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No Angel

Titel: No Angel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jay Dobyns
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il est des enquêteurs passionnés de moto qui s’identifient à leurs adversaires et sympathisent avec eux. Il en est même qui créent des clubs. De mon point de vue, ça a toujours été un mystère. Les flics n’imitent pas les parrains de la mafia, ne s’habillent pas comme les Crips and Blood, ne constituent pas des bandes de quartier, donc pourquoi certains d’entre eux créent-ils des clubs de motards sur le modèle d’organisations se livrant au crime organisé ? C’est peut-être à cause du lien que constituent les motos elles-mêmes – le credo du « vivre pour rouler et rouler pour vivre » les réunit tous –, mais en fait je n’en sais rien, je n’aime pas vraiment les motos. Allez comprendre.
    Quoi qu’il en soit, ces attitudes – sous-estimation de leur légitimité en haut, respect et fraternité teintés de méfiance en bas – se sont conjuguées pour fournir un semblant de sécurité aux motards. Voilà ce que je pense. Oui, les armes et la drogue détruisent des vies, mais c’est la violence qui les ruine vraiment, et la violence a été et demeure la source du pouvoir des Hells Angels. Dans les mois qui suivirent, lorsque nous nous sommes rencontrés pour parler des Angels, Slats a développé cette idée. Il comprenait qu’il est facile de se représenter, à tort, les motards hors la loi comme des illettrés blancs, obèses, d’âge mûr, qui portent un gilet de bowling sale, boivent de la bière, passent des heures à raconter leurs aventures avec de vieilles peaux édentées ramassées au bord de la route. Tous ces mecs ne sont pas des tueurs, des violeurs ou des camés. Slats savait que la plupart de ces types ont une vie – un emploi, une famille – qui leur impose des limites. Mais il savait aussi que tout hors-la-loi portant l’insigne en trois parties représente potentiellement une grave menace. Il y a, au sein des Unpourcentistes, une petite proportion de cinglés, de violents et de camés qui ne font que se défoncer, boire et commettre des délits. Il savait aussi que, comme ils sont tous frères, ce petit groupe exerce une forte influence sur la majorité, moins instable. Mettez ces types en contact avec l’alcool, la drogue, les armes, les marteaux, les poignards et l’honneur, et ajoutez à cela un chef violent, la violence devient l’issue probable – voire souhaitée – de tous les conflits. C’est comme une société secrète d’étudiants avec des armes. Nous savions tous que ces types, quand ils se sentent en sécurité, sont capables de choses horribles : passages à tabac, agressions, coups de poignard, fusillades, viols. Quand ça tourne mal, les motards hors la loi font bloc parce que, de leur point de vue, ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes.
    En tant que flic de terrain, j’ai toujours considéré que mon boulot consistait à arrêter les gens, quels qu’ils soient et à quelque club qu’ils appartiennent, lorsque ce sont des salauds violents et qu’ils se livrent à des activités illégales. De mon point de vue, les bandes de motards hors la loi étaient la cible parfaite de l’ATF : armes, explosifs, drogue et violence… les clefs de voûte de nos attributions.
    Je crois aussi que ces bandes sont la seule forme proprement américaine de crime organisé à l’échelle internationale. Les mafias sont originaires d’Italie, de Russie ou du Japon. Les cartels de la drogue ont vu le jour en Amérique du Sud et dans le Sud-Est asiatique. Les gangs évoluent sur un territoire et existent dans tous les pays. Mais les bandes de motards se sont constituées ici dans les années 1940 et 1950, les Hells Angels occupant le devant de la scène, et on les rencontre maintenant sur tous les continents, dans la moitié des pays du monde. Les Hells Angels sont représentés dans vingt-six pays sur cinq continents – ils sont plus nombreux en Allemagne qu’aux États-Unis –, et tout a commencé à Oakland, Californie, sous l’impulsion visionnaire de Ralph « Sonny » Barger.
    C’est pour ces raisons que j’ai toujours estimé utile d’enquêter sur les bandes de motards.
    Et le 27 avril 2002, mes collègues, qui jusque-là n’en étaient pas convaincus, ont fini eux aussi par y croire.
     
    Le River Run n’était pas organisé en hommage à des délinquants incarcérés. Ce n’était qu’un gros rassemblement de motards dans une ville du Nevada où de nombreux casinos se côtoient. Il avait été créé en 1983. Il

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