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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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l’enceinte du camp S.A.S. Fourbus, sales, épuisés, les hommes
    sautent mollement des véhicules. La curiosité ne supplante pas leur fatigue ;
    ils s’affalent, indifférents, à l’ombre des camions.
    À Port-Saïd, Bergé s’est
    rasé et s’est lavé. Il a revêtu sa tenue la plus présentable. Il marche sous le
    soleil ardent à la rencontre d’un géant nonchalant qui s’avance vers lui. Stirling
    soulève à peine le bras pour poser sa main gauche sur l’épaule de Bergé. Il est
    souriant, accueillant.
    « Vous êtes le
    capitaine Bergé ? Content de vous recevoir, vous et vos bloody frogs (grenouilles sanglantes). Je suis David Stirling. J’ai donné les instructions
    concernant votre installation. Détendez-vous, et rejoignez-moi à ma tente dans
    une heure. »
    Un grand sergent
    rassemble les Français. Il lâche un coup de sifflet strident entre ses dents, sans
    se servir de ses doigts, et hurle :
    « All
    right, bloody frogs ! Follow me ! » Bergé l’interpelle en
    anglais : « Sergent ?
    — Yes, sir, répond
    le sous-officier en se figeant…
    — Je ne suis ici
    que depuis cinq minutes et ça fait la seconde fois que j’entends mes hommes
    désignés sous le sobriquet de bloody frogs. Quelle est l’origine de
    cette étiquette ?
    — C’est le capitaine
    Stirling, sir. Depuis que nous vous attendons, il vous appelle comme ça.
    Il adore les appellations fantaisistes et les plaisanteries. N’y voyez aucun
    manque de respect. Vous savez bien que, pour nous, tous les Français sont des
    grenouilles ; pour le sang, je pense que c’est une allusion à celui des
    Australiens que vos hommes ont répandu partout où ils sont passés. J’ai
    moi-même lu ça dans les rapports vous concernant. Dans un sens, c’est plutôt
    flatteur, sir. »
    Tassé dans un fauteuil d’osier,
    un verre de remarquable whisky en main, Bergé songe que ses rapports avec
    Stirling seront meilleurs s’ils s’échangent assis : le capitaine anglais
    doit mesurer près de deux mètres.
    « Vous paraissez
    confortablement installé, constate Bergé. Je ne m’attendais pas à trouver un
    tel luxe au milieu du désert. Le Grand Quartier Général vous couve. »
    Stirling sourit.
    « Mon vieux, le G.Q.G.
    nous méprise, nous considère comme une bande de farfelus inconscients, moitié
    têtes brûlées, moitié bandits, mais incapables à part entière. Il nous refuse
    tout ; alors, on se démerde. Les meubles, les lits, la vaisselle proviennent
    de commandos chez nos voisins. C’est du pillage, mais ça entretient le moral et
    l’habileté des hommes. Nos meilleurs clients sont les Néo-Zélandais, ils sont
    gavés de tout.
    — Eh bien, vous ne
    semblez pas mieux cotés que nous.
    — J’ai deux alliés.
    D’abord le général Ritchies : depuis le début il a compris et admis l’utilité
    de l’arme que j’ai créée, et croyez-moi ça lui a valu bien des tracas. Néanmoins,
    il a fini par rallier à notre cause le général Auchinleck.
    — C’est le
    commandant en chef’ ?
    — Ce n’est que le commandant en chef. Personne n’est tout puissant, face à la diversité des
    unités stationnées au Moyen-Orient.
    — Vous avez
    pourtant réussi partiellement plusieurs actions de commando périlleuses.
    — Ça n’a rien
    changé. Manque de spectacle, manque de publicité, mais ne dramatisons pas trop,
    Bergé. Je reste persuadé que dans un avenir très proche ils vont se rendre
    compte de nos possibilités.
    — En attendant ?
    — En attendant :
    instruction, entraînement. C’est le seul procédé pour tenir les hommes. Quand
    ils rentrent d’une marche de cinquante kilomètres, chargés de vingt-cinq kilos
    à travers le désert, ils sont d’un calme serein. Même topo pour les vôtres
    jusqu’à nouvel ordre…
    — Pas tout à fait, soupire
    Bergé. Les miens n’ont pas encore eu la chance de tâter du Boche. »
    Stirling se lève, déployant
    son immense taille :
    « Ne vous en faites
    pas, mon vieux. Quelqu’un a dit que la chance était le dieu des commandos. Avec
    un peu de veine, vos bloody frogs vont pouvoir faire couler un autre
    sang que celui des Australiens… »
     

8
    10, Downing Street, 15
    mars 1942. Le général Nye, sous-chef d’état-major, répond, indifférent, au
    salut de l’intendant de police qui lui ouvre respectueusement la porte discrète.
    Il est 9 h 55. Sa rencontre avec le Premier ministre est prévue pour
    10 heures.
    Nye n’est pas à l’aise.

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