Quelque chose en nous de Michel Berger
Castro, rendue célèbre par le premier volume de l’hectologie d’Armistead Maupin, Tales of the City . Si Grégoire et France s’éclatent sur la piste sous les boules à facettes, Michel, lui, s’ébaubit de l’effet que produit ce proto-disco sur les corps et les humeurs des go-go dancers. Il en concevra l’idée du prochain album de France, Dancing Disco, propulsé par un titre imparable, à l’intitulé on ne peut plus simple et direct : « Musique ». Une nouvelle fois invoquée comme panacée, sacrement réconciliateur de l’humanité, ultime unificateur, pacificateur, curateur, purificateur, de tous les maux de l’âme. C’est son premier numéro un au hit-parade de RTL, en juillet 1977, assez chic, tout en dédoublement de tempo, groove de guitares, de piano électrique et de charleston, relance de toms. Sur l’ad-lib, elle improvise quelques vocalises, ce dont toutes les chanteuses françaises ne sont pas aisément capables. C’est qu’en ce qui concerne la musique, Michel Berger refuse la médiocrité satisfaite qui caractérise notre variété. « En studio proprement dit, le rôle d’un producteur, de tous, est de secouer, bousculer, pousser, cajoler, l’artiste. C’est ce que je fais. Avec France, c’est plus facile, car il y a une telle symbiose entre nous et elle sent tellement bien ce que je veux, ne plaçant jamais un mot, un son, autrement que je ne l’aurais fait moi-même, que mon rôle est de la pousser encore plus loin. Par exemple, dans “Musique”, à la fin, j’entendais qu’il fallait qu’il se passe quelque chose, des improvisations en scat. Nous avons travaillé dans ce sens jusqu’à trouver la bonne formule. Le producteur possède exactement le même rôle qu’un metteur en scène au cinéma. »
L’album narre censément l’histoire d’une serveuse de boîte de nuit, Maggie, et alterne morceaux au funk léger (« Dancing disco », « Une nuit à Paris », « Ce garçonqui danse », l’inédit à la Billy Preston du moment « Une femme, tu sais ») et ballades qui poursuivent le développement du personnage de France, la confidente conte de fées de sa génération, et vont devenir, en concert notamment, les favorites de son public : le délicieux et touchant « Le meilleur de soi-même », et ce « Let It Be » à elle, « Si, maman si ».
Le succès est d’importance, l’album se vend à plus d’un demi-million d’exemplaires. Il est aussitôt suivi de « Viens, je t’emmène », follow-up parfait de « Musique » qui paraît dès mars 1978, pour promouvoir les grands débuts scéniques de France à l’occasion d’un nouveau « Numéro 1 » des Carpentier qui lui est cette fois consacré, et bien nommé, puisque France décroche avec ce titre enlevé un nouveau numéro un.
« C’était la première fois que je travaillais pour Michel, que j’avais souvent croisé dans des studios d’enregistrements auparavant, quand il composait pour la pub, pour la SNCF notamment », raconte Janik Top, puissant bassiste de Magma qui deviendra son bras droit jusqu’à la fin. « Nous étions à Gang, avec Bernholc, Claude Engel, un batteur anglais. Michel avait constitué son groupe idéal, dont il mélangeait parfois les éléments. J’étais écartelé entre deux mondes, ma formation classique, celui du jazz, du rock, de Tamla Motown, et celui de la chanson. Là, j’ai vraiment senti quelque chose de très fort sur le plan de la composition, et puis la présence de France, de sa voix qui était absolument unique – une toute petite voix, comme ça. Il avait su lui écrire des mots très forts, parce que, je l’ai découvert au fur et à mesure, il y avait toujours un deuxième, un troisième rideau dans ses textes. Il avait su mettre dans sa bouche des choses qui paraissaient totalement évidentes, mais qui devenaient d’autant plus fortes, dites par elle, parce qu’elle a un charme incroyable. Elle attiraitvraiment le public. Le fait d’entendre ces mots par cette interprète, ça m’a rapproché des deux. De l’une parce qu’elle était drôle, on s’amusait beaucoup, on avait de très bons rapports, de très grandes parties de rigolade. Et avec lui, un humour beaucoup plus fin, plus intellectuel, plus racé, plus caché, avec des mots dans les mots. Quand il disait quelque chose, il fallait vraiment déchiffrer ce qu’il voulait nous dire. Cette finesse d’esprit m’a plu. C’est Michel qui m’a fait prendre conscience de l’importance
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