Opération Mincemeat : L'histoire d'espionnage qui changea le cours de la Seconde Guerre mondiale

de
détruire immédiatement tout ce qui s’opposait à la division. Le Führer a
ordonné que toutes les forces soient immédiatement opérationnelles pour
empêcher l’ennemi de prendre pied ». Les chars allemands ne parvinrent pas
à faire de percée. Quarante-trois furent détruits dans un combat amer et
sanglant. Le commandant de la division Goering le concéda : « La
contre-attaque contre les débarquements hostiles a échoué. » Les tanks
allemands se dirigèrent vers le Nord pour continuer à se battre sur le
continent. Le général Patton, paradant sur le champ de bataille dans sa jeep,
surnomma l’invasion « la plus courte Blitzkrieg de l’histoire ».
Montgomery fut d’accord avec lui sur ce point au moins. « L’Allemand en
Sicile est condamné. Définitivement condamné. Il ne s’en tirera pas. »
    La conquête de l’île ne faisait que commencer, d’autres
combats plus féroces allaient venir, mais le Jour J était terminé et gagné
en Sicile.

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Hameçon, ligne et plomb
    Une acclamation s’éleva dans la salle 13 quand arriva
la nouvelle du succès du débarquement en Sicile. Cholmondeley exécuta un pas de
danse et un étrange hululement. « Tante » Joan Saunders s’essuya les
yeux.
    La tension de l’attente avait été presque insupportable.
Quand le succès de l’opération Mincemeat devint irréfutable, Montagu commença à
craindre en privé que le rôle qu’il jouait dans la guerre ne prenne fin.
« Même si j’ai été à l’origine de quelque chose de très important et qui
en valait la peine… je n’aurai plus jamais l’occasion de refaire ce genre de
chose. » La pression avait creusé les traits des organisateurs qui, selon
Montagu, « étaient trop tendus pour lire un livre ou pour trouver le
sommeil ».
    Avec le recul, Montagu se souvient du grand soulagement
éprouvé tandis que les Alliés déferlaient sur la Sicile. « Il est
impossible de décrire la joie et la satisfaction ressenties en apprenant que
l’équipe avait sauvé la vie de centaines de soldats alliés lors du débarquement.
Ce sentiment se mêle au plaisir d’avoir réussi à faire ce que nous avons fait
alors que tant de nos supérieurs avaient affirmé que nous en étions
incapables – et j’ai toujours pensé que Churchill envisageait que ça
valait uniquement la peine d’être tenté en dernier recours. » Montagu a
aussi été particulièrement content d’apprendre que Hitler lui-même s’était
laissé avoir par les faux documents : « Joie suprême pour tout le
monde et plus particulièrement pour un Juif, satisfaction de savoir qu’ils
avaient directement et spécifiquement trompé ce monstre. »
    La désinformation avait réussi au-delà de toute attente et
Montagu jubilait : « Nous avons trompé les Espagnols qui aidaient les
Allemands, nous avons trompé les services de renseignement allemands à la fois
en Espagne et à Berlin, nous avons trompé l’état-major et le commandement
suprême allemand, nous avons trompé Keitel et, enfin, nous avons trompé Hitler
en personne et il est resté dupe jusqu’à la fin du mois de juillet. »
L’opération était aussi gratifiante économiquement : « Un tube
métallique fabriqué sur mesure, un uniforme militaire, de la glace sèche, le
temps de quelques officiers, un trajet en fourgon jusqu’en Écosse et son
retour, une centaine de kilomètres ajoutés à la traversée du HMS Seraph et quelques dépenses diverses : environ 200 livres au maximum. »
Il n’y eut pas de grande fête donnée pour le succès de l’opération Mincemeat,
pas de soirée au club de la Gargouille avec Montagu et Jean Leslie
jouant le rôle de Bill Martin et de sa tendre Pam. La femme de Montagu, Iris,
peut-être motivée par les allusions de sa belle-mère, avait annoncé qu’elle
rentrait d’Amérique avec leurs enfants. Montagu savait que Hitler prévoyait
toujours de lancer des bombes volantes sans pilote sur Londres et que la
capitale restait très peu sûre. Mais comme les informations étaient de source
Ultra, il ne pouvait pas en parler à Iris. « Je ne pouvais que faire
allusion à la dernière folie de Hitler. Mais cela ne lui fit aucun
effet. » Ce n’était probablement pas la folie de Hitler qui l’inquiétait.
Iris et les enfants rentrèrent à Londres pendant le débarquement en Sicile. Les
retrouvailles furent joyeuses. La photographie de Pam en maillot de bain, avec
sa dédicace amoureuse, fut retirée