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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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aimait toujours son Guise) et
que menait à la main le vieux cardinal de Bourbon, trompé, ou feignant de
l’être, par la dépêche de Rome fabriquée par la Médicis.
    Marguerite de
France était vêtue d’une robe de velours violet enrichie de fleurs de lys
brodées à fil d’or, les épaules succombant sous le poids d’un magnifique
manteau de velours dont la traînante queue longue de quatre aunes était
soulevée par trois Princesses ; sur le chef, une couronne impériale
étincelante de perles, de diamants et de rubis, lesquelles précieuses pierres
parsemaient aussi la petite corsette d’hermine qu’elle portait par-dessus sa
robe et qui devait fort ajouter à la touffeur du jour, comme je m’apensai en
lui voyant la sueur couler sur les joues tandis qu’elle restait immobile en son
triomphe, fort applaudie par le populaire et cependant, l’air maussade et chagrin
comme pour signifier urbi et orbi que ce mariage la ragoûtait peu. À
telle enseigne que le pauvre cardinal de Bourbon, pour la faire mouvoir plus
outre, dut lui prendre la main et quasiment la traîner derrière lui comme une
Iphigénie qu’on eût conduite au supplice. Voyant quoi, la plèbe croyant que
Margot se rebéquait à marier un hérétique, et voyant du zèle là où il n’y avait
que physique répugnance, redoubla ses vivats, tout ensemble s’atendrézant sur
la triste fortune de la Princesse et admirant ses magnifiques atours.
    Non qu’elle
fût, à parler à langue déclose, tant belle que la décrivit Brantôme, célébrant
en elle à cette occasion la merveille du ciel sur terre. Comme on sait,
pour notre bon voisin périgordin Brantôme, toute femme est unique et non
pareille, pour peu qu’elle soit de sang royal. Je trouvais la Princesse
plaisante à voir, le visage rond, l’œil grand, mais à fleur de tête comme sa
mère, la lippe boudeuse assez, et n’eussent été le pimplochement, les attifures
et les perles, je n’eusse aimé en elle que l’extrême appétit à vivre qui
émanait de son regard si vif et si parlant, lequel lui donnait ce genre de
beauté qu’on appelle du diable, et à mon sens, fort proprement, comme bien la
suite le montra.
    — Voyez
comme Charles s’ennuie ! me glissa Quéribus à l’oreille. Je gage qu’il se
voudrait à mille lieues de là ! À la chasse, à la paume, à sa forge, à
sonner dans ses trompettes, à courir les rues la nuit avec le bâtard
d’Angoulême et Guise, et à faire mille farces et momeries aux passants.
    — Quoi ?
Fait-il cela ? dis-je, sotto voce.
    — Il fait
pis, souffla Quéribus, tant il est infantin. Le Duc d’Anjou, l’allant voir en
ses appartements, le vit à quatre pattes, une selle accrochée sur le dos, et
hennissant comme un cheval.
    À quoi je ris.
    — Monsieur
mon frère, dit Dame Gertrude du Luc en me toquant la main de son éventail, vous
avez des secrets avec le Baron.
    — Vous
touchant, mamie, lui dis-je à l’oreille. Il me dit qu’il vous trouve fort
belle.
    — Ha !
dit Gertrude à voix haute en s’éventant et se penchant pour l’aguigner, que ne
s’est-il assis alors à mon côté ?
    — Mais
j’en serais dans le ravissement ! dit Quéribus, et promptement se levant,
il changea de place avec moi, ce qui fait que j’eus Zara à ma senestre, et à ma
dextre Quéribus, lequel avait appétit à rester près de moi, pour ne point
discontinuer à m’entretenir de ses propos gaussants, ayant, en bon muguet, la
langue fort émoulue.
    Cependant le
Roi qui, combien qu’il fût habillé en soleil, avait, dans le fait, un air fort
éteint, dit d’une voix rogue en tournant la tête :
    — Or
çà ! Poursuivons sans tant languir ! Où est Navarre ?
    On vit alors
s’avancer Henri de Navarre en même temps que le Duc d’Anjou, lequel le tenait
par la main, et pour ainsi dire, le menait à sa sœur pour la lui donner en
mariage.
    La vue du Roi
de Navarre hérissa tant le poil du populaire qu’on entendit comme un
grondement, lequel, toutefois, rentra dans les gorges, quand on vit qui le
flanquait, le Duc d’Anjou venant immédiatement après le Duc de Guise dans la
faveur des Parisiens, pour ce qu’il avait vaincu les huguenots à Jarnac et à
Moncontour. Tant est qu’à la fin du fin, ne sachant plus s’il devait huer
Navarre ou acclamer le Duc, le peuple s’accoisa, fort interdit que le Duc
lui-même jetât sa tendre sœur en pâture à un suppôt du Diable.
    J’eus tout le
loisir d’envisager ledit

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