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Paris vaut bien une messe

Paris vaut bien une messe

Titel: Paris vaut bien une messe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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célébrer le souvenir
des Guises et vouer Henri III, suppôt du diable, à l’enfer.
    Des centaines d’enfants, portant des chandelles de cire
ardente entre leurs mains, chantant les sept psaumes pénitentiaux et autres
psaumes, des litanies, hymnes, oraisons et prières, et marchant pieds nus sans
se soucier de la neige, allaient en chemises d’église en église.
    On souillait, on détruisait tout ce qui pouvait rappeler
Henri III et ses mignons.
    On vénérait le duc de Mayenne et M me  de Montpensier,
frère et sœur des Guises.
    Les moines répétaient, en faisant l’apologie du duc de Guise
et du cardinal, son frère : « Ô Saints et glorieux martyrs de Dieu,
béni soit le ventre qui vous a portés et les mamelles qui vous ont allaités. »
    Puis les capucins, dominicains, feuillants, et les prêtres
de toutes les paroisses, portant des reliques, parcouraient les rues de la
ville, entourés de ligueurs en armes.
    —  Pazzi, pazzi ! murmurait Leonello
Terraccini.
    Ces moines et ces ligueurs accusaient même Henri III
d’avoir provoqué le trépas de sa mère, Catherine de Médicis, morte de chagrin
après qu’il eut fait assassiner les Guises. La prédiction annonçant qu’elle
succomberait étouffée sous les ruines d’une noble maison – c’était celle
des Guises – s’était réalisée. Et Henri III, fils démoniaque et
indigne, ne s’était même pas incliné devant la dépouille de la reine mère.
    — Ils disent qu’à peine rendu le dernier soupir son
fils l’a traitée comme une chèvre morte, rapportait Terraccini.
    J’écoutais.
    Je mesurais combien la foi et la religion, quand on se sert
d’elles comme d’outres pleines de passion, peuvent en effet rendre fous les
hommes.
    — Le peuple est si échauffé et enragé que, la nuit, il
oblige les prêtres et les moines à conduire des processions, et chante
« Dieu éteigne la race des Valois ! » reprenait l’Italien.
    Lorsqu’on avait appris à Paris que le pape excommuniait
Henri III pour avoir tué le cardinal Louis de Lorraine, la haine contre le
souverain s’était encore exacerbée !
    Il fallait un « vengeur » pour en finir par le fer
et le feu avec cet homme du diable, ce souverain qui n’était plus légitime,
car, disaient les ligueurs, « ce ne sont pas les rois qui font les
peuples, mais les peuples qui font les rois ».
    — Paris est un nid de frelons, ajoutait Terraccini. Ils
veulent la mort du roi. Ils le tueront, lui, tout comme son héritier, Henri de
Navarre. Ils le clament. Pazzi ! Pazzi !
     
    Je vois Henri III inquiet, blessé par
l’excommunication, hésitant à plonger le poing dans ce nid de frelons.
    J’entends Henri de Navarre lui répéter :
    — Pour regagner votre royaume, il faut passer sur les
ponts de Paris. Qui vous conseillera de passer ailleurs n’est pas un bon guide.
    On se met en route. Je me tiens en retrait, chevauchant aux côtés
de Michel de Polin.
    Je ne veux point participer à ces batailles entre ligueurs,
commandés par le duc de Mayenne, et les troupes de Henri III et de Henri
de Navarre. Parmi celles-ci je reconnais les lansquenets et les reîtres, les
Suisses, les gentilshommes du roi ainsi que Séguret et Jean-Baptiste Colliard,
ceux du Béarnais. Je me refuse à combattre à leurs côtés, à arborer moi aussi à
l’épaule l’écharpe blanche de la huguenoterie.
    Je découvre, jusqu’à en avoir la nausée, ce que l’on fait
dans les villes conquises : Pithiviers, Étampes, bientôt Pontoise, Meudon,
Saint-Cloud… On pend le gouverneur, les officiers, les magistrats, déclarés
ligueurs et rebelles.
    Quand les armées se font face, j’entends les ligueurs
crier : « Braves huguenots, gens d’honneur, ce n’est pas à vous que
nous en voulons, c’est à ce perfide, à ce couillon de Valois qui vous a tant
trahis et qui vous trahira encore ! »
    Et je sais que Séguret, Jean-Baptiste Colliard et bien
d’autres remâchent cette inquiétude.
     
    Ainsi, la guerre a pour corollaire la vengeance. Elle
entraîne tous ceux qui l’approchent, et je n’ai pu y échapper.
    J’ai vu de nouveau la mort dans les églises et les rues de
Saint-Symphorien, l’un des faubourgs de Tours, occupé une nuit – une seule
nuit – par les ligueurs du duc de Mayenne. Ils avaient pillé les maisons,
massacré les habitants, poursuivi les femmes jusqu’au pied des autels. Ils
avaient violé celles-ci devant leurs filles, puis les filles à leur

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