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Paris vaut bien une messe

Paris vaut bien une messe

Titel: Paris vaut bien une messe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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protecteur de notre royaume, ou bien qu’il fasse
désigner pour le trône l’une de ses filles, mariée à un Habsbourg ? Et
nous deviendrions partie mineure du Saint Empire germanique ! Voulez-vous
de Diego de Sarmiento pour conseiller de ce souverain-là, et du père Verdini
pour son confesseur ?
    Je n’ai d’abord pas répondu à Polin, puis je me suis
souvenu, Seigneur, de Votre visage aux yeux clos.
    Durant plusieurs jours, il m’a hanté.
    Je comprenais Votre lassitude, Vos paupières baissées, façon
de ne pas damner tous les hommes, de ne pas les brûler de Votre regard dont
Vous craigniez peut-être qu’il ne soit par trop impitoyable alors qu’en fermant
les yeux Vous manifestiez Votre compassion, Votre acceptation de la liberté des
hommes dont Vous savez que toujours, presque toujours ils la dévoient.
    Alors, comme Vous, j’ai fermé les yeux.

 
41.
    Les yeux clos, je voyais pourtant l’enfer que les hommes avaient
créé sur Votre terre, Seigneur, et comment, à quelque camp qu’ils
appartinssent, ils n’étaient le plus souvent guidés que par de sombres
passions.
    À Paris, où j’étais retourné sur ordre du roi pour tenter de
conclure une trêve, je vis, en place de Grève, une centaine d’hommes armés
s’avancer, munis de lanternes sourdes. À quinze pas derrière eux marchaient
trois crocheteurs qui portaient sur leur dos trois corps nus et qu’escortaient
le bourreau et ses valets. J’ai reconnu ces trois hommes que j’avais
rencontrés, qui m’avaient fait part de leur volonté d’entrer en négociations
avec le roi. Ils étaient prêts à reconnaître Henri IV comme souverain
légitime, s’il abjurait sa foi. Les ligueurs l’avaient appris et avaient
exécuté ces trois hommes qu’on attachait maintenant à la potence avec, au cou,
des inscriptions infamantes : « Chef des traîtres et
hérétiques », « Fauteur des traîtres et politiques »,
« Ennemi de Dieu et des princes catholiques ».
    J’ai eu envie de vomir.
    Mais telle était la guerre civile dans laquelle, sous
l’ample manteau du mot religion, le royaume était plongé.
    Et la foule chantait :
     
    Depuis onze
cents ans
    On n’a vu en
France
    Que de bons
rois chrétiens
    Qui en grande
révérence
    Ont tous reçu
le sacre avec serment
    De vivre catholiquement
    Tu fais
courir un bruit
    Que seras
catholique
    Tu n’y jus
point instruit.
     
    À mon retour auprès du roi, j’appris que la Provence était
envahie par les troupes du duc de Savoie, allié de l’Espagne et de la Ligue, et
je tremblai que ses soldats, dont je savais de quoi ils était capables, partant
de Draguignan, Aix ou Fréjus, qu’ils avaient conquis, ne gagnent le Castellaras
de la Tour et n’y massacrent – puisque telle était la règle –
Margherita, Denis le Vieux et mon fils Jean.
    J’étais prêt à chevaucher jusqu’à ma demeure, quand un
courrier vint annoncer que les troupes huguenotes avaient refoulé les soldats
du duc de Savoie.
    Mais c’étaient toutes les parties du royaume qui étaient
parcourues par des bandes de reîtres et de lansquenets se réclamant de la Ligue
ou du roi, prétextant défendre la religion catholique ou la cause, s’adressant
à l’étranger pour vaincre leur ennemi français.
    Diego de Sarmiento accueillait à Paris mille deux cents
Espagnols et Napolitains. D’autres s’installaient en Bretagne. Quant au roi, il
faisait appel à nouveau à des Anglais et à des Allemands.
    Le duc de Mayenne réunit des états généraux à Paris et
Sarmiento y présenta les prétendants espagnols au trône de France.
     
    Je me rendis à nouveau à Paris en compagnie de Michel de
Polin, franchissant de nuit les remparts, craignant à tout instant d’être pris
par une patrouille de ligueurs qui nous eussent aussitôt étranglés ou dagués.
    Nous nous glissâmes rue des Poulies, rue des
Fossés-Saint-Germain, nous entrâmes dans l’hôtel de Venise où nous attendaient
des membres du parlement de Paris qui se rebellaient à l’idée que le royaume
tombât entre des mains espagnoles.
    Leonello Terracini faisait le guet pendant que nous
discutions.
    On nous apprit que le pape Sixte Quint était mort subitement,
peut-être empoisonné par des espions espagnols, car on craignait qu’il ne fut
favorable à Henri IV dès lors que celui-ci aurait abjuré. Le nouveau
pontife, un homme des Espagnols, avait renouvelé l’excommunication du roi.
Quant au père Verdini, toujours légat, il

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