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Noir Tango

Noir Tango

Titel: Noir Tango Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Régine Deforges
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faudrait couper le courant. Tu n’as
pas remarqué où étaient les compteurs ?
    — Non… enfin… je ne sais pas. Près de l’office,
il y a un tableau avec plein d’interrupteurs.
    — Il faut tenter notre chance. Tu ne
comptes pas emporter cette valise ?… il n’y a pas de place, prends juste
un sac.
    — Voilà, il était déjà prêt.
    — Ça ira. Maintenant, montre-moi où est
l’office. Si j’arrive à éteindre ces satanées lumières, pas de panique, ne
bouge pas afin qu’ils ne se doutent de rien. Dans l’obscurité, je ramènerai
Daniel.
    Tout le monde
était à table quand ils entrèrent. La maîtresse de maison fit signe à François
Tavernier de venir s’asseoir auprès d’elle. Léa se retrouva entre Jaime et son
père qui avait Victoria Ocampo à sa droite.
    — Oh, François, pouvez-vous aller à l’avion,
j’ai oublié mon châle. Excusez-moi, cher ami, dit-elle en se tournant vers
Ortiz, je suis un peu grippée ces temps-ci.
    Tavernier sortit, courut à l’avion, prit le
châle, revint, toujours en courant, et se dirigea vers l’endroit indiqué par
Léa. Il écarta une tenture. C’était bien le tableau de commande de l’éclairage
de la maison et du jardin. Pas le temps de fignoler. Il sortit de sa poche son
briquet, vida le contenu, aspergea le tableau et la tenture et craqua une
allumette. Une flamme bleue jaillit, le rideau s’enflamma comme une torche, puis
le tableau.
    — Vas-tu sauter, nom de Dieu !
    Le ciel dut l’entendre, des étincelles
jaillirent, les lumières s’éteignirent dans le jardin puis dans la maison. François
se précipita au-dehors.
    Dans la salle à manger, on s’exclamait :
    — Encore une panne !
    — Déjà hier !
    — Ne vous inquiétez pas, mes amis, on
va allumer les lampes… Maria, José… voilà… C’est très romantique, n’est-ce pas ?
    — Vous avez souvent des pannes ? demanda
Victoria Ocampo.
    — Hélas oui, nous ne sommes pas aussi
bien équipés qu’à Buenos Aires, ou en France, n’est-ce pas mademoiselle Delmas ?
    Répondre… parler pour qu’il ne se doute de
rien.
    — Vous savez, en France, dans le
Bordelais, cela arrive tout le temps, surtout pendant les orages qui sont
là-bas très violents.
    — Je ne connais pas la région de
Bordeaux, par contre je connais son vin, excellent. Vous faites du vin dans
votre famille ?
    — Oui, il est bon, mais ce n’est pas un
très grand cru. J’espère que lors de votre prochain voyage en France vous me
ferez le plaisir de venir chez moi pour le déguster.
    — Merci, mademoiselle, je retiendrai
votre invitation. Jaime, tu vas voir ce que fait monsieur Tavernier, il a dû se
perdre dans l’obscurité.
    Le jeune homme sortit, Léa serra les poings
sous la table.
    —  Papá, papá hay un incendio ! [30]
    Tous se levèrent et se précipitèrent vers la
porte.
    De hautes flammes couraient le long des murs,
l’accès à l’office et aux cuisines était interdit. Un garde entra avec un seau
d’eau.
    — Patron, j’ai vu le feu, avec les
autres on organise une chaîne, il vaudrait mieux que les dames sortent.
    — Daniel… Daniel…
c’est moi, Tavernier !
    — Je suis là.
    — Ça va ?… Vous pouvez marcher
jusqu’à l’avion ?
    — Ça ira.
    Ils n’étaient plus très loin de l’appareil
quand les flammes sortirent de la maison.
    — C’est vous qui avez fait cela ?
    — Je n’avais pas le choix, montez…
    — Aie !…
    — Je suis désolé, mon vieux… Mettez
cette bâche sur vous… surtout ne bougez pas, cela peut être long.
    Tavernier prit un
seau des mains d’un domestique.
    — Ah, vous êtes là, merci de nous aider,
dit Jaime.
    — Comment l’incendie a-t-il pris ?
    — Je ne sais pas, on verra plus tard. Pour
l’instant il faut l’éteindre.
    Ce qui fut fait avec moins de difficultés qu’on
ne le craignait. L’office était détruit ainsi qu’une partie de la cuisine. Manuel
Ortiz examina les dégâts fumants.
    — Nous avons eu de la chance, cela
aurait pu être plus grave. Sans doute un court-circuit. J’en serai quitte pour
refaire une installation moderne. Mesdames, retournez à la salle à manger, ces
messieurs et moi allons nous nettoyer. Messieurs, merci pour votre aide. Monsieur
Tavernier, vous avez été particulièrement efficace, encore merci, dit Manuel
Ortiz en lui tendant la main.
    Le dîner, éclairé
par des lampes à pétrole, venait enfin de se terminer. Les hommes allèrent sur
la

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