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Pour les plaisirs du Roi

Pour les plaisirs du Roi

Titel: Pour les plaisirs du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Hugon
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ses terres du château de Chanteloup. Notre victoire était complète.
     
    Le jour de l'an 1771, M. de Richelieu organisa un souper mémorable dans son hôtel de l'île Saint-Louis. Je m'y rendis avec cinq de mes filles. L'abbé Terray était là, M. d'Aiguillon vint également, et M. de Maupeou y montra lui aussi sa vilaine figure. Pendant ce temps, Jeanne et Chon assistaient à l'office du nouvel an à quelques pas du roi. Un peu plus tard, elles le rejoignirent pour une partie de cartes. Le ton fut très joyeux, surtout quand Chon interrogea le roi pour savoir à qui on donnerait en étrenne les appartements de M. de Choiseul. Ils étaient désormais vacants.
    28 On doit ici prendre avec beaucoup de circonspection le récit du comte. L'abbé de La Ville, premier commis aux Affaires étrangères, n'a peut-être pas fourni ce courrier sous le coup d'une subite inspiration. Il se pourrait même, selon certains témoignages, que Jean du Barry en personne ne fût pas étranger à cette initiative de l'abbé. Que promit-il en échange de ces précieux documents ? Nous ne le savons pas.

 
    Chapitre XXXVIII
    T rois semaines après le renvoi de M. de Choiseul, Jeanne me rendit visite une après-midi en mon hôtel de la rue de Jussienne. J'en fus assez étonné car cela n'était plus dans ses habitudes depuis près de deux années. Elle venait peu à Paris, si ce n'est pour se rendre chez des modistes ou des joailliers qui l'accueillaient maintenant à l'égal d'une reine. Elle retrouva avec plaisir deux ou trois de mes pensionnaires qu'elle avait bien connues, puis nous nous isolâmes dans mon cabinet. Elle était loin, la Jeanne d'autrefois. En plus d'être belle, elle avait acquis cette élégance subtile des femmes de la cour de France, et qui ne s'observe nulle part ailleurs en Europe. Ce jour-là, elle arborait un admirable collier de pierres précieuses qui dessinait une rose des vents, dont l'Est et l'Ouest étaient bornés par chacun de ses magnifiques seins. J'eus très envie d'elle, mais nous conversâmes comme deux vieux amis, de Versailles, du roi et des affaires du moment. À ce propos, je lui demandai si elle avait pu arranger une petite sollicitation que je lui avais faite quelque temps plus tôt – rien de bien important pour elle, mais utile pour moi. Elle me répondit par l'affirmative, mais je crus percevoir dans sa réplique comme de la lassitude. Peut-être même une pointe d'agacement. Vous savez qu'avec Jeanne je ne me gênais de rien et je lui en fis la remarque. Elle parut un petit peu plus ennuyée encore. Cette fois, je pressentis qu'elle ne disait pas tout. Je l'engageai à me parler franchement.
    — Mon ami, commença-t-elle, vous connaissez ma loyauté envers vous.
    Cela débutait mal. En général, lorsqu'en préambule on rappelle à quelqu'un ses devoirs envers lui, c'est que l'on va bientôt s'en affranchir.
    — Je n'ai jamais eu à m'en plaindre. Je souhaite qu'il en soit longtemps ainsi, répondis-je tout de même.
    — Je ne vous oublierai pas, je vous l'ai promis… Toutefois, il me faut vous faire part de certaines choses qui pourront m'y aider, dit-elle en caressant distraitement la dentelle de sa robe.
    — Ah ? Vous avez quelques nouveaux tracas ? Des fâcheux ont repris le flambeau de M. de Choiseul ? demandai-je ingénument en nous servant une limonade.
    — Point du tout, mon ami. Non, de ce côté-là, tout va désormais pour le mieux.
    — J'en suis ravi. C'est d'ailleurs un peu grâce à moi, n'est-ce pas ? insistai-je.
    — Oui, oui, pour sûr. Mais…
    — Mais ?
    — Eh bien, c'est un peu difficile à expliquer, reprit-elle en inspirant profondément.
    — Pas de manières entre nous, ma chère. Racontez-moi ce qui vous embarrasse.
    — Voilà. Vous avez été voir M. Terray il y a quelques jours de cela, je crois.
    — Tout à fait, nous nous entendons fort bien. Il vous l'a dit ?
    — Heu… oui. Il m'a également fait part de votre dernière demande.
    — Ma dernière demande ?
    — Oui… vous vous en souvenez sûrement.
    Je savais parfaitement l'objet de ma rencontre avec l'abbé Terray, cependant, je voulus savoir ce qu'on lui en avait dit.
    — Pas totalement. Rappelez-moi. De quoi s'agissait-il, déjà ? répliquai-je.
    — D'une lettre de change de cinq cent mille livres à vous payer avant la fin du mois.
    On y était.
    — Ah, certes. Ce bon M. Terray vous l'a donnée pour moi ? Il ne fallait pas vous déranger.
    — Ce n'est pas tout à fait cela.
    Je

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