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Pour les plaisirs du Roi

Pour les plaisirs du Roi

Titel: Pour les plaisirs du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Hugon
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caractéristiques particulières, comme une bouche bien dessinée, abritant de belles dents, sans manque ni qu'elles fussent gâtées. Ce fait me fut confirmé par M. de La Ferté : il se souvenait d'une confidence du roi qui trouvait une certaine marquise fort à son goût mais son haleine corrompue par des dents pourries le faisait hésiter. Les yeux, enfin, il les aimait taillés en amande, de couleur bleue ou verte.
    Au chapitre du corps, le roi dissimulait une adoration pour les mains et surtout les pieds de ses maîtresses, m'avoua Lebel. Cette manie, dont ce dernier se vantait également, mettait le roi dans les plus grands émois, et Lebel prit toujours un soin extrême à l'examen de cette partie de l'anatomie des invitées du Parc-aux-Cerfs. Quant au reste, Sa Majesté prisait les femmes biens faites et biens charnues aux endroits qui intéressent la curiosité des hommes. Sur la gorge, Lebel soutenait que le roi ne prétendait à aucun avis arrêté, et qu'il en avait d'ailleurs un usage très bourgeois. Enfin, puisque mon enquête devait être complète, je me renseignai sur la nature des préférences du monarque pour la part la plus intime de ses amantes. À ce sujet, le duc de Richelieu m'indiqua comment le roi avait très tôt été subjugué par le verso de ses conquêtes plutôt que leur avers. Lebel me le confirma, en même temps qu'il me livra un des secrets de la marquise de Pompadour pour séduire son royal amant. Aux heures où elle s'abandonnait à ses étreintes, la favorite se distinguait de ses rivales grâce au fameux bain d'ambre qui consistait en une délicate aspersion de son sexe par un capiteux parfum. Le roi en était friand, toujours empressé à soigneusement déguster le fruit du péché, me révéla encore Lebel.
    Tout cela m'intéressa vivement, mais je menais également mes investigations sur un champ plus moral, si l'on peut dire. Les inclinations du roi en la matière le portaient vers des femmes qui le désennuyaient. D'un naturel triste, il s'entichait de toutes celles qui l'arrachaient à ses sombres rêveries. Il ne les voulait point trop intelligentes – Mme de Pompadour était une exception –, mais point trop sottes non plus. Et s'il exigeait qu'elles se plient à ses caprices, le roi appréciait également qu'elles fussent capables de le dominer car il aimait bizarrement cela. Selon Lebel, Sa Majesté goûtait les manques de respect dans l'intimité. Par ailleurs, il affectionnait la musique et une musicienne avait toujours sa faveur, autant qu'une comédienne. Dans sa jeunesse, il se piquait de monter sur des scènes privées pour donner la réplique à de jolies actrices. Mais ce qu'il souhaitait le plus au monde, me disait souvent l'honnête M. de La Ferté, c'était une maîtresse qui l'aimât. Comme le prince de Conti m'en avait fait part quelques années auparavant, Louis XV aimait qu'on l'aime, lui, et non le roi qu'il regrettait si souvent d'être. Ce dernier trait captiva mon attention et me fut certifié par le duc de Richelieu autant que par Lebel ou M. de la Ferté. Aimer l'homme avant le monarque, Mme de Pompadour s'en flattait, elle qui sans partager sa couche depuis plus de six années restait sa confidente et son inspiratrice. L'aimait-elle vraiment ? Rien n'était moins sûr, mais elle avait su l'en persuader. C'était là un exemple à suivre. Ou à dépasser.
     
    Désormais un peu mieux instruit des inclinations du roi, je me mis secrètement en chasse de la perle rare. Je ne dirais pas que la chose employait toutes mes journées, mais elle ne quittait jamais entièrement le fond de mon esprit. Dans les soupers, en promenade, au théâtre, ou chez un perruquier, mon œil prit l'habitude de s'arrêter sur tout ce qui aurait pu charmer le roi : de beaux yeux en amande au Palais-Royal, une mine angélique dans le jardin des Tuileries, de petits pieds au Français, des hanches engageantes dans un bordel, ou des lèvres parfaites chez Procope , rien ne m'échappait. Au bout d'un temps, je me figurais si bien le portrait idéal de celle que je recherchais qu'il me prit même l'idée d'en faire réaliser la peinture par un artiste, mais le résultat fut passable. Je me contentai donc de décrire ce que je poursuivais à quelques-unes de mes courtières habituelles.
    Une d'entre elles, installée rue Sainte-Anne, me donnait les plus grands espoirs tant son talent d'entremetteuse était puissant. Je dois dire qu'il m'a beaucoup été prêté de liens avec

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