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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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population,
    l’arrivée de la jeep est saluée par les scènes rituelles d’exaltation
    frénétique et passionnée. Un grand échalas, loin de l’âge logique des galons de
    colonel qu’il arbore, se présente avec une humilité qui trahit la fragilité
    dans laquelle il tient le grade dont il s’est affublé. Pourtant il paraît jouir
    des prérogatives de chef et exercer sur les hommes qui l’entourent une
    indéniable autorité.
    « C’est le Ciel qui
    vous envoie, lieutenant, déclare-t-il à Le Bobinnec. Nous nous trouvons devant
    un dramatique cas de conscience. Vous arrivez à temps pour nous aider à régler
    la situation.
    — J’espère que vous
    ne surestimez pas mes possibilités ! Je vous écoute.
    — À quelques kilomètres
    d’ici, à Saint-Pierre-le-Moûtier, il y a près de deux mille Allemands qui se
    sont retranchés, des Boches parmi les pires, c’est un élément de la Waffen S.S.
    appartenant à la division Das Reich. Ils ont pris position dans la ville
    il y a quarante-huit heures. Sur la route, ils ont été harcelés par des
    embuscades tendues par nos maquis. Nous leur avons infligé des pertes et il
    semble qu’ils s’en trouvent fous furieux. D’après des habitants de Saint-Pierre
    qui sont parvenus cette nuit à franchir leurs lignes, les S.S. se montrent d’une
    extrême virulence et d’une inquiétante nervosité. Le pire est à redouter. Par
    contre, ils auraient parlé de capitulation dans la mesure où ils s’y
    trouveraient face à une unité régulière.
    — C’est en tout cas
    vraisemblable, admet Le Bobinnec. C’est partout le même processus. Ils ont une
    confiance relative en votre respect des conventions de Ge nève.
    — Ça leur va bien !
    — Ne vous méprenez
    pas. Je ne vous jette pas la pierre, mais là n’est pas la question. Qu’attendez-vous
    au juste de moi ?
    — Que vous tentiez
    d’aller les trouver et de parlementer. »
    Le Bobinnec émet un
    sifflement sceptique avant de répondre :
    « Ce serait un
    bluff colossal ! Il n’y a rien de solide derrière moi, je suis en
    patrouille de reconnaissance. Les Américains sont au nord de la Loire et ne
    semblent pas disposés à la franchir ; ce serait du reste une erreur
    tactique de leur part. Avez-vous des renseignements sur la progression de la LRD
    armée, et notamment sur celle de la 13 e demi-brigade de Légion
    étrangère qui ne devrait plus se trouver bien loin ?
    — Depuis deux jours,
    ils tombent sur des os, ils piétinent, et toute la tragédie est là. Entre eux
    et nous, il y a une énorme concentration allemande ; certains Boches ont
    opté pour la guerre à outrance, mais les plus usés, les plus modérés, les plus
    défaitistes sont hantés par la même obsession : ne pas tomber entre les
    mains des Français, et se rendre aux Américains. Ils se savent pris dans un
    étau, ils savent qu’au nord se tiennent les Américains, et au sud les Français
    libres. Ils viennent de démontrer qu’ils sont capables de se battre comme des
    lions avec l’acharnement du désespoir plutôt que de se rendre aux troupes
    françaises, et c’est la raison pour laquelle ils les accrochent. Ils pensent
    ainsi gagner du temps, le temps qui permettrait aux Américains d’arriver jusqu’à
    eux.
    — Pourquoi ne
    remontent-ils pas tranquillement jusqu’à la Loire ?
    — Les maquis, la
    Royal Air Force. Les Boches préfèrent s’implanter dans les agglomérations, et la
    liste des bourgs martyrs s’allonge de jour en jour.
    — Vous n’oubliez qu’un
    détail, c’est que je suis français.
    — Votre uniforme et
    votre véhicule sont anglo-américains. Vous pouvez prétendre être envoyé en
    plénipotentiaire par les Alliés.
    — C’est un sacré
    coup de poker votre histoire ! Un coup à se faire découper en tranches
    fines pour peu que votre chef S.S. ait une crise de foie.
     
    — Lieutenant, si
    les légionnaires arrivent, ils vont les déloger à l’arme lourde ! Eux non
    plus ne sont pas des poètes, vous le savez aussi bien que moi. Ça peut durer
    plusieurs jours. Il y a à Saint-Pierre-le-Moûtier des milliers de civils, des
    femmes, des enfants, des vieillards. »
    Le Bobinnec se retourne
    vers ses trois hommes.
    « Qu’est-ce que
    vous pensez, les gars ?
    — Arrête ton cirque,
    tu veux bien, Alain ! lance Boutinot. Ce qu’on en pense tu n’as rien à en
    foutre, et tu le sais aussi bien que nous. Ta décision est prise depuis le
    début de ce baratin. Tu

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