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Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Titel: Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Reynaert
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la République des Lettres , et écrira bien d’autres d’œuvres qui lui vaudront d’être autant haï et critiqué des catholiques que des protestants. Dans son cas, c’est bon signe.
    Citons enfin un nom bien moins connu encore, celui de Richard Simon (1638-1712). Ce prêtre commence sa carrière en défendant les Juifs de Metz d’une fausse accusation de meurtre d’enfant (un de ces prétendus « crimes rituels », dont on a parlé). Il s’attaque ensuite à l’œuvre de sa vie : l’étude critique de la Bible. Il n’agit pas en athée. Il est prêtre, croyant et respectueux, mais contrairement à l’immense majorité de ses contemporains, il ne prend pas le Livre pour la transcription d’une parole de Dieu droit tombée du ciel, mais pour un texte humain dont il faut étudier l’histoire, le contexte : quand tel texte a-t-il été écrit et par qui ? Pour son malheur, son ouvrage tombe par hasard sous les yeux de Bossuet. Dès les jours suivants, il est saisi, interdit, pilonné. Mettre ensemble les notions de « critique » et de Bible ! Pour l’aigle de Meaux, c’était trop. Le pauvre Simon abandonnera tout et finira sa vie retiré dans son prieuré normand. La voie qu’il a ouverte est énorme et n’a pas cessé d’être parcourue depuis, y compris par les plus éminents spécialistes de l’Église catholique elle-même, qui acceptent désormais très officiellement que l’on voie à l’œuvre dans la Bible des « genres littéraires ». En France, bien des écoles, bien des rues portent le nom de Bossuet, un styliste remarquable, un immense penseur et écrivain, nul n’en disconvient. Faut-il pour autant oublier celui de l’honorable Richard Simon, une des nombreuses victimes de son sectarisme ?
    1 La France de la monarchie absolue , op. cit.
    2 Nouvelle Histoire de la France moderne , t. 4, La Puissance et la guerre (1661-1715) , « Points », Le Seuil, 1997, une autre excellente synthèse de la période.
    3 France baroque, France classique , op. cit.

25
    Le Code noir
    C’est à ce prix que nous avons mangé
du sucre en Europe

    Les chaînes, le fouet, les marchés d’êtres humains, le travail harassant dans les champs de canne à sucre, et l’Afrique vidée de ses hommes par les méfaits du commerce le plus infâme. Selon l’expression du grand spécialiste de cette question, l’historien Olivier Pétré-Grenouilleau 1 , la traite négrière représente « la plus importante déportation d’êtres humains de tous les temps ». Selon un de ses confrères, Frédéric Régent, ce « commerce d’ébène », comme on l’appelait par euphémisme, pratiqué par de nombreux grands pays européens (Portugal, Pays-Bas, Danemark, France, Grande-Bretagne), a concerné du xvi e au xix e  siècle 11 à 12 millions d’hommes et de femmes, dont environ un sur dix sont morts pendant la traversée.
    Repères
    – 1674 : Compagnie du Sénégal, essor du commerce triangulaire
    – 1685 : promulgation du Code noir par Louis XIV
    – 1788 : création à Paris de la Société des amis des Noirs
    – 1794 : première abolition de l’esclavage par la I re République
    – 1802 : rétablissement de l’esclavage par Bonaparte
    – 1848 : abolition définitive
    Il y a plus incroyable encore que ces chiffres terribles : l’oubli dans lequel on a voulu les faire tomber pendant si longtemps. Jusque dans les années 1980, à quoi avions-nous droit, au mieux, dans les livres d’histoire à propos de l’esclavage ? À deux lignes pour en rappeler la fin officielle dans notre pays : le décret d’abolition, arraché par son courageux sous-secrétaire d’État aux Colonies Victor Schœlcher à la jeune république de 1848. Le geste est admirable, il valut à celui qui allait devenir député de la Martinique et de la Guadeloupe de dormir à jamais au Panthéon, honneur à lui. Ne soyons pas dupes pour autant de l’intérêt qu’avait la mémoire nationale à prendre les choses dans ce sens-là : parler de l’esclavage à propos de son abolition, cela posait la France comme elle aime à se regarder, généreuse, humaniste, toujours décidée à briser les chaînes de l’oppression. Belle manœuvre qui permettait d’effacer un peu vite une question plus navrante et pourtant évidente : si l’esclavage fut enfin aboli en 1848, c’est bien qu’il avait été autorisé, organisé, promu jusqu’à cette date incroyablement tardive, et il le fut pendant plus de

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