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Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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Revelli. Même Alexandre,
bientôt il sera député socialiste. Pas mal pour le fils de Carlo Revelli !
    Il allumait un cigare, le montrait à Violette :
    — Un colonel américain, Strang, est venu l’autre jour,
il m’a laissé deux boîtes, seulement pour le plaisir de voir mes toiles. Il va
écrire un article sur le peintre combattant, le peintre des maquis, est-ce que
je sais ? C’est bon pour l’Amérique. Ce sont eux qui ont les dollars. Tu
te souviens d’Arthur Becker ? (Il était debout devant Violette, parlant
trop vite pour être vraiment désinvolte.) Il est aux États-Unis, il m’écrit
que, là-bas, je suis attendu comme le messie. Pas mal pour un Jude, non ?
    Il riait, s’approchait à nouveau de moi.
    — Il paraît que toi et Violette vous avez sauvé un gosse ?
Bravo, on va vous décorer vous aussi. Tu sais qu’ils me décorent, disait-il
tourné vers Violette.
    Il tentait d’attirer son attention, mi-bouffon mi-sérieux,
acteur qui charge son rôle. Mais Violette regardait Vincent.
    — Tu n’as toujours rien décidé ? demandait Sam
d’une voix changée.
    Elle faisait non, un mouvement de la tête, sans quitter son
fils des yeux. Sam me faisait face, reprenant sa voix de comédie.
    — Les femmes, Roland. Ecoute-moi, le travail,
travaille, crève-toi, mais laisse les femmes de côté.
    — Il est amoureux de Katia Lobanovsky, disait Violette.
Il me parle d’elle tous les jours.
    — Aïe, Aïe, Aïe, s’exclamait Sam. (Il me prenait par
les épaules.) Mon vieux, j’ai compris. Tu fais partie de la catégorie la plus
sinistre, ceux qui choisissent les femmes qui les font souffrir. Au fond (il
paraissait hésiter, m’abandonnait, saisissait les mains de Vincent, l’aidait à
courir) tu es comme ton père. Et comme moi. Nous sommes les meilleurs va.
    Il s’asseyait près de Violette, à même la terre et je
comprenais qu’il fallait que je parte. Je descendais en roue libre vers la
ville, les mains dans les poches du blouson, je passais par le port, Roba
Capéu, peut-être était-elle là ?
    Crier son nom, entrer dans la chambre.
    Je posais mon vélo contre la balustrade, je me mêlais aux
badauds, j’écoutais. Ils montraient le quai des Etats-Unis, vers les barques
qui avaient retrouvé leurs places. « Là, disaient-ils, à 7 heures, devant
le monument du Centenaire aujourd’hui, c’était annoncé, moi j’ai pas vu.
Fiorucci, il leur a dit dans la voiture aux policiers, c’est les Allemands qui
m’ont fait faire ça. Tricoux, lui, il a pas parlé. Ils vont aussi fusiller une
femme. »
    Le soir dans l’atelier de mon père, j’ai reconstitué la
scène. Antoine racontait.
    Le matin, vers 7 heures le cordon de police tenait la foule
à distance, peut-être Katia Lobanovsky, de sa fenêtre, avait-elle entendu la
rumeur, les commandements, le heurt des crosses de fusils sur la chaussée, à
quelques centaines de mètres à peine de Roba Capéu, sur le quai que le soleil
déjà éclaire, et la mer est calme, couleur des galets, où commence le rivage,
où finit-elle ? Les voitures sont arrivées et Katia a dû voir qu’on nouait
un bandeau sur le visage de deux hommes, et le feu du peloton, roulement de
tambour d’un opéra.
    — Ils les ont fusillés comme ça, en public, expliquait
Antoine sur la Promenade. Fiorucci et Tricoux, et il paraît qu’il y a des gens
qui ont applaudi. Moi (il avait une moue de dégoût) ça me donne envie de vomir.
    — Qu’est-ce que tu veux ? (Mon père s’emportait,
donnait un coup de pied dans les caisses.) Tricoux, il commandait la Milice,
non ? Et Fiorucci, Torrin et Grassi, c’est lui qui les a dénoncés. On les
a pendus, non ? En public, sur l’avenue. Et Karenberg, il est toujours
là-bas, s’il est vivant. Et Rafaele, tu l’as vue sa plaque ? Cette guerre,
elle s’est faite dans la rue.
    Antoine s’essuyait le front du revers de la main.
    — Rafaele Sori pour moi, c’était comme toi. Et son
frère Francesco, c’était comme le mien. On l’a fusillé aussi. Seulement, si on
fait ça, tuer les gens dans la rue, c’est qu’on est pareil, Dante ; et moi
alors, si c’est la même chose, je continue à gâcher mon plâtre.
    — Tu crois que ça me plaît ! criait mon père.
    — Toi Dante, répondait Antoine (il sortait en baissant
la tête pour ne pas heurter du front le cadre bas de la porte) tu as toujours
tout accepté. Au fond, tu veux simplement changer les juges. La justice, tu
t’en

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