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Néron

Néron

Titel: Néron Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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de l’empereur.
    Les nouveaux sénateurs – les Vitellius, les Nerva – étaient aux ordres de Néron. Ils dénonçaient Thrasea Paetus qui, au Sénat, rassemblait autour de lui les quelques pères de la Patrie décidés à s’opposer à la tyrannie.
    On disait qu’avec ses amis stoïciens Thrasea célébrait par des festins les anniversaires de Cassius et de Brutus, les assassins de César. Et qu’il considérait Sénèque comme un jouisseur, un stoïcien de cour qui servait Néron par ambition et pour accroître sa fortune.
     
    Je souffrais de ces accusations portées contre mon maître.
    Il me paraissait vieilli, déçu, non par ce que Thrasea pensait de lui, mais à cause de l’échec de sa politique.
    Néron s’abandonnait à sa nature sauvage. Devenu un autocrate, un tyran, il rêvait non pas d’établir – comme le lui avait conseillé Sénèque – un équilibre entre le pouvoir impérial et celui du Sénat, mais une monarchie orientale telle que les Grecs en avaient implanté dans leurs colonies. Il ne supportait plus que l’on ne s’enthousiasmât pas devant les spectacles et les jeux où il apparaissait, histrion et conducteur de char, ou qu’on refusât d’exécuter la moindre de ses volontés.
    Il avait ainsi décidé de faire condamner le préteur Antistius Sosianus qui avait, au cours d’un banquet, récité quelques vers satiriques qui ridiculisaient l’empereur.
    — Crime de lèse-majesté ! avait murmuré Sénèque en me rapportant l’incident.
    Un délateur – Cossutianus Capito – avait dénoncé Antistius à Néron. Celui-ci avait saisi le Sénat pour qu’on appliquât au coupable le châtiment prévu. Il devait être battu à coups de verge puis décapité. Thrasea avait refusé d’approuver cette condamnation et beaucoup de sénateurs s’étaient ralliés à lui, déchaînant la colère de Néron.
    — Il a fait mine d’accepter la position du Sénat, avait précisé Sénèque. Antistius ne sera ni battu ni décapité, mais dépouillé de ses biens et exilé. Pourtant, crois-moi, Néron n’oubliera ni Antistius, ni Thrasea, ni moi, qui ne l’ai pas approuvé.
     
    Nous étions assis épaule contre épaule dans le parc de sa villa que nous avions parcouru, selon notre habitude, tout en devisant.
    Il s’est penché en avant comme si quelqu’un avait pesé sur sa nuque.
    — Serenus, la mort s’avance vers nous, a-t-il soupiré.

 
     
30
    Cette mort que Sénèque voyait s’avancer, je la rencontrais à chaque pas que je faisais dans Rome.
    Elle était ce Germain de la garde de Néron qui brisait les os d’un homme dont le corps disloqué s’effondrait sur le pavé, au milieu de la foule acclamant l’empereur.
    L’homme avait ricané en voyant Néron jouer de la flûte, entouré d’acteurs, de citharèdes. Un de ces délateurs qui recevaient chaque jour une poignée de sesterces avait couru jusqu’aux prétoriens de Néron et montré l’homme du doigt. La foule s’était écartée, les soldats avaient empoigné l’homme aux épaules, et l’un d’eux, ce Germain, avait entrepris de le rouer de coups.
    Le corps était resté étendu sur les pavés et des chiens errants venaient le flairer, lécher le sang qui s’était répandu, lacérer les vêtements et bientôt les chairs.
     
    Plus loin, dans une ruelle du quartier du Velabre, la mort avait le visage de ces hommes, de ces femmes et de ces enfants en train de lapider un couple qui, les bras levés, tentait de se protéger le visage. À chaque fois que les pierres atteignaient les corps collés l’un contre l’autre, des cris, des rires s’élevaient.
    Une voix lançait :
    — Chrétiens, vous allez ressusciter ! Priez votre Dieu !
    Et une nouvelle volée de silex accompagnait ces mots.
     
    Je regagnais la villa de Sénèque.
    Il semblait ne pas avoir bougé, et pourtant, plusieurs heures, parfois plusieurs jours s’étaient écoulés, mais je le retrouvais assis à la même place, non loin des cyprès et de cette statue d’Apollon qu’il avait fait édifier dans son jardin, là où il avait l’habitude de méditer, peut-être en hommage au dieu qui, selon lui ou selon ce qu’il avait voulu faire accroire – inspirait Néron.
    Je m’asseyais près de lui.
    Nous restions d’abord silencieux, puis, comme si nous reprenions, après un court silence, une conversation interrompue, il murmurait :
    — Ce n’est en rien un grand mal, celui qui marque le terme de tous les

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