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Perceval Le Gallois

Perceval Le Gallois

Titel: Perceval Le Gallois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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vers la forteresse d’où, en son honneur, étaient sortis à sa rencontre les chevaliers assiégés. Au comble de la joie, ils le démontèrent et entreprirent de le désarmer. Cependant, ils ne pouvaient s’empêcher de déplorer que Perceval eût épargné le vaincu. « Ah ! seigneur, dirent-ils, si tu ne voulais pas nous livrer le sénéchal, pourquoi ne lui avoir pas fait voler la tête ? – Vous le livrer, seigneurs ? répondit Perceval, j’aurais mal agi, sur ma foi, car il a tué nombre de vos compagnons, et je n’aurais pu le garantir de votre colère. Vous l’auriez tué, j’en suis sûr, et ce en dépit de moi. Aussi m’en serais-je voulu toute ma vie, puisque je lui avais fait grâce après l’avoir vaincu. Du reste, savez-vous à quelle condition il a obtenu la vie sauve ? En me donnant sa parole d’aller se livrer au roi Arthur.
    À ces mots, les chevaliers reconnurent qu’il avait raison, et ils l’escortèrent avec force démonstrations de liesse jusqu’au moment où Blodeuwen, sortant de son manoir, vint à sa rencontre et, lui ouvrant les bras, le pressa contre sa poitrine. Elle l’entraîna aussitôt dans sa chambre afin qu’il pût se délasser et se restaurer. À la vérité, il ne se reposa guère, car elle ne lui refusa ni baisers ni caresses. Peu lui importait d’ailleurs le boire et le manger ! Il préférait de beaucoup l’étreindre et sentir la douceur de son corps contre le sien. Quelle plus douce récompense eût-il pu espérer ?
    Cependant, dans sa propre forteresse, Clamadeu des Îles s’était levé de bon matin, persuadé que ce jour-là était celui de son triomphe, et que la nuit suivante lui livrerait Blodeuwen. Aussi réclama-t-il ses armes et son destrier puis, sitôt équipé, se dirigea-t-il vers Caerbeli. Or, il était à peine en vue de la forteresse qu’un valet, le visage inondé de larmes, se précipita vers lui en criant : « Ah ! seigneur, les choses vont très mal ! Ton sénéchal a dû se rendre à plus fort que lui, et il est parti pour la prison du roi Arthur ! – Comment ? Que dis-tu là ? s’ébahit Clamadeu. D’où peut venir un chevalier capable de contraindre un aussi vaillant guerrier que mon sénéchal à demander grâce ? – J’ignore qui il est, dit le valet. Je sais seulement que je l’ai vu sortir de Caerbeli dans une armure vermeille. – Que dois-je faire ? demanda Clamadeu. Que me conseilles-tu ? – Seigneur, renonce à ton entreprise. Il serait folie d’aller plus avant ! »
    À ce moment s’avança un chevalier tout chenu, qui avait jadis été le maître de Clamadeu. « Valet ! s’écria-t-il avec colère, tu ne dis rien de bon. Il nous faut en ce moment un meilleur conseiller que toi, et plus sage. S’il te croyait, Clamadeu se rendrait coupable de la pire des folies ! Il doit poursuivre son entreprise, tel est mon avis. » Puis, prenant Clamadeu à part, il ajouta : « Seigneur, sais-tu comment tu pourras te rendre maître du chevalier et de la forteresse qu’il prétend défendre ? – La chose est facile. À l’intérieur des murs de Caerbeli ne reste ni à boire ni à manger. Les chevaliers de sa garnison sont affaiblis, tandis que nous, nous sommes forts et en bon état. Nous n’avons faim ni soif, et nous sommes capables de mener le plus dur assaut qui soit. Voyons si nos adversaires osent sortir pour nous affronter. Nous enverrons devant la porte vingt chevaliers prêts à se jeter dans la mêlée. Le chevalier dont j’ignore le nom et qui coule d’agréables moments auprès de la belle Blodeuwen voudra fatalement montrer sa vaillance à celle qu’il s’est mis en tête de défendre. Mais il risque fort d’y perdre la vie ou la liberté, car, certes, ses débiles compagnons seront bien incapables de le secourir. Nos vingt chevaliers se borneront à les amuser jusqu’à ce que, surgissant à l’improviste par cette vallée, nous les cernions de toutes parts. Ils seront alors bien forcés de se rendre !
    — Par ma foi, dit Clamadeu, tout réconforté par ce discours, ton plan me semble excellent. Nous allons l’exécuter sans tarder. Nous avons ici quatre cents chevaliers bien armés, tous gens d’élite, ainsi que mille sergents grassement payés ; rassemblons-les, nos ennemis ne tiendront pas mieux que mannequins de paille ! »
    Clamadeu des Îles envoya donc devant la grande porte de Caerbeli vingt chevaliers qui déployèrent au vent leurs bannières multicolores.

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