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Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Titel: Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Reynaert
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deux siècles dans l’indifférence de la majeure partie de la population et de ses élites.
    Tâchons donc de remettre les choses à leur place en les prenant à rebours. Abordons l’esclavage non par sa fin mais par un autre grand jalon qui marque son officialisation dans notre histoire : le Code noir. C’est aussi un texte de loi. Il nous raccroche à l’époque d’où nous sortons : il est de 1685 et fut signé par Louis XIV lui-même, comme tous les actes promulgués sous son règne, il est vrai. Pendant très longtemps, il est, lui aussi, tombé dans l’oubli. Sans doute nos lecteurs d’aujourd’hui ont-ils au moins entendu mentionné son nom. Il est réapparu sur notre scène nationale à la fin du xx e  siècle lors du grand débat mémoriel conduit entre autres par la députée de la Guyane Christiane Taubira pour aboutir à cette mesure de justice : faire reconnaître l’esclavage pour ce qu’il est, un crime contre l’humanité.
    Le Code noir, quand on le lit, est un texte assez étonnant. Il vise à régenter la vie des esclaves dans les colonies d’outre-mer qui en possèdent et commence par régler d’autres obsessions de
l’époque. Dès ses premiers articles, il ordonne par exemple l’expulsion des Juifs des Antilles et insiste ensuite sur l’interdiction faite aux protestants de participer à ce commerce d’humains : il serait trop navrant que ces réprouvés soient tentés de convertir les « Nègres » à leur hérésie. Pour autant, au milieu d’un amoncellement de dispositions qui nous semblent complexes, il sait montrer sa vraie nature. Retenons l’article 44, il résume la philosophie de l’ensemble. C’est donc Louis XIV lui-même qui parle. Écoutons sa parole très officielle, en 1685 : « Déclarons les esclaves être [des] meubles. »
    Ainsi fut aussi le Grand Siècle, tutoyant le sublime dans les vers de Racine, portant au plus haut le raffinement et la civilisation sous les ors de Versailles, et capable, dans le même temps, de mettre des êtres humains au niveau des fauteuils.

    La traite des Noirs
    La Traite, comme on l’appelle, n’est pas spécifique à la France. Elle concerne bien d’autres pays d’Europe que l’on a cités, et elle est liée à toute l’histoire de la colonisation du Nouveau Monde. On la fait parfois remonter à l’initiative malheureuse de Bartolomeo de Las Casas. On a parlé déjà de ce dominicain espagnol, bienfaiteur des Indiens au xvi e , protagoniste de la célèbre controverse de Valladolid. Pour protéger ses chers « indigènes », il aurait eu l’idée de proposer qu’on fasse faire les travaux qui les tuaient peu à peu par des Africains, dont les Portugais faisaient déjà commerce depuis un siècle ou deux. Ce serait donc au nom de l’humanité de ceux-ci que l’on a déshumanisé ceux-là. Ce n’est ni la première ni la dernière fois que l’on rencontrera ce paradoxe dans l’histoire. On dit que Las Casas s’est repenti de cette erreur funeste avant de mourir. Peu importe. L’idée n’était pas si originale, un autre que lui l’aurait eue forcément. Tout le contexte, mental et surtout économique, poussait à sa mise en place.
    Les Indiens étaient peu adaptés aux nouvelles sources de profit qui se répandaient aux Amériques, la canne à sucre, ou bientôt, dans les colonies anglaises, le coton. Un temps on fit appel à des Blancs misérables, les engagés , qui, en échange du prix de la traversée, devaient aux propriétaires des années de travail harassant et s’y soumettaient avec l’espoir de s’établir librement ensuite. Rares sont ceux qui y arrivaient. Rapidement, ils sont remplacés par ces Noirs qui présentent, aux yeux des colons, de grands avantages : on les trouve robustes, on les juge mieux capables de résister au soleil et, surtout, en exacerbant le traumatisme de la transplantation – non seulement on exile des individus dans ces pays lointains qu’ils ne connaissent pas mais on prend soin aussi de séparer les familles, d’isoler les gens de leurs proches, d’empêcher tout lien d’amitié, etc. –, on réussit à les briser plus facilement pour les réduire à l’idéal de ce que l’on veut en faire : des bêtes de somme.
    Dès le xvi e  siècle se met en place un système appelé le « commerce triangulaire », parce qu’il se joue en trois temps. Les bateaux partent de Lisbonne, de Liverpool, de Nantes, de Bordeaux. Chargés de leur monnaie

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