Odyssée
Argiens de nos conseils, afin qu'ils ne périssent point tous par ta colère.
Et Zeus qui amasse les nuées lui répondit :
- Certes, au retour d'…ôs, tu pourras voir, vénérable Hèrè aux yeux de boeuf, le tout-puissant Kroniôn mieux détruire encore l'armée innombrable des Argiens ; car le brave Hektôr ne cessera point de combattre, que le rapide Pèléiôn ne se soit levé auprès des nefs, le jour o˘ les Akhaiens combattront sous leurs poupes, luttant dans un étroit espace sur le cadavre de Patroklos. Ceci est fatal. Je me soucie peu de ta colère, quand même tu irais aux dernières limites de la terre et de la mer, o˘ sont couchés Iapétos et Kronos, loin des vents et de la lumière de Hélios, fils de Hypériôn, dans l'enceinte du creux Tartaros. quand même tu irais là, je me soucie peu de ta colère, car rien n'est plus impudent que toi.
Il parla ainsi, et Hèrè aux bras blancs ne répondit rien. Et la brillante lumière Hélienne tomba dans l'Okéanos, laissant la noire nuit sur la terre nourricière. La lumière disparut contre le gré des Troiens, mais la noire nuit fut la bienvenue des Akhaiens qui la désiraient ardemment.
Et l'illustre Hektôr réunit l'agora des Troiens, les ayant conduits loin des nefs, sur les bords du fleuve tourbillonnant, en un lieu o˘ il n'y avait point de cadavres. Et ils descendirent de leurs chevaux pour écouter les paroles de Hektôr cher à Zeus. Et il tenait à la main une pique de onze coudées, à la brillante pointe d'airain retenue par un anneau d'or. Et, appuyé sur cette pique, il dit aux Troiens ces paroles ailées :
- …coutez-moi, Troiens, Dardaniens et Alliés. J'espérais ne retourner dans Ilios battue des vents qu'après avoir détruit les nefs et tous les Akhaiens ; mais les ténèbres sont venues qui ont sauvé les Argieng et les nefs sur le rivage de la mer. C'est pourquoi, obéissons à la nuit noire, et préparons le repas. Dételez les chevaux aux belles crinières et donnez-leur de la nourriture. Amenez promptement de la Ville des boeufs et de grasses brebis, et apportez un doux vin de vos demeures, et amassez beaucoup de bois, afin que, toute la nuit, jusqu'au retour d'…ôs qui naît le matin, nous allumions beaucoup de feux dont l'éclat s'élève dans l'Ouranos, et afin que les Akhaiens chevelus ne profitent pas de la nuit pour fuir sur le vaste dos de la mer. qu'ils ne montent point tranquillement du moins sur leurs nefs, et que chacun d'eux, en montant sur sa nef, emporte dans son pays une blessure faite par nos piques et nos lances aiguÎs ! que tout autre redoute désormais d'apporter la guerre lamentable aux Troiens dompteurs de chevaux. que les hérauts chers à Zeus appellent, par la Ville, les jeunes enfants et les vieillards aux tempes blanches à se réunir sur les tours élevées par les Dieux ; et que les femmes timides, chacune dans sa demeure, allument de grands feux, afin qu'on veille avec vigilance, de peur qu'on entre par surprise dans la Ville, en l'absence des hommes. qu'il soit fait comme je le dis, magnanimes Troiens, car mes paroles sont salutaires. Dès le retour d'…ôs je parlerai encore aux Troiens dompteurs de chevaux. Je me vante, ayant supplié Zeus et les autres Dieux, de chasser bientôt d'ici ces chiens que les Kères ont amenés sur les nefs noires.
Veillons sur nous-mêmes pendant la nuit ; mais, dès la première heure du matin, couvrons-nous de nos armes et poussons l'impétueux Arès sur les nefs creuses. Je saurai si le brave Diomèdès Tydéide me repoussera loin des nefs jusqu'aux murailles, ou si, le perçant de l'airain, j'emporterai ses dépouilles sanglantes. Demain, il pourra se glorifier de sa force, s'il résiste à ma pique ; mais j'espère plutôt que, demain, quand Hélios se lèvera, il tombera des premiers, tout sanglant, au milieu d'une foule de ses compagnons. Et pl˚t aux Dieux que je fusse immortel et toujours jeune, et honoré comme Athènè et Apollôn, autant qu'il est certain que ce jour sera funeste aux Argiens !
Hektôr parla ainsi, et les Troiens poussèrent des acclamations. Et ils détachèrent du joug les chevaux mouillés de sueur, et ils les lièrent avec des lanières auprès des chars ; et ils amenèrent promptement de la Ville des boeufs et des brebis grasses ; et ils apportèrent un doux vin et du pain de leurs demeures, et ils amassèrent beaucoup de bois. Puis, ils sacrifièrent de complètes hécatombes aux Immortels, et le vent en portait la fumée
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