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Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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juge nécessaire, vous
protesterez mais le Président sera parti.
    Son intention était de menacer, mais Vidal insistait, et
Ritzen, le 24 avril, alors que les troupes défilaient, les badauds applaudissant
tout au long de l’avenue de la Gare, avait fait arrêter une dizaine de meneurs,
Sauvan, Lambert, Borello, l’instituteur, Clément, un électricien qui, depuis un
an, s’était mis en tête de constituer un syndicat dans les Alpes-Maritimes.
    « Ce sont des mesures arbitraires », disait
Karenberg à Ritzen. Il était accompagné de maître Bardon, un avocat au barreau
dont l’appartenance au parti socialiste était connue.
    — Asseyez-vous, disait Ritzen, je vous en prie. Et ne
dramatisons pas.
    Maître Bardon invoquait les droits de l’homme, le respect de
la constitution, l’article 22, l’abus de pouvoir.
    — Monsieur le Baron et moi, mon cher Maître, sommes de
vieilles connaissances, je suis républicain, je respecte toutes les idées, mais
pas les menaces contre l’ordre républicain. Si l’on se tient dans le cadre de
la loi, comme vous Messieurs, je n’ai rien à dire, au contraire, rien ne dit
que je ne vote pas pour M. Karenberg aux prochaines élections, pourquoi pas,
d’ailleurs vous recevrez l’un et l’autre une invitation pour la réception du
président de la République à la préfecture.
     
    Les invités commençaient à entrer dans le salon d’apparat.
On avait convié tous les maires du département. Ceux des hautes vallées
alpestres, écharpe tricolore, costume de velours foncé, gardaient leur béret à
la main, avançaient à pas lents, hésitant à s’approcher des buffets. Le maire
d’Antibes, le notaire Guidicelli reconnaissait Ritzen, lui parlait de son
beau-père, « Sartoux devrait me succéder », disait-il, « et
pourquoi pas ? ». Il se penchait vers Ritzen, « vous-même, plus
tard, quand vous serez à la retraite ». Il entraînait Ritzen loin de
l’entrée où s’agglutinaient les invités qui n’osaient pas, semblait-il, se
détacher les uns des autres.
    — Dans un département comme le nôtre, avec cette
population étrangère, calme en général, mais n’est-ce pas, voyez ce qui se
passe dans les Balkans, la guerre n’est pas impossible, et demain, demain ?
Je crois que les citoyens ont besoin d’être guidés par des hommes comme vous
qui sont attachés à l’ordre, pensez à votre beau-père, il serait facilement
élu, je ne compte pas me représenter, et lui dans la place, pour vous…
    — Mon cher maire, que complotez-vous ?
    C’était Merani, joyeux, sa femme souriante, une robe blanche
serrée à la taille, se tenait en retrait un peu méprisante.
    — Merani, qu’en pensez-vous ? interrogeait
Guidicelli. Je souhaitais que Ritzen devienne un jour l’un de nos maires, son
beau-père est d’Antibes, il se présente, je fais campagne pour lui et le beau-père
passe la main au beau-fils.
    — Pourquoi pas en effet, dit Merani, mais quelle
générosité ! Ritzen, un homme politique ne donne rien pour rien même quand
il se retire, et Guidicelli est un homme politique jusqu’au bout des ongles.
    — Moins que vous, docteur.
    — Vraiment je ne sais pas.
    Il y eut sur la place un roulement de tambour, des
acclamations que couvrait l’éclatement vif des clairons. Tout le monde se
précipita vers les fenêtres, les serveurs eux-mêmes se tournant. Le cortège présidentiel
venait de pénétrer sur la place. Le landau entouré de cuirassiers qui faisaient
autour de lui deux traînées scintillantes et mouvantes comme les écailles de la
mer, s’immobilisait. Le président Fallières soulevait son haut-de-forme, le
tenait à bout de bras. Un homme trapu aux cheveux et à la barbe blanche
qu’accueillaient Rancaurel et le préfet, le protocole ayant décidé que les
présentations se feraient dans le salon d’apparat. La musique jouait maintenant la Marseillaise. Ritzen s’éloigna des fenêtres, parcourant à pas lents
la salle où les invités se tenaient immobiles. Le chef du protocole demandait
aux maires de se ranger sur l’un des côtés, les autorités militaires leur
faisant face, les personnalités du département se trouvant au fond. Ritzen
reconnut Carlo Revelli au moment même où Helena Hollenstein l’apercevait. Il
était au dernier rang des invités mais il les dominait de la tête, paraissant
plus grand peut-être aussi parce qu’il semblait absent, le visage levé comme
s’il regardait les lustres.

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