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Perceval Le Gallois

Perceval Le Gallois

Titel: Perceval Le Gallois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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Nous le laissons donc entrer mais, lorsqu’il est dedans, la porte se ferme derrière lui. Toute liberté lui est laissée d’aller et venir mais, généralement, il se rend tout droit à la salle où tu es entré. Quand il la découvre vide et inhabitée, s’il est couard et se croit trahi, il retourne au-dehors, et s’il ignore qu’il doit frapper la table avec le marteau, il erre toute la nuit dans la forteresse sans y voir quiconque. Au matin, il pourra repartir à son gré, car la porte est à nouveau ouverte. Mais si, loin de succomber à la peur, il frappe trois fois la table avec le marteau, il est alors hébergé richement et nourri à volonté. Ainsi se voit-il bien traité, pour son plus grand bien et pour notre plus grand honneur. »
    Ainsi parla la dame du château. Elle n’ajouta plus un mot, car la nuit devenait très noire et la lumière des chandelles s’affaiblissait. Venait maintenant l’heure de dormir, et Perceval n’en était guère mécontent, car il commençait à se sentir très las : à plusieurs reprises, il avait failli s’endormir en écoutant la dame. On lui dressa un lit dans la salle, riche et moelleux, et deux jeunes filles étendirent dessus des couvertures bordées de fils d’or et fourrées de peaux de renard. Quand tout fut prêt, la dame dit à Perceval : « Seigneur, va maintenant te coucher, il est temps. Tu es épuisé et, je le sais, voilà bien longtemps que tu devrais être en ton lit. » Elle se leva pour lors et se retira dans sa propre chambre en compagnie des jeunes filles. Seules deux d’entre elles restèrent auprès de Perceval pour veiller à ce qu’il ne manquât de rien. Une fois rassurées sur ce point, elles allèrent rejoindre leurs compagnes en éteignant toutes les chandelles qui brûlaient encore.
    Perceval dormit profondément la nuit entière et ne s’éveilla que lorsque le soleil était déjà haut. Or, quand il ouvrit les yeux, il se découvrit allongé sur l’herbe, sous un grand arbre feuillu, sa lance et son bouclier près de lui, ainsi que ses armes, et son cheval tout prêt à partir, dûment sellé, dûment bridé : il n’y avait rien à reprendre à rien. Perceval se redressa, au comble de l’étonnement. Tout autour de lui, dans l’herbe, d’innombrables fleurs de toutes les couleurs dressaient leurs têtes vers le ciel comme pour se nourrir des rayons du soleil et boire la rosée du matin. Il revêtit sans tarder son haubert et laça son heaume. Puis, ayant suspendu son bouclier à son col et ceint son épée au côté, il enfourcha son cheval et regarda autour de lui. « Que Dieu m’assiste ! s’écria-t-il. Je suis allé dans un château où ne résidaient que des femmes, et où j’en vis tant de si belles que je me croyais en Paradis ! Il me semble également que j’y vis une haute tour et une salle magnifique où tout n’était que luxe et splendeur. Or, je ne vois ici ni chaumière ni maison d’aucune sorte, seulement ces fleurs, toutes plus belles qu’aucune que j’aie jamais vue, et qui répandent un parfum comme jamais je n’en ai respiré de semblable ! Il doit y avoir quelque sortilège là-dessous ! Une chose est certaine pourtant : je me suis couché dans un lit très riche et moelleux et j’y ai joui d’un repos des plus salutaires. Or voici que je me réveille sous un chêne… » Admettant enfin qu’il ne saurait jamais ce qui avait pu se passer, il éperonna son cheval et reprit sa route.
    Il erra si bien, pendant la journée, qu’il finit par se retrouver dans une lande fort vaste et couverte de bruyères et d’ajoncs à perte de vue. Il la parcourut sous un soleil ardent et, quand il en eut atteint l’autre extrémité, il vit un grand arbre, lequel, aussi haut que feuillu, avait un tronc si large et des ramures si luxuriantes que, dans son ombre, une vingtaine de chevaliers auraient pu se masser pour prendre le frais. À une portée d’arbalète au-delà, se dressait un pavillon tendu d’une étoffe de couleur pourpre. Les cordes en étaient de soie bleue, et son faîte doré brillait au soleil de telle sorte que la tente comme l’herbe fraîche tout autour semblaient flamber. Faites de branchages et couvertes de paille, deux loges galloises se voyaient quelques pas plus loin.
    Sans hésiter, Perceval s’en alla droit à la tente et, depuis l’entrée, y aperçut un lit dressé, que couvrait une soie vermeille tissée de fleurs. À cela près, rien d’autre. Il reconduisait

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