Opération Mincemeat : L'histoire d'espionnage qui changea le cours de la Seconde Guerre mondiale
et
détermination, qualités rarement associées, pouvait espérer y parvenir. »
Les qualités qui avaient tant servi à Cholmondeley quand il était officier du
renseignement pendant la guerre furent mises à profit dans la guerre contre la
sauterelle. Pendant des mois, sans discontinuer, il disparaissait dans le
désert, déguisé en Bédouin. Au Yémen, il visita des villages si éloignés que
lorsqu’il y arrivait, les femmes l’accueillaient en lui proposant de la paille
pour nourrir sa Jeep. D’Arabie, il passa, en 1949, au Conseil international pour
le contrôle de la sauterelle rouge en Rhodésie. Cholmondeley appréciait tout
particulièrement de tuer des sauterelles (« ce sont des insectes
détestables »). De même, il continuait à travailler pour les services
secrets britanniques, se servant de sa couverture d’officier dans la guerre
contre les sauterelles pour son travail plus clandestin, même si l’on n’en sait
pas plus sur sa teneur.
Cholmondeley fut nommé MBE en 1948, et deux ans plus tard,
il rempila auprès de la RAF pour une mission de cinq ans pour des « tâches
dans le renseignement ». En décembre de la même année, il était en
Malaisie, se servant de sa « vaste expérience de la désinformation »
pour embobiner avec le MI5 et la Branche Spéciale un ennemi assez
différent : les guérilleros de l’Armée de libération nationale de
Malaisie.
Charles Cholmondeley quitta le MI5 en 1952. Il s’installa
dans le Sud-Ouest de l’Angleterre, se maria et ouvrit un commerce de machines
horticoles. Il considéra le serment de secret qu’il avait prêté en entrant au
MI5 comme sacré, et ne le brisa jamais. D’après sa femme, Alison, « Il ne
donnait d’informations à quiconque n’avait “pas besoin de savoir”. J’ai été
furieuse de constater que cela m’incluait. » Il aimait toujours tirer avec
une arme de poing, même si sa mauvaise vue rendait l’exercice extrêmement
périlleux, sauf pour les oiseaux. « Il prenait un revolver quand nous
allions à la chasse à la perdrix, se souvient son ami John Otter. Je ne l’ai
jamais vu en toucher une. » Personne dans la ville de Wells, dans le Somerset,
n’imaginait que ce gentleman courtois, grand et myope, qui vendait des
tondeuses à gazon, avait autrefois été l’officier des services secrets à qui
l’on devait le plan de désinformation le plus audacieux de la guerre. Quand
l’histoire de l’opération finit par sortir au grand jour, il refusa d’être
identifié ou d’accepter une quelconque reconnaissance publique. Cholmondeley
mourut en juin 1982. Il a toujours refusé d’être reconnu et encore moins
célébré. Même sa pierre tombale est discrète, portant simplement les initiales
« CCC ». Un éloge funèbre envoyé au Times par Ewen Montagu
attira l’attention sur son « travail inestimable pendant la guerre… un
travail qui, à cause des circonstances et de sa modestie naturelle, n’est pas
reconnu à sa juste valeur ». Comme le fit remarquer Montagu :
« Nombreux parmi ceux qui débarquèrent en Sicile doivent la vie à Charles
Cholmondeley. »
Ewen Montagu fut nommé OBE pour son rôle dans l’opération
Mincemeat. Il retourna au droit, comme il en avait toujours eu l’intention et,
en 1945, il fut nommé juge avocat de la flotte, responsable de l’administration
du système de la cour martiale dans la Royal Navy. Il occupa ce poste pendant
les dix-huit années suivantes, tout en étant juge dans le Hampshire et le
Middlesex, et greffier, successivement, de Devizes et de Southampton. Montagu
eut une double vie : à côté du juge et du pilier de la société
anglo-juive, il y avait un autre Ewen Montagu : le brillant officier du
renseignement qui avait toujours une histoire extraordinaire à raconter.
En tant que juge, Montagu se montra scrupuleusement juste,
merveilleusement grossier et souvent mêlé à une controverse. La presse le
surnomma « le turbulent juge ». En 1957, il fit remarquer au
tribunal, pendant le jugement d’un marin de la marine marchande, que « la
moitié de la racaille d’Angleterre s’engage dans la marine marchande pour
échapper au service militaire ». Il présenta ses excuses. Quatre ans plus
tard, il déclara face au public du Rotary : « Un jeune garnement se
verrait baisser le pantalon et administrer une fessée par une femme policier
armée d’une brosse à cheveux. » Il s’excusa de nouveau. Quand les
plaidoiries
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