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Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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fenêtre à l’autre : Un grand calme, une froide
résolution et un ordre parfait, la France…, effacées parfois par la
provocante chanson d’un enfant qui traversait en courant la ruelle et qu’on
étouffait pour laisser place, de nouveau, aux communiqués de la T.S.F.
Alexandre avait déjà rejoint son unité, Nathalie était assise sur le parquet,
près d’Yves. Elle embrassait Violette :
    — Mon père voudrait que je parte avec Yves, disait-elle
en secouant la tête. Mais non, non. Tu sais qu’ils ont signé, il y a une
semaine. Carlo Revelli a tout racheté. Mon père n’est plus que le directeur
gérant de l’Hôtel Impérial.
    Elle s’interrompait, écoutait une des voix :
    — Si l’Italie, reprenait Nathalie, s’ils nous
attaquent, Alexandre est en première ligne.
    — Non, disait Violette, non, Sam ne croit pas qu’ils
oseront.
    Nathalie se penchait sur Yves qui s’accrochait à son cou, et
Violette apercevait, mêlés aux longs cheveux de Nathalie, ces doigts menus qui
s’entrelaçaient. Nathalie lui présentait l’enfant. Violette l’entourait de ses
bras, commençait à le bercer, désespérée de cette joie qu’elle éprouvait, cette
douceur qui rayonnait. Yves commençait à fermer les yeux :
    — Et Sam ? chuchotait Nathalie.
     
    Sam avait déroulé ses toiles anciennes, riant tout à coup. « Celle-là… »,
commençait-il, mais la T.S.F. annonçait un bulletin spécial d’informations. Il
s’approchait de Violette, écoutait, prenait la cigarette qu’elle fumait,
aspirait une bouffée.
    — Tu comprends ? demanda-t-il.
    Il décrochait un tableau, le retournait :
    — Février 33, je savais bien. Tu comprends, il y a
d’abord le nazisme, et ça – il levait la main – c’est mon affaire,
juif, polonais, je ne peux pas, je ne serais plus moi. Tu comprends ?
    Il s’asseyait près de Violette, lui caressait le visage.
    — S’ils gagnent aussi contre la France, il faudra des
années.
    Il prenait une feuille de papier, le bruit de la plume,
aigu, griffure bleue qu’il interrompait.
    — Jean Karenberg, ce communiste. Il a téléphoné à
Alexandre. Il voulait se tuer. Hitler avec Staline, ça l’a rendu fou. Heureusement,
quand on téléphone on ne se tue pas.
    Il recommençait à écrire.
    — Tu restes ici, disait-il en glissant la feuille dans
une enveloppe. Tout, tout est à toi. Si tu as besoin, tu vends.
    Elle se couchait sur le ventre, elle se bouchait les
oreilles. Sam lui prenait le bras, écartait la paume de l’oreille :
    — Tu commences par les lithos, les dessins, puis les
dernières toiles, et tu gardes les premières pour quand je reviens.
    Il l’embrassait sur la tempe, à la racine des cheveux.
    — Tu m’accompagnes, demain ?
    La gare, ce train. Ces hommes silencieux que la fatigue
semblait avoir déjà saisis. Et Sam qui attirait Violette contre lui.
    — Je ne sais pas s’ils voudront de moi, je suis
peut-être trop vieux.
    Il grimaçait, puis il cherchait les lèvres de Violette,
qu’il effleurait.
    — Merci, Violette.
    Il lui tournait le dos, devenant l’un quelconque de ces
hommes qu’elle apercevait agglutinés dans les wagons.
     
    — Sam va essayer de s’engager, disait Violette à
Nathalie. Il fera tout.
    Elle tendait Yves, endormi, à sa mère. Elle retrouvait les
ruelles creusées à ces voix qu’écoutaient des hommes groupés devant le bar-tabac,
près de la place. Elle croisait la femme de ménage :
    — On a téléphoné, j’ai dit que Monsieur était parti, je
sais pas qui.
     
    Rafaele est debout entre les deux palmiers, et son visage
disparaît parce que la lumière dans son dos, vive encore, éblouit Violette.
    — Sam est parti, dit Violette.
    — Je sais, répond Rafaele. On m’a dit.
    — Et vous ?
    Elle entre dans l’atelier enveloppé par la pénombre, la voix
de la T.S.F. déclame, trop haute : … La cause de la France se confond
avec celle… Violette tourne le bouton de l’appareil.
    — Et vous ? répète-t-elle.
    Elle ne s’est pas retournée, mais elle sait que Rafaele est
là, à quelques pas. Il avance, lui fait face.
    — Je voulais, dit-il, puisque je dois partir…
    Il a entrecroisé ses doigts sur la nuque de Violette et il
approche son visage, un peu de biais, elle voit ses yeux qui restent ouverts,
leurs corps ne se touchent pas, seulement les lèvres, puis les épaules. Elle a
les bras tendus, droits, elle serre les poings pour ne pas saisir la taille

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