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Quelque chose en nous de Michel Berger

Quelque chose en nous de Michel Berger

Titel: Quelque chose en nous de Michel Berger Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Yves Bigot
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Quelque chose de Tennessee » au piano blanc, en veste et chemise noires, pantalon bleu sur tee-shirt blanc à la hollandaise en duo avec un Johnny à la blondeur belge appuyée, très dénudé en débardeur vert-de-gris, pantalon blanc, à la guitare sèche. Ils recommenceront pour le « Grand échiquier » de Jacques Chancel.
    Ils se retrouveront, sur scène cette fois, en deux occasions au moins. Au Palais des Sports, Michel chante « Diego, libre dans sa tête ». Johnny le rejoint, pantalon noir clouté à la Keith Richards, tee-shirt noir sous les lasers. Il recommencera au Zénith. Michel est seul au piano, on voit Laurent Fabius, Premier ministre, au premier rang. C’est le soir de la première, il est perdu sur cette grande scène noire, un pinceau de lumière tombe sur lui. Lorsqu’il attaque l’intro de « Tennessee », dans le noir derrière lui, on aperçoit l’incandescence d’une cigarette sur laquelle on tire, et d’un seul coup, Johnny apparaît, avec un chapeau marron et les cheveux blancs de son film en Pologne, et il attaque les paroles de « Tennessee ». Dans la salle, c’est le délire. Comme le dit son ami Daniel Balavoine : « Berger n’est pas un chanteur à voix, mais par contre il a enseigné une leçon de phrasé à plein de chanteurs français. » Cette voix dont Philippe Bouvard écrivait qu’elle était « douce comme chez tous ceux qui sont parvenus sans hausser le ton à imposer leur point de vue », et dont de Bosson affirme qu’il n’en a jamais fait un complexe, bien qu’elle ait longtemps été un handicap.
    Le drame de Michel, cependant, comme celui detoute sa génération empreinte de cette Rock’n’roll attitude, c’est de s’être retrouvé coupé de ceux qu’il entendait convaincre, séduire, se voir rejeté par ceux-là qu’il croyait constituer sa famille tant il en partageait les valeurs, l’« esthétique » comme il l’avait écrit dans son mémoire. En un mot comme en cent, se vouloir rock dans un pays qui ne l’est pas, qui y est même réfractaire par essence. Cette dichotomie fondatrice, cette fracture typiquement et exclusivement française, est au cœur même de toute la problématique de la musique dans ce pays à partir de 1969, quand ce qu’on appelle alors la pop music s’avère marginalisée, et la génération des Variations, Alice, Devotion, Alan Jack Civilization, Dynastie Crisis, Triangle, Tribu, Atoll, Zoo, Catherine Ribeiro + Alpes, authentiquement perdue, sacrifiée. Ceux qui survivent, Martin Circus, Il Était Une Fois, ne le font qu’au prix de sacrifices qui les voient réabsorbés par la variété qui a succédé aux yéyés, malgré les efforts de Polnareff, Dutronc, Gainsbourg, Nino Ferrer, Eddy Mitchell, Christophe, Sheller, Yves Simon, Valérie Lagrange et quelques autres pour trouver une dignité et poursuivre leur chemin singulier, sans trop de concession, comme les radicaux Manset, Magma, Gong, Ange ou Little Bob Story, chacun à leur façon. Bashung ne s’en remettra que plus tard, et par miracle, porté par la vague suivante, celle des Téléphone, Trust, Bijou, Starshooter, Capdevielle, qui elle aussi tendra à entretenir un temps l’ostracisme avant de céder, mais le mal est déjà fait. C’est sans doute Jean-Jacques Burnel, né à Londres, bassiste des Stranglers, et, à ce titre, très longtemps unique rock star hexagonale, qui en appréhende le mieux l’explication. « J’ai un passeport britannique, mais mes parents sont français. Je passais toutes mes vacances en Normandie, soit deux ou trois mois par an, je connais donc “Intervilles”,j’écoutais Polnareff, Dutronc, Johnny, Sheila, « Salut les copains » , et je me souviens même de la vedette yéyé de la semaine en page centrale de Télé 7 Jours . Malheureusement pour Polnareff, Dutronc, Ronnie Bird, il n’existait pas en France de filière séparée, et ils étaient obligatoirement récupérés par la variété. En Angleterre, le rock était distinct du show-business, c’est pour ça qu’il a gardé sa pureté. »
    Plus encore que Johnny, dont la dimension rock est intrinsèque, bien que parfois trahie, Michel, lui, a effectué tout le parcours foutraque du rock en France : vedette yéyé, directeur artistique de major française, puis américaine, auteur et compositeur de slows de l’été, de tubes pseudo-américains en anglais, réalisateur éclectique de bides de variétés, compositeur de comédie musicale, producteur d’un album

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