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Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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grandes pièces de Semitchasky, le feu s’éteignait peu
à peu, ils se blottissaient l’un contre l’autre, des domestiques les surprenaient
endormis, posant sur eux des couvertures, jetant une bûche dans la cheminée et
les flammes hautes réveillaient Frédéric et Helena, toute une partie du corps
transie.
    — Raconte-moi, répéta Frédéric.
    — Tu te souviens, commença Helena, l’hôtel de Vienne,
le hall, quand nous avons laissé papa.
    — L’hôtel Métropole, dit Frédéric.
    Il revoyait leur père qui depuis l’escalier alors qu’ils
s’éloignaient les saluait. Et ce fut sa dernière image.
    — Ton voleur était là, caché derrière une colonne, il
tenait sous son bras le coffret, et dans l’autre main une sorte de lance. Papa
montait vers lui, j’ai crié mais ton voleur m’a regardée et j’ai rattrapé Papa,
je lui ai montré la colonne où l’autre se cachait. Père hésitait à avancer, je
lui ai dit « avance » et je savais qu’on allait le tuer et c’est moi
qui le dirigeais vers l’assassin.
    — Ce n’est pas bien grave, petite sœur, dit Frédéric.
    — Mais après, dit-elle, c’est après.
    Helena prit les mains de son frère.
    — Dis-moi.
    Frédéric lui caressait le visage.
    — Dis-moi, répéta-t-il.
    — Après, j’ai plongé mes mains dans quelque chose de
noir, de sale, ce devait être son sang et je me suis toute barbouillée, le
visage, les jambes, j’en mettait dans ma bouche, partout, et j’avais envie de
vomir et plus j’avais envie de vomir et plus j’en avalais, j’en prenais et
j’avais envie de vomir davantage, je m’étouffais, je m’étouffe Frédéric, je
m’étouffe.
    Helena se cabra, eut un haut-le-cœur, Frédéric sentit sur le
front de sa sœur une sueur froide.
    — Calme-toi petite sœur, dit-il, calme-toi.
    Elle se détendait un peu, reprenait.
    — J’ai dû pousser un cri en dormant, j’avais tant envie
de vomir que je me suis réveillée.
    Frédéric servit à Helena un verre d’eau-de-vie. Il ne savait
que dire, troublé lui aussi, inquiet. Il se mit à parler de Peggy Wood.
    — Je crois que je suis amoureux, dit-il, je suis
anarchiste et amoureux, petite sœur, je voudrais que nous l’invitions, ici.
    Mais Helena était distraite, songeuse à nouveau.
    — À quoi penses-tu, demanda-t-il.
    — Cette photo, ce jeune homme de vingt-deux ans qu’ils
ont décapité avant-hier, j’ai lu l’article, ces éponges, un seau, un paravent
pour l’éclaboussure.
    — Voilà ton cauchemar, dit Frédéric, bien sûr.
    Helena secoua la tête.
    — Je veux le rencontrer, je veux qu’il sache qu’il n’a
rien à craindre de nous, sinon j’aurai toujours peur qu’il revienne.
    Frédéric se mit à rire.
    — Il t’a plu petite sœur, mon bandit.
    Il voulait qu’elle s’insurge contre cette idée qu’il lançait
mais qui dite cessait déjà d’être une plaisanterie.
    — Il me fait peur, dit Helena.
    Puis elle se tut.
    Le lendemain elle paraissait avoir oublié son cauchemar, le
désir de rencontrer Revelli. Assis côte à côte sur la terrasse incandescente,
ils se taisaient les yeux mi-clos, Frédéric servait le thé, buvait une gorgée,
puis s’immobilisant à nouveau avec l’euphorique sensation d’être, jusqu’au plus
profond de soi, brûlé, purifié par la chaleur. Ils pouvaient ainsi l’un et
l’autre, rester de longues heures au soleil. Le Docteur Merani les surprenait
parfois, les mettant en garde, le soleil, disait-il, était l’ennemi de la peau,
des poumons.
    — Vous ne pouvez pas comprendre, répondait Frédéric,
vous ne savez pas ce qu’est la neige, le brouillard, ce besoin de soleil, un
miracle chaque jour.
    Quand Peggy Wood vint pour la première fois à la villa
Karenberg, elle s’enthousiasma.
    — Aidez-moi Frédéric, disait-elle.
    Elle voulait monter sur la balustrade de la terrasse pour
voir de l’Estérel au cap de Nice la côte tranchant le miroir de la mer. Elle
s’appuyait sur l’épaule de Frédéric, elle se haussait sur la pointe des pieds
et il apercevait ses chevilles.
    — Merveilleux, disait-elle, je ne quitterai plus jamais
ce pays, jamais, Papa peut aller où il veut.
    Elle sautait sur la terrasse, sa robe blanche aux larges
plis volant autour d’elle et elle riait, se pliant sur les genoux, retenant sa
robe.
    — Helena, il faudra que je vous apprenne le tennis, ils
viennent de créer un court au Parc Impérial, vous sautez, vous vivez, vous
aussi

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