Qui ose vaincra
dans les lignes ennemies, protéger certains ponts en vue d’accélérer
notre avance et, par votre exemple, soulever le mouvement de résistance dans ce
secteur, voilà votre mission. Les Allemands, en ce moment, sont très sensibles
aux opérations aéroportées et je sens qu’un certain nombreux de commandants d’unités
seraient extrêmement heureux d’abandonner la lutte s’ils pouvaient avoir
suffisamment d’excuses pour se justifier. J’espère que vous les leur procurerez.
Nous avons l’intention de fairecroire à l’ennemi, par tous les
moyens, que votre opération se déroulera sur une plus grande échelle qu’elle se
fera en réalité. Toute votre force doit être utilisée dans la dispersion afin
de conserver le maximum d’effet sur un large secteur.
« Dans cette
opération vous disposerez de très peu de temps pour créer des bases, reconnaître
avant d’agiret je veux que chaque équipe frappe l’ennemi de toutes
ses forces, aussi durement que possible, jusqu’à 1’arrivée de nos troupes.
« Durant toute
cette guerre, mon principe a été d’agir avec hardiesse calculée : c’est ce
principe que je vous demande de suivre. Tout ce que je sais de vous me fait
croire que vous êtes bien les hommes que j’attendais et voici votre chance de
montrer au monde ce que vous pouvez faire réellement, j’ai vu le général Crerar
qui commande la LRD armée canadienne. Il attache à cette opération une grande
importance et il réalise que sans elle le nettoyage de la région où vous allez
être parachutés pourrait être une affaire longue et coûteuse entraînant des souffrances
supplémentaires pour les Hollandais.
« Souvenez-vous de
l’entraînement que vous avez reçu et des opérations auxquelles vous avez pris
part, de telle sorte que vous ne perdiez aucune chance de mettre en pratique
votre expérience dans ce qui, peut-être votre dernière bataille en Europe.
« Essayez de vous
mettre à la place des Allemands : cherchez comment vous pouvez créer dans
leur esprit maximum de confusion/
« Je suis fier de l’honneur
qui m’est fait de vous commander et je vous souhaite la meilleure chance. Je
terminerai en disant que j’attends de chacun d’entre vous quel qu’il soit, des
coups aussi durs que possible contre l’ennemi durant les quelques jours dont
vous disposerez et que vous vous battrez avec une hardiesse en vue d’obtenir le
maximum de résultats et le minimum de pertes. »
Le ciel est bas, le
temps bouché. Vers 22 heures, on a informé les S.A.S. qu’on allait les larguer « blind »
(à l’aveuglette) ou plus exactement que, pour la première fois au monde, ils seraient
parachutés à l’aide de radars.
Maintenant ils s’occupent
tous à sangler leurs parachutes deux à deux, ils en vérifient la bonne
installa—
Errard, dit « Crâne
d’Obus », que les séquelles d’une blessure contraignent à ne pas
participer à l’opération passe dans les rangs et fait la quête pour les
dispatchers qui ont chargé les containers.
« Votre monnaie, les
gars ! Donnez-moi votre monnaie anglaise, vous n’avez rien à en foutre, vous
allez tous crever ! gueule-t-il en agitant son béret qu’il tient à la main
à la manière d’un mendiant.
— M’emmerde pas, j’ai
pas de monnaie, annonce Neuwirth lorsque le petit parachutiste lui fait tinter
sous le nez le butin qu’il a déjà ramassé.
— Il t’a même pas
laissé un petit penny, Pattus ? Eh ben, on peut dire que tu es maso, tu l’as
payé bien cher ton billet pour l’enfer.
— Ta gueule, Crâne
d’Obus, tu vas finir par nous porter la cerise avec tes conneries. »
Neuwirth a conservé
plusieurs pièces anglaises dans son portefeuille. Il le sait parfaitement, mais
son portefeuille se trouve dans la poche poitrine de sa vareuse – pour l’en
extraire, il faudrait qu’il dégrafe son parachute.
L’un suivant l’autre, les
lourds appareils décollent. Pour les parachutistes, la monotone attente
commence. La météo est infecte. Les avions sont ballottés de trou d’air en trou
d’air. Celui du lieutenant Varnier est tellement secoué que le dispatcher accroché
à son siège n’aperçoit pas la lumière rouge qui s’est allumée, intimant la
préparation au saut. C’est le sergent Judet qui la remarque et qui se lève en
gueulant :
« Action station !
Nom de
Dieu, vite, grouillez-vous ! »
Dans une indescriptible
pagaille
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