pas mes petites chiennes, comment passerais-je mes nuits ? murmurait l’un de ces puissants. Elles me lèchent et me fourrent leur langue dans l’oreille, ce qui m’évite d’entendre ces charrois, tout ce vacarme qui fait qu’on ne peut dormir à Rome.
    On riait.
    — Tu n’as pas de chiots, seulement des chiennes ?
    — Toutes les langues habiles me satisfont. Et je paie ce qu’il faut pour qu’elles le soient.
    Quelqu’un murmurait à l’oreille de l’un de ces jeunes écrivains avides :
    — Tu veux être riche, toi aussi, posséder de ces jeunes esclaves ? Fais-toi avocat, ça rapporte gros. Minerve a de l’or plein ses coffres.
    Puis, tout à coup, Néron apparaissait, commençait à jouer de la cithare, à réciter de sa voix mélodieuse, et tout le monde applaudissait.
     
    J’en voulais à Sénèque, dont j’admirais la sagesse et la rigueur, d’être chaque jour plus indulgent, et même, j’ose l’écrire, plus servile à l’égard d’Agrippine et de Néron.
    Lui était pourtant capable, dans le parc de sa villa, de me parler longuement de la religion égyptienne, de ce Nil auprès duquel il avait vécu plus de cinq années, où il avait connu le prêtre Chaeremon et s’était imposé une vie ascétique ; et cependant je l’entendais flatter Agrippine et Néron, dire que le dieu Apollon lui était apparu longuement en songe.
    Il décrivait ce qu’il avait rêvé, Apollon déclarant : « Néron me ressemble par la beauté. Son visage brille d’un doux éclat, flamboie ainsi que son beau cou sous ses cheveux flottants. »
    Et l’on applaudissait.
    Un peu dédaigneuse, Agrippine rappelait que la lumière d’Apollon avait éclairé son fils au jour de sa naissance, avant même d’effleurer la terre.
    Burrus,

Weitere Kostenlose Bücher