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Noir Tango

Noir Tango

Titel: Noir Tango Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Régine Deforges
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désarroi
et leur chagrin les jetèrent dans les bras l’un de l’autre.
    Il était monté dans sa chambre, un bouquet
de fleurs à la main. Il avait trouvé la porte ouverte et Léa allongée sur le
lit, somnolant, vêtue seulement d’une combinaison de soie bleu pâle, les rideaux
à demi tirés sur la chaleur de midi. Bien que son aînée de quelques années, elle
eut un comportement enfantin, elle se recroquevilla comme un animal apeuré.
    —  Che, c’est moi Ernesto, n’ayez
pas peur… Vous ne devriez pas laisser votre porte ouverte.
    — Je sais, fit-elle d’une petite voix.
    Il la regardait, surpris, elle n’avait plus
rien à voir avec la jeune femme décidée et forte de leur rencontre, elle avait
l’air d’une petite fille apeurée et désemparée. Il se sentait maladroit, timide,
follement désireux de la réconforter. Il s’assit sur le lit, lui caressa
doucement les cheveux en lui disant des mots qu’elle ne comprenait pas mais
dont la musique était douce et apaisante. Elle se retourna et le regarda, les
yeux encore brillants de larmes mais un sourire aux lèvres.
    — Merci, Ernesto, vous me faites du
bien… Allongez-vous près de moi, tenez bien ma main… parlez-moi dans votre
langue… j’aime votre voix…
    Combien de temps restèrent-ils ainsi, comme
deux enfants sages ? Tout naturellement, leurs lèvres se cherchèrent… à
peine avaient-ils conscience du désir qui bouleversait leurs corps. Léa se
blottit contre lui, ses mains glissèrent…
    Comme à chaque fois qu’elle avait fait l’amour,
Léa se sentait renaître. Elle se pencha sur son jeune amant : qu’il était
beau, que ses lèvres étaient douces et ses mains malhabiles, tendres ! Elle
n’eut pas un remords en pensant à François Tavernier. Il y avait eu tant de
spontanéité, d’affection, de confiance dans leur étreinte ! L’acte
amoureux leur avait été consolateur.
    — J’ai faim, dit-elle, si nous
descendions déjeuner ?
    Au grill de l’hôtel,
on avait été heureux de revoir «  la linda francesa ». [66] Les deux jeunes gens avaient été
traités comme des hôtes de marque, malgré la tenue un peu débraillée d’Ernesto.
Léa aurait aimé se confier à lui, mais elle ne savait pas jusqu’à quel point il
était informé du rôle de Daniel. Carmen avait dit : « C’est un ami, mais
il ne s’intéresse pas à la politique, il est antipéroniste, ça s’arrête là. »
Elle lui parla de Montillac, disant que sa maison commençait à lui manquer, qu’ici,
la nature était bien monotone.
    — Monotone pour qui sait ne pas voir. Que
diriez-vous si vous étiez dans le désert lunaire de la Patagonie !
    — N’est-ce pas en Patagonie qu’il y a
des baleines ?
    — Oui, à Peninsula Valdés.
    — Mon père était fou des baleines
depuis qu’il en avait vu au Mexique. J’aimerais bien en voir.
    — Il faut aller à Puerto Piramides où
chaque année elles se rassemblent entre le mois de juillet et le mois de
décembre.
    — Il faudra m’y emmener.
    Léa lui était reconnaissante de cette
conversation anodine : on était loin de la peur, du chagrin, de la mort… Ils
se quittèrent en se disant : « À demain. »
    Cet intermède
amoureux avait remis Léa sur pied. Apaisée, elle pensait à Daniel avec une
tendre tristesse et se rappela les derniers mots du jeune homme pour son frère
Samuel. Elle se doutait bien que sa présence ne consolerait pas Samuel, mais au
moins pouvait-elle tenter de lui apporter un peu de réconfort. Dans le modeste
hôtel, non loin du « Plaza », où les deux frères étaient descendus, on
lui dit ne pas les avoir revus depuis quatre jours. Quatre jours ! déjà !
Elle se décida à appeler François. Ce fut Sarah qui répondit.
    — Te voici revenue sur terre ? lui
dit celle-ci.
    Léa fut surprise et peinée du ton de la voix.
    — Pourquoi me parles-tu comme cela ?…
J’étais anéantie, tu pouvais le comprendre ?…
    — Pardonne-moi, je comprends… Moi je
suis au-delà de l’anéantissement. Cependant j’ai ressenti douloureusement la
mort de Daniel, je ne pensais pas être capable de souffrir encore. Je croyais
avoir épuisé mes capacités de souffrance, il n’en était rien… Ils ont encore
réussi à me faire mal… ils ne m’avaient pas complètement tuée comme je le
croyais… Daniel, c’était mon double… maintenant je me retrouve plus seule que
jamais… Je vengerai sa mort comme j’aurai vengé sa vie… je

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