Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome I.
êtes persuadé que je n'oublierai rien de ce qui pourra vous être agréable, me mériter votre estime, et vous convaincre des sentimens de considération, etc.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Roverbello, le 16 prairial an 4 (4 juin 1796).
Au ministre de la république à Venise.
Le sénat m'a envoyé deux sages du conseil ; il est nécessaire que vous lui témoigniez le mécontentement de la république de ce que Peschiera a été livrée aux Autrichiens. Le sang français a coulé pour la reprendre. Il ne faut pas cependant nous brouiller avec une république dont l'alliance nous est utile.
J'ai parlé aux sages de la cocarde nationale ; je crois que vous devez fortement tenir pour que les Français la portent, et que l'injure qui a été faite soit réparée.
Tenez-moi instruit de tout en détail. Je pars à l'instant pour Milan, adressez-moi là vos nouvelles ; ne me laissez pas ignorer ce que fait Beaulieu et le mouvement des troupes en Bavière.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Milan, le 19 prairial an 4 (7 juin 1796).
Au directoire exécutif.
Par l'armistice conclu entre les deux armées française et napolitaine, nous obtenons les résultats suivans : 1°. Nous ôtons deux mille quatre cents hommes de cavalerie à l'armée autrichienne, et nous les plaçons dans un lieu où ils sont à notre disposition. 2°. Nous ôtons aux Anglais cinq vaisseaux de guerre et plusieurs frégates. 3°. Nous continuons à mettre les coalitions en déroute.
Si vous faites la paix avec Naples, la suspension aura été utile, en ce qu'elle aura affaibli de suite l'armée allemande. Si, au contraire, vous ne faites pas la paix avec Naples, la suspension aura encore été utile, en ce qu'elle me mettra à même de prendre prisonniers les deux mille quatre cents hommes de cavalerie napolitaine, et que le roi de Naples aura fait une démarche qui n'aura pas plu à la coalition. Cela me porte à traiter la question militaire : pouvons-nous et devons-nous aller à Naples ?
Le siège du château de Milan, la garde du Milanais et la garnison des places conquises, demandent quinze mille hommes.
La garde de l'Adige et des positions du Tyrol, vingt mille hommes.
Il ne reste, compris les secours qui arrivent de l'armée des Alpes, que six mille hommes.
Mais, eussions-nous vingt mille hommes, il ne nous conviendrait pas de faire vingt-cinq jours de marche, dans les mois de juillet et d'août, pour chercher la maladie et la mort. Pendant ce temps-là, Beaulieu repose son armée dans le Tyrol, la recrute, la renforce de secours qui lui arrivent tous les jours, et nous reprendra dans l'automne ce que nous lui avons pris dans le printemps.
Moyennant cet armistice avec Naples, nous sommes à même de dicter à Rome toutes les conditions qu'il nous plaira ; déjà, dans ce moment-ci, la cour de Rome est occupée à faire une bulle contre ceux qui prêchent en France la guerre civile, sous prétexte de religion.
Par la conversation que j'ai eue ce matin avec M. Azara, ministre d'Espagne, envoyé par le pape, il m'a paru qu'il avait ordre de nous offrir des contributions. Je serai bientôt à Bologne. Voulez-vous que j'accepte alors, pour accorder un armistice au pape, vingt-cinq millions de contributions en argent, cinq millions en denrées, trois cents cadres, des statues et des manuscrits en proportion, et que je fasse mettre en liberté tous les patriotes arrêtés pour faits de la révolution ? J'aurai au reste le temps de recevoir vos ordres là-dessus, puisque je ne crois pas être à Bologne avant dix ou quinze jours. Alors, si les six mille hommes que commande le général Châteauneuf-Randon arrivent, il n'y aura pas d'inconvénient de se porter de Bologne jusqu'à Rome. Au reste, je vous prie de rester persuadé que lorsqu'une fois vous m'avez fait connaître positivement vos intentions, il faudrait qu'elles fussent bien difficiles, pour que je ne puisse pas les exécuter.
BONAPARTE.
Au directoire exécutif.
Lorsque M. Beaulieu sut que nous marchions pour passer le Mincio, il s'empara de la forteresse de Peschiera, qui appartient aux Vénitiens. Cette forteresse, située sur le lac de Garda, à la naissance du Mincio, a une enceinte bastionnée en très-bon état, et quatre-vingt pièces de canon, qui, à la vérité, n'étaient pas montées.
M. le provéditeur général, qui était à Vérone avec deux mille hommes, aurait donc bien pu faire en sorte que cette place ne fût pas occupée par les Autrichiens, qui y
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