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Néron

Néron

Titel: Néron Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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ne faut pas s’affliger avant que le temps n’en soit venu, me disait-il.
    Je rétorquais qu’au palais impérial Tigellin, Poppée et leurs délateurs dressaient des listes de noms. Ils les remettaient chaque jour à Néron, prétendant que Sulla et Rubellius Plautus – l’un exilé à Massilia, l’autre en Asie – conspiraient, cherchaient à soulever légions et provinces, cependant qu’à Rome les sénateurs Thrasea et Pison, mais aussi Sénèque préparaient l’assassinat de l’empereur.
    Néron les écoutait d’un air las, puis il s’emportait, les yeux exorbités, marmonnait des injures, lançait des malédictions, criait qu’il fallait défendre l’Empire contre ceux qui le trahissaient. Il avait été clément, mais on l’avait trompé et le châtiment des conspirateurs serait impitoyable. Il frapperait avec la force d’un dieu. Il était fils d’Apollon, hurlait-il, et ceux qui l’avaient oublié seraient suppliciés !
     
    On disait que des tueurs étaient déjà partis pour Massilia, qu’une soixantaine de soldats commandés par l’eunuque Pelagon, qui avait participé à toutes les orgies, s’apprêtaient à prendre la route de l’Asie.
    Rubellius Plautus était un rival dangereux, descendant d’Auguste, comme Néron, riche de milliers d’esclaves qui faisaient prospérer ses immenses domaines en Afrique, et bénéficiant sans doute de l’appui du général Corbulon, qui commandait les légions d’Asie, et de son beau-père, Antistius Vêtus, ancien consul, légat en Germanie supérieure.
    Et, lorsque Tigellin avait ajouté que Rubellius Plautus vivait entouré de philosophes stoïciens – le Grec Caranius, l’Étrusque Musonius Rufus, des amis de Sénèque –, Néron s’était levé, avait frappé du pied et du poing les esclaves qui se trouvaient auprès de lui, criant qu’il fallait en finir avec les conspirateurs, les tuer avant qu’ils ne passent à l’action.
     
    J’étais surpris du calme avec lequel Sénèque accueillait mes propos. Il repoussait ses tablettes, ses livres, ses stylets et ses parchemins. Il quittait son écritoire, se dirigeait vers l’atrium où je le suivais.
    — Si je me suis dissimulé, si j’ai fermé mes portes, me disait-il, c’est afin de pouvoir servir d’une autre façon un plus grand nombre d’hommes. Ici, dans ma solitude, je fais plus que m’améliorer, je deviens autre. Tu ne peux imaginer, Serenus, à quel point je constate que chaque jour m’apporte des choses importantes.
    — Les tueurs de Tigellin quittent Rome, Sénèque, pour perpétrer leurs crimes, certains sont peut-être déjà dans ton jardin à te guetter.
    Il secouait la tête.
    — Il y a plus de choses qui nous font peur qu’il n’y en a qui nous écrasent, et nous souffrons plus souvent en imagination qu’en réalité.
    Si j’insistais, il ajoutait :
    — C’est un mal que de vivre sous l’emprise de la nécessité, mais vivre sous l’emprise de la nécessité n’est pas nécessaire.
    Il s’arrêtait devant un esclave qui nettoyait le bassin de la fontaine.
    — Je l’ai connu enfant, murmurait-il après l’avoir dévisagé. Tu vois ses rides, sa bouche édentée ? J’ai vécu longtemps, Serenus. Bien des arbres que j’ai fait planter dans le jardin sont morts foudroyés. Mon âme sait que le temps m’est compté. Ce n’est plus la vie qui m’importe, mais la manière de la quitter. Si je peux, je choisirai le moment.
    J’ai dit, regrettant aussitôt ma phrase :
    — Néron, si tu le laisses faire, décidera pour toi, pour moi, pour tous ceux qui veulent que Rome reste Rome !
    Sénèque m’a considéré longuement.
    — Les dieux disposeront, a-t-il murmuré.
     
    Ils ont choisi de laisser agir les tueurs de Néron.
    Trois d’entre eux ont fait irruption dans la salle à manger de Faustus Cornélius Sulla, à Massilia. Ils se sont jetés sur lui cependant que les esclaves s’enfuyaient.
    Sulla était un homme encore jeune, mais aux cheveux déjà gris, au corps lourd.
    Néron l’avait chassé de Rome en lui confisquant tous ses biens, craignant que ce descendant d’Auguste, ce demi-frère de Messaline, cet époux d’Antonia, l’une des filles de l’empereur Claude, ne devînt un jour un rival.
    À Massilia, Sulla s’était contenté de maudire Néron, de lui prédire une mort ignominieuse, mais l’homme était sans ressources, trop indolent aussi pour être menaçant.
    Lorsque les tueurs ont levé leurs glaives, il

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