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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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caressa à bon
poil. C’est par l’étude et le labour que j’ai à bonne issue façonné les
meilleurs esteufs de la chrétienté, et fait de mon jeu de paume l’excelse en
Paris, et celui que nos Princes affectionnent.
    Disant cela, à
peu que le bon homme ne se gonflât comme un pois chiche qui a trempé huit jours.
Cependant, tout vain glorieux qu’il fût, je l’aimais assez, estimant plus ses
pareils et le zèle industrieux qu’ils mettent à leurs affaires que ces muguets
qui ne s’emploient qu’à dépenser à la Cour en vaines super-fluités les pécunes
qu’on a suées pour eux dans leurs lointaines châtellenies.
    Par surcroît,
je ne laissais pas d’apercevoir que de m’avoir obligé le faisait se plaire à
moi davantage, et sans me croire tant fin et cauteleux que lui, je voulus tâter
son pouls pour savoir ce qu’il en était de cette fièvre parisienne que je
sentais monter à l’alentour.
    — Ha !
Maître Delay ! dis-je à voix étouffée, éclairez-moi d’un doute !
Est-ce le seul Roi de Paris qui a fait ce que nous savons ?
    — Il ne
l’eût osé seul, dit Delay jetant un œil autour de lui – bravant la Cour et
le Roi. De plus grands que lui, sinon Charles, y ont eu la main. Et il ne faut
pas compter que ceux-là défassent ce qu’ils ont fait. S’il le faut, ils iront
plus outre.
    — Mais le
Roi, dis-je, m’apparut au jeu de paume fort courroucé à ouïr l’attentement.
    — Il est
courroucé ce jour d’hui, dit Delay qui, après avoir balancé un petit, me prit
le bras et me parlant de bouche à oreille, ajouta : Le toton que
l’enfantelet fait tourner sur soi de senestre à dextre se peut tout aussi bien
tourner à rebours au gré d’une autre main. Monsieur de Siorac, départez-vous ce
jour en vos provinces ?
    — Hélas !
Je ne peux. Ambroise Paré m’a commis à l’aider pour la curation du patient.
    — Voilà
qui est fâcheux, dit Delay en me jetant de côté un bref, mais signifiant
regard. J’augure mal du livre après avoir lu la préface.
    Sur quoi, en
ayant dit assez, ou plus peut-être qu’il n’aurait voulu ou le jugeât prudent,
il prit congé de moi, non sans que je lui fisse encore de grands merciements
d’avoir été l’ouvrier de ma grâce. Compliment que, changeant tout à plein de
mine, il écouta d’un air froidureux, comme pour me faire entendre que les
choses prenant la tournure qu’il avait prédite, il n’irait pas plus avant dans
ses bons offices.
    Nous fûmes
dîner, Miroul et moi, rue de la Truanderie à la repue de Guillaume Gautier, et
nous y encontrâmes Giacomi, lequel nous attendait depuis une grosse heure sans
rien gloutir tant il se faisait un tabustant souci. À me revoir, il rougit de
joie et m’embrassa comme fol, me faisant cent questions à quoi je répondis à
voix fort étouffée par le récit qu’on vient de lire sans rien omettre non plus
de mes entretiens avec Miroul et le maître Delay.
    Giacomi voulut
bien me concéder que je ne pouvais en honneur abandonner le patient qu’on avait
confié à mes soins, mais que c’était là une circonstance excessivement
déplorable tant chaque heure qui s’écoulait accroissait les périls où se
trouvaient les miens ; qu’il avait bien vu en cheminant ès rues que Paris
bouillonnait et qu’on s’attroupait partout, qu’on bravait les huguenots ou ceux
qu’on prenait pour tels plus qu’à l’accoutumée, certains criant : « À
la cause ! À Madame la Cause ! » : mots injurieux par lesquels
le populaire désignait notre Église, que lui-même avait été arrêté en raison de
sa vêture noire par une dizaine de bélîtres qui sans plus de procès le
voulaient mettre en pièces et qu’il n’avait dû sa sûreté qu’à son accent
italien, l’Italie étant connue des Parisiens pour avoir écrasé dans l’œuf
l’hérésie réformée ; bref, que ce n’étaient partout que méchants regards,
sourds conciliabules, allées et venues, bourgeoisie armée, mines menaçantes et
paroles de sang, lesquelles laissaient présager une émotion dont nous serions
les gibiers. Il ajouta après un moment durant lequel Miroul, lui et moi, nous
nous entrevisageâmes en silence, songeards et le cœur lourd, que le Recroche,
d’après le dit d’Alizon, avait percé à jour notre huguenoterie et qu’il valait
mieux, si le péril se précisait, qu’on se retrouvât en la repue de Guillaume Gautier
plutôt qu’en le logis du maître-bonnetier. À quoi

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