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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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apparaît dans le coude de la voie. Elle tracte un interminable chapelet
    de wagons, de simples plateaux sur roues sur lesquels sont amarrés des tanks, des
    automitrailleuses, des canons lourds.
    Les parachutistes ne
    pensent plus ni à s’abriter le visage ni à se boucher les oreilles. Médusés et
    admiratifs, ils contemplent le spectacle.
    La motrice pénètre dans
    le tunnel. Sa vitesse est de vingt-cinq, au maximum trente kilomètres à l’heure.
    Au passage, les mécanos en uniforme ont fait un signe de main amical aux
    sentinelles qui gardent la voie.
    Quatorze wagons sont
    engagés sous le tunnel lorsque l’explosion se produit. Un instant les
    parachutistes pensent que tout va s’effondrer. La violence de la déflagration
    est telle qu’elle a provoqué un véritable séisme.
    Mus par la réaction en
    chaîne, deux wagons qui se trouvent encore à l’extérieur du tunnel basculent
    lourdement. Un char Tigre rompt ses amarres et, dans une pesante rotation, vient
    broyer trois des gardiens qui étaient demeurés sur place, abasourdis.
    « Et tu disais qu’on
    avait la poisse ! » chuchote Denys Cochin.
    Le sergent est secoué
    par une crise nerveuse de fou rire. Il a enfoui son visage dans ses mains pour
    étouffer les hoquets dont il est agité. Il en pleure. Ses paumes sont maculées
    de terre noirâtre ; les larmes plaquent sur ses joues une purée sombre.
    Lorsque ses compagnons
    découvrent son visage de clown, à leur tour ils sont nerveusement atteints d’un
    rire communicatif. Cochin plonge la tête dans sa manche, Camaret a défait son
    foulard de « soie parachute » et s’en sert pour assourdir ses pouffements.
    C’est par signes que
    Cochin intime l’ordre de lever le camp. Les parachutistes s’élancent en courant
    à travers bois. Mais Camaret qui ne peut réfréner son rire s’arrête le dos
    contre un arbre pour retrouver sa respiration.
    « Ça va comme ça !
    Il faut y aller, maintenant ! lui jette Cochin qui a retrouvé son sérieux.
    — Tu sais à quoi je
    pense, Denys ? Quand je raconterai ça à mes petits-enfants, ils ne
    voudront jamais me croire.
    — Si tu ne viens
    pas tout de suite, tu ne risqueras jamais de raconter quoi que ce soit à qui
    que ce soit. »
    Camaret se calme, il
    reprend sa course avec les autres. Vers d’autres sabotages. Vers d’autres
    combats.
     

QUATRIÈME PARTIE
SAINT-MARCEL

20
    Dans les heures qui
    avaient suivi la jonction des sticks Marienne et Déplanté, un optimisme compréhensible,
    mais superflu avait plané sur le groupe.
    Eugène Maurizur avait
    conduit les parachutistes à la ferme de Pelhue. Son enthousiasme, son talent de
    conteur, l’ambiance chaude et paisible de la ferme avaient contribué à gonfler
    le moral des officiers S.A.S… À leur départ d’Angleterre on leur avait précisé
    qu’ils n’avaient en rien à compter sur la Résistance. Or, Maurizur était en
    train de leur faire une démonstration éclatante qui mettait en évidence le
    mal-fondé de ces affirmations.
    « Plus de deux
    mille hommes armés et organisés obéissent aux instructions de leur chef, le
    colonel Morice, affirmait le jeune résistant. Nous pouvons en assembler et en
    armer le triple. Depuis l’annonce du débarquement, ils convergent tous vers un
    point précis : le colonel Morice a établi son P.C. dans une ferme, la
    Nouette, à proximité du bourg de Saint-Marcel. Ce sera le plus grand
    rassemblement des Forces françaises de l’Intérieur depuis leur création. Si
    vous nous encadrez, c’est une armée que vous pouvez lever. »
    Marienne n’en croit pas
    ses oreilles : la sincérité, la confiance de Maurizur sont communicatives.
    Déplanté est plus réservé, il entrevoit le danger d’un grand rassemblement, mais
    craint de jouer les défaitistes. Pourtant il remarque :
    « C’est contraire à
    nos instructions. Nous devons saboter par petits groupes, bloquer les voies de
    communications, éviter au maximum de nous faire repérer. »
    Marienne éclate :
    « L’état-major
    vient de faire la preuve de sa carence en matière de renseignements. Les ordres
    que nous avons reçus nous ont été transmis en fonction de données qui se
    révèlent erronées. Il faut prévenir Londres, les amener à réviser leur plan.
    — Que savons-nous
    de l’efficacité de ces combattants ? Je ne mets en doute ni leur
    patriotisme ni leur courage, mais tu sais aussi bien que moi que ça ne suffit
    pas.
    — Nous sommes là
    pour les seconder,

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