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Paris vaut bien une messe

Paris vaut bien une messe

Titel: Paris vaut bien une messe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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de conscience, mais qui, quand vous leur feriez du mal, vous
mettront en leurs prières ?
    Polin a haussé sa voix qui s’est mise à trembler.
    — Avisez à choisir ou de complaire à vos prophètes de
Gascogne et de retourner courir le guilledou en nous faisant jouer à
sauve-qui-peut, ou de vaincre la Ligue qui ne craint de vous rien tant que
votre conversion.
    Il s’est incliné et, gardant la tête penchée, il est resté
un long moment immobile.
    J’ai regardé le roi se mordiller les lèvres et j’ai pensé un
instant qu’il allait proférer un cri de colère.
    Il s’est balancé d’un pied sur l’autre et, brusquement, nous
a tourné le dos et est sorti de la pièce.
     
    J’ai prié, Seigneur, tout le restant du jour pour que le roi
ait entendu le discours de Michel de Polin.
    La paix, je la voulais comme le bien suprême pour ces
enfants que j’avais vus, décharnés, dans la rue des Fossés-Saint-Germain, pour
ces femmes qui serraient contre elles leurs nourrissons morts de faim, pour
tous ces hommes qui ne seraient point voués à être si vite réduits à l’état de
cadavres dépecés.
     
    Quelques jours plus tard, j’ai rencontré Séguret. Ils s’est
approché si près de moi que je sentais son haleine.
    Il a pointé un doigt sur ma poitrine.
    — C’est une grande abomination, a-t-il dit. Notre Henri
de Navarre va entendre la messe et communier. Tu as gagné, Thorenc !
    Il s’est éloigné en agitant les bras, poings fermés.
     
    J’ai appris que Henri avait réuni ses gentilshommes
huguenots, ceux qui l’avaient suivi depuis le Béarn et qui avaient réussi à
échapper au massacre de la Saint-Barthélemy. Il leur avait dit :
    — Mes amis, priez Dieu pour moi ; s’il faut que je
me perde pour vous, au moins vous ferai-je ce bien que je ne souffrirai aucune
forme d’instruction pour ne faire point de plaie à la religion qui sera toute
ma vie celle de mon âme et de mon cœur, et ainsi je ferai voir à tout le monde
que je n’ai été persuadé par autre théologie que la nécessité de l’État.
     
    J’ai fermé les yeux – comme Vous, Seigneur.

 
42.
    J’aurais dû être apaisé, Seigneur.
    J’ai vu le roi s’agenouiller dans la basilique de
Saint-Denis et y entendre la messe.
    Je l’ai écouté répondre aux questions de l’archevêque de
Bourges qui l’interpellait :
    — Que demandez-vous ?
    — Je demande à être reçu dans le giron de l’Église
catholique, apostolique et romaine.
    — Le voulez-vous ?
    — Oui, je le veux et le désire.
    Henri IV était à genoux devant le grand autel, vêtu
d’un pourpoint et de chausses de satin et de soie blancs, son manteau noir lui
couvrant les épaules et tombant comme une cape autour de lui et son chapeau,
noir aussi, posé à ses côtés.
    Il se confessa. Il communia et la foule cria :
« Vive le roi ! Vive le roi ! »
    J’ai galopé à ses côtés jusqu’au sommet de Montmartre dans
ce long et rouge crépuscule du 25 juillet 1593.
    Il avait donc abjuré.
    La paix peu à peu allait régner.
     
    J’aurais dû être heureux, Seigneur.
    Je faisais partie des quelques gentilshommes qui se
trouvaient, le dimanche 27 février 1594, à droite et à gauche de l’autel,
dans la cathédrale de Chartres, cette église vouée à la Vierge noire où allait
se célébrer le sacre du roi. Et il était oint d’une huile sainte conservée à
Marmoutier, l’abbaye où avait vécu retiré saint Martin, qui avait évangélisé la
Gaule près de deux siècles avant que Clovis ne fut sacré à Reims.
    L’on n’avait pu choisir pour le sacre de Henri la ville de
Saint-Rémi, encore ligueuse.
    Mais, à Chartres, le peuple et la noblesse, les évêques et
les archevêques étaient rassemblés pour écouter Henri prêter serment, au nom de
Jésus-Christ, de maintenir son peuple en paix avec l’Église, et, « en
bonne foi, suivant mon pouvoir, de chasser de ma juridiction et terres de ma
sujétion tous les hérétiques dénoncés par l’Église ».
    J’ai vu la foule se précipiter comme poules sur le grain
quand les hérauts d’armes eurent commencé à jeter du haut du jubé des pièces
d’or et d’argent.
    Le soir, je me retrouvai assis à l’une des trois tables qui
réunissaient pour un festin, autour du souverain, les ecclésiastiques, les
seigneurs et les princesses.
     
    J’aurais dû être comblé, Seigneur.
    J’ai vu le roi s’approcher des malades qui exhibaient leurs
écrouelles, et

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