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Nord et sud

Nord et sud

Titel: Nord et sud Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elizabeth Gaskell
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fut
Mr Hale qui poursuivit la conversation.
    — Tu n’as jamais beaucoup aimé les écoles, Margaret, sinon,
tu aurais déjà compris tout ce qu’on fait pour l’éducation à Milton.
    — En effet, dit-elle, soudain radoucie, je sais que je ne
m’intéresse pas assez aux écoles. Mais le savoir et l’ignorance dont je parlais
étaient sans rapport avec le fait de savoir lire et écrire, ou avec l’instruction
que l’on peut donner aux enfants. Je suis sûre qu’en l’occurrence il était question
de l’ignorance de cette sagesse qui est susceptible de guider les hommes et les
femmes. Je ne sais guère ce que cela veut dire. Mais lui – mon informateur – laissait
entendre que les patrons auraient souhaité que leurs ouvriers ne soient que de grands
enfants vivant dans le moment présent, et enclins à une obéissance aveugle.
    — Somme toute, Miss Hale, il est tout à fait évident
que votre informateur a trouvé une oreille complaisante, prête à croire toutes les
médisances qu’il a décidé de faire circuler sur le compte des patrons, dit
Mr Thornton d’un ton offensé.
    Margaret ne répondit pas. Elle était fâchée que Mr Thornton
ait donné une tournure personnelle aux propos qu’elle venait de tenir. Mr Hale
intervint :
    — Je dois avouer que, bien que je n’aie pas moi-même de
contacts aussi étroits que Margaret avec des ouvriers, je suis très frappé par l’antagonisme
entre eux et les patrons, tel que peut le percevoir un observateur extérieur. J’ai
même parfois eu ce sentiment en vous écoutant parler.
    Mr Thornton marqua une pause avant de reprendre la parole.
Margaret venait de quitter la pièce et il était contrarié par les sentiments qui
les opposaient. Mais ce petit désagrément tempéra son humeur, l’incita à la réflexion
et n’en donna que plus de dignité à sa réponse :
    — Ma théorie, c’est que mes intérêts sont les mêmes que
ceux de mes ouvriers et vice versa. Miss Hale, je le sais, n’aime pas entendre
appeler les ouvriers « main-d’œuvre », aussi éviterai-je d’utiliser ce
mot, bien qu’il me vienne naturellement aux lèvres comme un terme technique dont
l’origine, quelle qu’elle soit, remonte à avant mon époque. Un jour, dans mille
ans peut-être, et dans quelque royaume utopique, je peux imaginer que cette communauté
d’intérêts sera mise en pratique – au même titre qu’une république est, je suppose,
la forme de gouvernement la plus parfaite.
    — Nous étudierons la République de Platon dès que
nous aurons terminé Homère.
    — Ma foi, lorsque viendra l’année platonicienne [37] ,
peut-être serons-nous enfin tous prêts, hommes, femmes et enfants, à vivre en république.
Mais compte tenu de l’état actuel de notre morale et de notre intelligence, une
monarchie constitutionnelle est préférable. Dans notre tendre enfance, nous avons
besoin d’être gouvernés par un despote éclairé. Et de fait, longtemps encore, les
enfants et les jeunes gens se trouvent mieux d’être soumis aux lois inébranlables
d’une autorité ferme et discrète. Je suis d’accord avec Miss Hale dans la mesure
où je considère que nos ouvriers sont comme des enfants ; mais je nie que nous
autres patrons ayons une quelconque responsabilité dans cet état de fait, ni que
nous cherchions de quelque façon à le prolonger. Je maintiens que le despotisme
est la meilleure forme de gouvernement pour eux, si bien que pendant les heures
où je suis en contact avec eux, je suis fatalement un autocrate. J’agirai à ma guise
– sans obéir pour autant à des sentiments philanthropiques et autres sottises, qui
sévissent un peu trop dans le nord du pays – pour établir des règles justes et aboutir
à des décisions équitables dans la conduite de mes affaires – règles et décisions
qui vont d’abord dans le sens de mes intérêts, dans le sens des leurs ensuite. Mais
je refuse de devoir donner mes raisons, et une fois ma ligne de conduite annoncée,
je m’y tiendrai. Qu’ils arrêtent les machines ! J’en subirai les conséquences
avec eux : mais en dernier ressort, ils s’apercevront que je ne suis pas revenu
sur mes choix et que je n’ai pas varié d’un iota.
    A son retour dans la pièce, Margaret s’était assise à son ouvrage ;
mais elle garda le silence. Ce fut Mr Hale qui répondit :
    — Je parle sans doute sans savoir, mais d’après le peu que
j’ai appris, je dirais que les masses sont

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