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Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Titel: Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Reynaert
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entre 1660 et 1680. Vous êtes prêts ? L’École des femmes , Dom Juan , Le Misanthrope , L’Avare , Les Femmes savantes , Le Bourgeois gentilhomme , Le Malade imaginaire de Molière ; Andromaque , Britannicus , Bérénice , Phèdre de Racine ; Suréna , dernier sursaut du très vieux Corneille ; Les Maximes de La Rochefoucauld ; les Fables de La Fontaine (presque toutes) ; La Princesse de Clèves de Mme de Lafayette, et avec ça une des plus grandes des célèbres oraisons funèbres de Bossuet, celle qu’il prononça pour enterrer Henriette d’Angleterre, la première femme du frère du roi (« Madame se meurt, Madame est morte ! »). Quelle moisson ! En vingt ans seulement, on a déjà la moitié du programme du bac français pour les trois siècles à venir ! En deux décennies, autant de chefs-d’œuvre appelés depuis à faire bâiller d’ennui des générations d’élèves, et se pâmer d’admiration les mêmes parmi eux qui, devenus adultes, se décident un jour à les relire.
    Loin de nous l’idée de dénier leur génie à ces idoles de notre Panthéon. « Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue… » Quoi de plus beau que le vers racinien ? Quoi de plus savoureux que la verve de Molière, quoi de plus précis, de plus élégant que la langue de Boileau ? Combien de fois, encore, en écrivant ce livre, ne s’est-on répété le fameux adage de son Art poétique , formule souveraine pour tenter de coucher sur le papier une idée embrouillée dans l’esprit : « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement / Et les mots pour le dire arrivent aisément… »
    Les classiques furent célèbres de leur vivant et encensés dès leur mort. « Ce temps ne se retrouvera plus, où un duc de La Rochefoucauld, l’auteur des Maximes , au sortir de la conversation d’un Pascal et d’un Arnaud, allait au théâtre de Corneille », écrit Voltaire ému dans Le Siècle de Louis XIV après avoir cité Racine, Molière, Lully, Bossuet, témoignant au passage d’une maladie décidément éternelle : la nostalgie d’un âge d’or. Voltaire regrette le temps d’avant. Combien sont ceux qui, dès sa mort, regretteront son temps à lui ?

    « La chose la plus précieuse, ma gloire »
    Nous sommes néanmoins dans un livre d’histoire, et on ne saurait oublier une des lorgnettes qui est la nôtre : la politique. Voilà un point frappant où l’on veut arriver, car il est trop rarement mentionné en tant que tel. Tous ceux que l’on vient de citer étaient des génies, mais des génies qui ne travaillèrent que dans un sens, que vers un seul but, toujours le même, le renom du monarque. Ne faisons pas d’anachronisme. Le fait pour un artiste de se mettre au service d’un mécène n’est pas nouveau et n’a rien de très original : c’est le seul moyen de gagner sa vie, l’édition est misérable et le droit d’auteur n’existe pas. Par ailleurs, nous ne sommes pas en Corée du Nord, il ne s’agit pour personne d’avoir à ânonner des vers de pacotille devant un dictateur gâteux, en ayant dans le dos le revolver du chef de la police politique. À l’époque, le roi est tout, nul n’imagine une autre image de l’autorité. Chanter ses louanges paraît aussi naturel que de louer la patrie en 1914, ou de se dire le défenseur obstiné des libertés démocratiques aujourd’hui. Ne négligeons pas le fait pour autant, il nous offre une mise en perspective intéressante. Depuis Voltaire, dont nous parlions, ou bien plus tard Hugo ou Zola, nous nous sommes fait à l’idée qu’un penseur devait forcément penser contre le pouvoir. Il est bon de se souvenir que tous ceux qui précédèrent ont été, à son endroit, d’une déférence jamais prise en défaut.
    Il est vrai que le pouvoir y mettait les moyens. L’historien Alain Viala 1 nous explique le système de pensions que Colbert tint à élaborer dès son arrivée aux commandes, en s’appuyant sur Chapelain, un écrivain du temps oublié aujourd’hui mais très courtisé à l’époque : c’est lui qui tenait la liste de tous ceux qui auraient le bonheur de toucher de l’argent (pas énormément d’ailleurs) pour mettre leur grand talent au service de la haute renommée du prince. Pas grand monde ne manquera à l’appel et tous viendront se mettre en ligne chaque année, nous raconte l’historien, à la distribution du prix : une petite bourse en cuir brodé remise en présence même du souverain.
    Il

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