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Pour les plaisirs du Roi

Pour les plaisirs du Roi

Titel: Pour les plaisirs du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Hugon
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seulement que j'y brûlai joyeusement cent mille livres au jeu et vingt mille dans les bordels.
    29 Selon les comptes de l'abbé Terray, Jean du Barry lui avait en moins d'une année personnellement réclamé plus de huit cent mille livres. Cela sans compter les demandes effectuées auprès des banquiers de la Cour, MM. Beaujon et Magon de La Ballue. Ses requêtes incessantes remontèrent bientôt au roi qui s'en ouvrit régulièrement à Mme du Barry. Pour l'information du lecteur, je précise d'ailleurs que cette dernière percevait à cette époque près de deux millions et demi de livres par an des largesses du monarque.

Chapitre XXXIX
    J e ne suis pas d'un naturel plaintif. Ne comptez pas sur moi pour geindre à longueur de pages sur l'ingratitude de Jeanne. Mais ne pensez pas non plus qu'on puisse tondre le loup sans qu'il ne se rebiffe. De retour de voyage, je marquai mon territoire en reprenant le harcèlement de M. Terray. Après quatre mois sans avoir de mes nouvelles, j'étais un peu sorti de son esprit. Une jolie lettre me rappela à son bon souvenir. J'y expliquais que Jeanne s'était engagée à ce que l'on me paye les fameuses cinq cent mille livres dont il était question plus haut. Je signai « comte du Barry et de l'Isle-Jourdain, par la volonté de Sa Majesté ». En soi, ça ne voulait pas dire grand-chose, mais cela impressionne toujours les fâcheux que de citer le bon vouloir du roi. Quatre jours plus tard, un commis de l'abbé m'apporta une lettre de change de cent mille livres, accompagnée d'un petit billet qui me plongea dans la plus grande perplexité. Je vous en livre le meilleur : « Vous trouverez ci-joint une lettre de change d'une valeur de cent mille livres, à tirer sur la banque de M. Beaujon, étant entendu qu'ils s'ajouteront à la créance de neuf cent mille livres dont le comte du Barry et de l'Isle-Jourdain s'honore d'être redevable devant le roi ».
    Que voulait dire ce galimatias ? Redevable ? De quoi ? Je n'attendis pas une minute de plus pour me rendre chez Terray, où l'on me fit patienter une bonne heure avant qu'un commis – le même que celui qui était venu chez moi – ne m'expliquât que l'abbé se trouvait désolé de ne pouvoir se rendre disponible. Sur un ton de conspirateur, il m'affirma qu'une affaire urgente l'accaparait. La bête était au terrier mais ne voulait manifestement pas sortir de son trou pour me voir. Sur le moment, il me prit l'envie de faire un peu de tapage pour la débusquer. Mais finalement, je décidai de faire le docile et m'esquivai sans renâcler. Évidemment, vous vous doutez bien qu'une autre idée m'était venue. J'avais vu en arrivant chez l'abbé que sa voiture semblait se tenir prête à partir. Je pariai que mon irruption impromptue avait contrarié ses plans et qu'il attendait avec impatience mon départ afin de pouvoir s'en aller. Je me postai donc près de la porte de la cour de son hôtel, dans un petit recoin qui me garantissait de ne pas être vu, tout en m'offrant un point d'observation idéal. Cinq minutes à peine après que je me fus mis en poste, l'abbé s'engouffrait précipitamment dans son carrosse, une grosse liasse de papiers sous le bras. Lorsque la voiture passa devant moi, je grimpai d'un bond sur le marchepied en m'accrochant à la portière que j'ouvris lestement avant de me projeter à l'intérieur d'un coup de rein. Qu'on imagine la tête de Terray.
    — Pardonnez cette entrée un peu théâtrale, monsieur l'abbé, mais c'est apparemment la seule façon de pouvoir s'entretenir avec vous, dis-je en m'installant sur la banquette en face de lui.
    — Monsieur le comte, vous auriez pu vous rompre le cou, s'inquiéta-t-il, faussement prévenant – il m'aurait roulé dessus sans ciller.
    — Merci de votre sollicitude, mais une affaire urgente m'oblige à vous faire un brin de conduite.
    — Ah ? Laquelle ? fit-il en se tassant sur son siège.
    — Eh bien, j'ai reçu ce matin une lettre de votre part qui me pose question.
    — Je vois.
    — Vous voyez quoi, exactement ?
    — Vous voulez parler de la lettre de cent mille livres.
    — Plutôt du petit mot qui les accompagnait.
    — Un petit mot ?
    — Oui. Il y était question de neuf cent mille autres livres.
    Terray se racla la gorge.
    — Euh… oui, mais encore ?
    — Votre littérature sonnait comme un avis de créancier.
    — Créancier ? Non, disons plutôt un prêteur.
    — Un prêteur ?
    — Oui. Mais rassurez-vous, le roi n'exige pas de terme.
    — Je

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