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Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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respiration difficile, Merani au contraire tout à son récit
reprenait :
    — Vous vous souvenez, c’était dans votre bureau Ritzen,
vous aviez cueilli un certain nombre d’anarchistes et le baron Karenberg et
Carlo Revelli. Monsieur Hollenstein, je ne sais qu’elle est la situation en
Autriche-Hongrie, mais en France, c’est un chassé-croisé, les aristocrates, les
bourgeois – prenez Jaurès – deviennent socialistes, anarchistes et
les ouvriers propriétaires, je vous parlerai un jour de Revelli…
    — L’entrepreneur ? demanda Hollenstein.
    — Tenez…
    Merani montrait Revelli qui s’était levé, parlait à demi
courbé à un homme petit, aux moustaches retroussées.
    — Il parle avec Negresco, c’est un autre exemple, un Roumain,
qui en 93 n’était qu’un commis de restaurant à Monte-Carlo, puis directeur du
restaurant du Casino municipal et aujourd’hui à la tête de deux sociétés
chacune au capital de 2 500 000 francs.
    Elisabeth d’Aspremont venait de rejoindre son mari qui la
présentait, continuait.
    — Ma femme vous dirait que je m’étonne du jeu normal de
la démocratie, le va-et-vient.
    — Qui finance ? dit Hollenstein, c’est toujours la
question, derrière Negresco il y a les automobiles Darracq, les soufrières de
Marseille.
    — Et derrière vous ? demanda Merani en riant.
    — Il y a moi simplement.
    Helena donnait des signes de fatigue. Ritzen qui l’observait
remarqua qu’elle fermait les yeux dès qu’elle pensait qu’on ne la regardait
pas. La sueur coulait de ses tempes et laissait de chaque côté des oreilles une
fine traînée dans la poudre.
    — Je voulais utiliser l’entreprise Revelli pour ma
construction, continuait Hollenstein, je ne sais pas pourquoi Revelli a
toujours refusé, je n’ai même pas pu discuter les conditions éventuelles.
    — Son contrat avec Negresco le lui interdit sans doute,
dit Merani.
    — Peut-être, dit Hollenstein.
    Le président Fallières sortait du salon en compagnie du
Préfet, du Maire et de Clemenceau. Merani s’excusa. Hollenstein et Helena
s’éloignèrent.
    — Vous savez, dit Guidicelli, en retrouvant Ritzen, ma
proposition est sérieuse. Merani vous mettra toujours en garde, il voudrait
être le seul homme politique du département, qu’il soit ministre, puisqu’il ne
pense qu’à ça !
    De la place montaient à nouveau des acclamations, les notes
vives des clairons qui ouvraient et fermaient le ban. Dans le salon, le
brouhaha des voix s’amplifiait. Merani pérorait au milieu d’un groupe de maires
et Elisabeth d’Aspremont regardait ironiquement son mari.
    Ritzen vit Helena Hollenstein qui seule, Hollenstein la
suivant, la tête baissée, traversait les jardins de la préfecture. Elle allait,
d’une démarche rapide et nerveuse, cambrée.
    Sur le perron, sa femme lui tenant le bras, Carlo Revelli,
immobile, paraissait attendre qu’elle s’éloigne pour s’avancer à son tour.

26
    Helena téléphonait vers cinq heures de l’après-midi à la
station de taxis-autos qui se trouvait devant le Casino municipal, place
Masséna. Trois ou quatre taxis, leurs chauffeurs assis à l’ombre des arcades,
s’alignaient près des fiacres depuis qu’en juillet 1909 le syndicat des maîtres
cochers de Nice avait accepté la création de ce service automobile. Bientôt,
elle n’eut plus à téléphoner, l’un des chauffeurs lui proposa de venir
régulièrement la chercher et elle accepta. Mais, dès que cinq heures
approchaient elle était prise de remords, lançant son chapeau sur un fauteuil,
appelant Italina, la nourrice italienne, demandant à voir Nathalie. La nourrice
revenait, portant Nathalie, le visage rose comme le cœur vif d’un iris, la
dentelle blanche couvrant les bras d’Italina. Helena se levait, prenait sa
fille contre elle, la couvrait de caresses et de baisers. Nathalie criait.
    — Qu’est-ce qu’elle a ? demandait Helena, que lui
as-tu fait ?
    Italina répétait calmement :
    — Rien Madame, rien, elle pleure comme tous les
enfants.
    — Nourris-la, fais quelque chose.
    Helena s’affolait et parce qu’elle ne pouvait plus entendre
ces cris, elle se bouchait les oreilles. Italina reprenait Nathalie et Helena
s’allongeait sur le lit. Elle dégrafait sa robe, pressait sa poitrine douloureuse
comme si elle avait eu du lait, mais elle était sèche. Sèche, creuse. Ce vide
peu à peu l’envahissait, une forme vivante et sans contours, placée au-dessous
des

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