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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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La
    convocation est parvenue à l’état-major, tard dans la soirée de la veille, sous
    forme d’un coup de téléphone sec, sans autre commentaire.
    L’huissier a juste le
    temps de débarrasser l’officier général de sa capote ; la porte du bureau
    ministériel s’ouvre, Churchill fait lui-même entrer Nye dans le bureau enfumé. Il
    mâche son éternel cigare. Il désigne à Nye le fauteuil-club redouté ; le
    général a l’habitude ; enfoncé dans le vaste siège, il va subir la ronde
    du lion qui va tourner autour de lui. Il va se dévisser la tête pour suivre les
    mouvements du chef du gouvernement. L’odeur insupportable des cigares successifs
    consumés depuis l’aube va l’écœurer à cette heure matinale. D’autre part, il
    est évident que Churchill traverse une de ses périodes de fureur froide dont le
    général va affronter les effets.
    Sans la moindre formule
    préalable, le Premier ministre aboie :
    « Auchinleck se
    fout de moi ! »
    Par prudence, Nye ne
    bronche pas. Il laisse poursuivre son chef :
    « Je l’ai convoqué,
    il a fait état d’affaires urgentes pour repousser son voyage. Je le presse de
    passer à l’offensive, il réclame quatre mois. Ce qui signifie que pendant
    quatre mois, sept cent mille hommes vont prolonger leurs vacances au soleil du
    Moyen-Orient. Ce qui signifie surtout que l’ennemi va intensifier son blocus de
    Malte. Si après la Crète nous perdons Malte, les Allemands vont contrôler la
    Méditerranée. Inutile d’épiloguer sur les conséquences.
    — Qu’attendez-vous
    de moi, monsieur le Premier ministre ?
    — Vous allez gagner
    Le Caire, convaincre Auchinleck. Stafford Cripps vous y rejoindra ou vous y
    précédera. Je lui ai fait câbler aux Indes.
    — Pensez-vous que
    nos pressions soient suffisamment convaincantes pour faire revenir le général Auchinleck
    sur la stratégie qu’il a élaborée, et dont il pense être le seul juge ?
    — Ce sont mes
    ordres, Nye. Assurer le ravitaillement de Malte ! Qu’il agisse comme il l’entend,
    mais que les convois passent ! Malte, et rien d’autre. L’issue de la
    guerre peut en dépendre. »
    Près de trois mois se
    sont écoulés depuis que Churchill a envoyé ses ambassadeurs au Caire, mais la situation
    n’a pas évolué. Malte est maintenant dans une position catastrophique. Asphyxiée
    par le blocus allemand, l’île est sur le point de succomber à la famine. Le 2
    juin 1942, dix-sept transports de fort tonnage sont rassemblés dans le port d’Alexandrie,
    ils constituent la seule chance de survie pour les insulaires maltais. Un
    télégramme impératif de Churchill ordonne leur passage, coûte que coûte, menace
    Auchinleck de le relever de son commandement en cas d’échec.
    Le ventilateur géant du
    bureau d’Auchinleck brasse l’air suffocant. L’état-major n’est qu’une vaste fournaise.
    Le général en chef transpire. Les verres d’eau minérale qu’il ingurgite semblent
    perler instantanément sur sa peau moite. Ses deux officiers d’état-major
    paraissent aussi incommodés. Face à eux, dans un fauteuil de bois, David Stirling
    souffre moins ; son cerveau enregistre, attentif, les doléances de son
    chef. Simultanément il élabore un plan. Lorsque, calme et souriant, il déclare :
    « Je pense que c’est réalisable… », l’atmosphère se détend. Les
    officiers supérieurs le dévisagent, reconnaissants. En une minute il est devenu
    l’homme le plus important du Moyen-Orient.
    « Il faut me
    laisser carte blanche, messieurs. Je vais répartir mon effectif en huit groupes
    de commando. Je vais, le même jour, à la même heure, attaquer tous les
    aérodromes ennemis sur lesquels des appareils sont susceptibles de prendre l’air.
    — Vous pensez
    sérieusement que c’est possible, Stirling ?,
    — Dois-je vous
    rappeler notre devise, monsieur ? « Qui ose vaincra. »
    L’agitation règne enfin
    au camp de Kabret. Depuis le retour de Stirling tous ont compris qu’une
    opération d’envergure se prépare. Pour les Français, ce sera la première. Stirling,
    quatre officiers britanniques, Bergé et deux officiers français nouvellement
    affectés, le lieutenant Jordan et l’aspirant Zirnheld, ont passé la nuit sous
    la tente de commandement.
    Dans la journée du 4
    juin, tous les parachutistes anglais et français (une centaine d’hommes) sont
    convoqués par groupes de cinq ou six. Ils restent une petite heure sous la
    tente de Stirling, en sortent

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