Potion pour une veuve
de l’évêque.
— Et maintenant, toute ma concentration est détruite, dit Berenguer en déplaçant sa reine.
Isaac s’en empara, plaçant le roi en situation d’échec.
— Je concède la défaite avant qu’elle devienne ignominieuse…
— Vous pourriez sauver votre roi, dit Oliver en se penchant au-dessus de la table. Il vous suffirait de…
— Non, seigneur Oliver. C’en est fini. Intéressons-nous plutôt à notre problème, n’est-ce pas, maître Isaac ?
— Comme le voudra Son Excellence.
— Qu’avez-vous appris de l’aubergiste ?
— Un ou deux détails intéressants, répondit Oliver qui leur rapporta sa conversation.
— Un certain Luis, réfléchit l’évêque. Luis Mercer prétendait avoir été en relation avec Pasqual. Il a assisté à ses funérailles et a payé afin que des messes soient dites pour le repos de son âme.
— Cela fait-il de lui un assassin ? s’étonna Oliver.
— Certainement pas. Il me fatigue par sa droiture.
— D’autres personnes présentes à son enterrement ont dû faire dire des messes, Votre Excellence, intervint Isaac. Tous les marchands qui fréquentent la bourse de commerce avaient une haute opinion de Pasqual Robert.
— C’est vrai, il n’était pas le seul…
— Mais s’appelaient-ils également Luis ? demanda Oliver.
— Luis Vidal était à la cérémonie. Et je ne vois pas en lui un assassin. C’est un homme plein de bon sens.
— J’irai leur parler, déclara Oliver d’un ton brusque. Ainsi qu’à tous les Luis que je dénicherai dans cette ville et ses faubourgs.
— La chasse va être longue. Comment vous y prendrez-vous ?
— Je ferai en sorte que le greffier de chaque paroisse me dresse la liste de ses Luis. Tous ceux qui sont nés il y a plus de quinze ans. Et je rendrai visite à tous.
— Savez-vous également comment retrouver la belle femme du portrait ? demanda Isaac.
— J’irai voir chaque notaire et consulterai tout ce qui touche aux dots, expliqua Oliver. Dès que j’aurai terminé mon dîner. Et même si je dois les tirer de leur lit.
— Avant que de déranger les greffiers paroissiaux, proposa Isaac, j’ai plusieurs Luis parmi mes patients. Je pourrais leur demander si quelqu’un a tenté de récupérer cent sous auprès d’eux. Cela faciliterait votre tâche.
— Voilà une excellente idée, reconnut Berenguer. Mais je suggère tout de même que le seigneur Oliver s’occupe de Luis Mercer. Son attitude à l’égard des femmes est étrange, ajouta-t-il, et je ne voudrais pas exposer votre douce Raquel à des difficultés.
Oliver commença par Luis Mercer, qui l’accueillit comme s’ils étaient de vieux camarades.
— Seigneur Oliver, je suis enchanté de vous voir.
Il sonna pour faire venir des rafraîchissements et, en les attendant, parla du temps, de la chaleur et des chances de voir arriver avant l’hiver une cargaison de drap d’Angleterre. Il versa à Oliver un gobelet de vin, sa petite servante le lui porta avec une révérence et, sur un signe de son maître, disparut.
— Bien, fit-il en s’adossant à son siège, que puis-je pour vous ?
— Je dois m’excuser de vous paraître discourtois, maître Luis, mais j’avais totalement oublié notre rencontre.
— Cela n’a rien d’étonnant, dit Luis en secouant la tête. C’est le jour où notre loyal et efficace Pasqual Robert est mort. J’attendais une importante livraison et avais fait ouvrir les portes avant prime. Comme vous pouvez l’imaginer, je m’étais levé tôt et patientais sur place quand cette chose horrible est arrivée. Mais quelques instants avant que notre ami bien-aimé n’entre en ville, quelqu’un – je ne me souviens plus qui – s’apprêtait à me présenter à vous. Je ne doute pas que cet incident ait pu s’effacer aussitôt des tablettes de votre mémoire.
— Ah, elle nous joue de ces tours ! dit Oliver sur un ton badin. Votre visage m’est familier, mais l’incident… non, plus rien.
— Je n’en suis pas surpris. Quelle matinée ! Quelle mort soudaine et horrible ! J’ai souvent côtoyé la mort, mais celle de Pasqual Robert m’a beaucoup affecté. Elle a perturbé mon sommeil pendant plusieurs jours.
— C’est de la mort de mon ami que je suis venu vous parler.
— À moi ? s’étonna Luis Mercer.
— À vous et à bien d’autres. Un homme est-il récemment venu vous réclamer une dette d’un montant de cent sous ?
— Cent
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