Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises
de se faire connaître. Vergniaud, cité plus haut, a été, nous disent les historiens, un des meilleurs orateurs de son temps et un des plus talentueux politiques. N’eût-il été victime de la guillotine – le 31 octobre 1793 avec 21 de ses pairs –, il aurait sans doute pu le prouver plus longuement.
Il ne s’agit pas pour autant de réécrire l’histoire. Les Girondins auraient-ils fait mieux que leurs ennemis s’ils l’avaient emporté ? Nul ne le saura jamais. Ils se targuaient de faire plus de cas des libertés publiques que leurs rivaux, ils aimaient la modération. La modération était-elle de mise en juin-juillet 1793, au moment où la Montagne, et Robespierre, le chef qui s’y impose, prennent le pouvoir ? Les circonstances alors sont terribles. Pour les partisans de l’Incorruptible, elles seules expliquent le système dictatorial qui se met en place.
Guerre extérieure, guerre intérieure
C’est indéniable, à partir du printemps de 1793 les circonstances – c’est-à-dire le contexte intérieur et international – sont terribles. Pour en mesurer l’importance, il faut faire un retour en arrière de six mois et revenir au 21 janvier, jour de l’exécution de Louis XVI. Un grand symbole. De lourdes conséquences. Depuis des semaines, l’Angleterre était inquiète de voir les armées françaises progresser en Belgique et menacer le port d’Anvers, essentiel à son commerce. Le sacrilège commis sur la personne du souverain a été un bon prétexte : elle se lance dans une guerre contre la France. L’Espagne suit. L’Autriche et la Prusse étaient déjà dans la danse. Au total, cela fait presque un continent entier contre un seul pays, et encore, un pays bien divisé.
La République a besoin de soldats, elle en ordonne partout la levée. Parfois, les paysans refusent. C’est le cas dans l’Ouest. Au printemps 1793, à Machecoul, des villageois massacrent les recruteurs. Les républicains engagent des représailles pour châtier cet affront. Bientôt les prêtres, quelques nobles, et les nostalgiques du temps des rois s’en mêlent. L’engrenage infernal est lancé. C’est le début d’un horrible conflit intérieur qui s’ajoute à celui qui se mène aux frontières : la guerre de Vendée.
Après juin et l’élimination des Girondins, parce qu’elles sont indignées par le coup d’État de la Commune et l’arrestation de leurs députés, d’autres provinces, d’autres villes, Lyon, Marseille, se soulèvent à leur tour. Partie de Normandie, une petite armée progirondine marche sur Paris. Elle est arrêtée de justesse en juillet à Pacy-sur-Eure. C’est un fait : à l’été 1793, vue du Comité de salut public, la situation est dramatique.
La Terreur
Est-ce pour autant qu’il faut refuser de voir la nature du système que Robespierre et ses amis mettent en place à ce moment-là ? Son nom seul fait frémir : la Terreur. Il n’a pas été donné a posteriori par ses détracteurs, il est revendiqué par ceux-là mêmes qui l’ont promu. Le 5 septembre 1793, Barrère, un des membres les plus influents du Comité de salut public, a fait passer un décret à la Convention qui déclare « la terreur à l’ordre du jour ». Le principe en est simple : la Révolution doit être impitoyable avec ceux qui la menacent. Il faut régner par la crainte. « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté », a résumé Saint-Just dans une de ces formules dont l’énoncé seul montre l’absurdité et la limite. Le mode opératoire est à la hauteur de l’enjeu. Dès le 17 septembre, une « loi des suspects » permet d’envoyer à peu près n’importe qui devant le tribunal révolutionnaire subir les réquisitoires du redoutable procureur Fouquier-Tinville. Il suffit de s’être montré « partisan de la tyrannie, du fédéralisme ou ennemi de la liberté ». Cela fera du monde. Les estimations font état de 17 000 personnes guillotinées après procès – plus de 500 000 furent arrêtées.
Il faut ajouter à cette sinistre cohorte les victimes des innombrables exactions commises partout dans le pays par quelques-uns des « représentants en mission » de la République, qui en sont la honte. Citons Fouché ou Collot d’Herbois, envoyés pour réduire l’insurrection de Lyon, qui y firent des milliers de morts à la mitraille, parce qu’ils estimaient que la guillotine était « trop lente ». N’oublions pas le martyre de
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