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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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lorsqu’il apprend ce que l’on attend de lui. Le réveil brutal l’avait
    rendu furieux. Il doit écarter le groupe compact des curieux pour parvenir
    jusqu’aux prisonniers. Brutalement, jouant de sa supériorité de bilingue, il
    interroge les Allemands. Questions et réponses fusent. On sent le dialogue
    tranchant. Autour d’eux le cercle se presse ; les hommes cherchent à
    comprendre le sens des propos échangés en lisant sur les visages. Après une
    longue conversation, Krysik se retourne vers le Manchot et déclare :
    « Ce sont des
    parachutistes.
    — Merci du
    renseignement, raille Bourgoin. Où se trouve leur unité ? Quel est leur
    effectif ?
    — Mon commandant !
    souffle Krysik, indigné.
    — C’est bon, abdique
    Bourgoin, chargez-vous d’eux. »
    Furieux, un résistant s’interpose.
    « Laissez-les-nous,
    mon commandant. On saura bien les faire parler, nous aussi on a un interprète.
    — Notre combat n’aurait
    plus de sens, tranche Bourgoin. Allez, dispersez-vous ! »
    Krysik passe la matinée
    en compagnie des prisonniers. Avant midi un bruit se répand. Ils ont parlé, le
    parachutiste alsacien est parvenu à leur tirer les vers du nez. La rumeur
    parvient à la ferme. Bourgoin convoque Krysik.
    « Tout le monde
    raconte que vous avez fait parler les prisonniers. Si c’est exact, j’attends
    votre rapport. »
    Krysik se tient au
    garde-à-vous, mal à l’aise.
    « C’est inexact, mon
    commandant.
    — Tout le monde
    ment, alors. On vous a vu prendre des notes avec soin. Expliquez-vous et pas de
    faux-fuyants.
    — Ça n’a aucun
    rapport avec les questions militaires, mon commandant.
    — Vous ne pensez
    pas que c’est à moi d’en décider ? Remettez-moi ces notes. »
    Visiblement au supplice,
    Krysik sort d’une poche de sa chemise un papier plié ; il tente d’expliquer,
    bafouille :
    « Ce sont des
    adresses, mon commandant.
    — Des adresses ?
    — Un bordel à
    Vannes et puis aussi des filles faciles, des filles qu’on paie. J’ai pensé qu’après
    qu’on aura quitté Saint-Marcel… »
    Trois officiers ont
    assisté à la scène. À leur tour ils relèvent la tête et notent les adresses.
     

24
    En toute autre circonstance,
    le lieutenant Wilhem Gebhardt aurait été réformé à cent pour cent. Il y a plus
    d’un an que le lieutenant aviateur a été amputé des deux jambes. Il marche
    grâce à des prothèses d’alliage métallique, s’aidant de deux cannes. Au début
    de l’année 1943, son Stuka a été abattu sur le front de l’Est, Gebhardt
    a pu sauter en parachute – il n’était que superficiellement blessé à l’épaule –,
    mais il a dû attendre dix heures dans la neige l’arrivée des secours qui le
    trouvèrent sans connaissance, les deux pieds et les deux jambes gelés.
    La Luftwaffe considérait
    le tout jeune officier (il avait à peine dix-huit ans lors de ses premières
    victoires) comme un authentique héros – il était l’un des plus jeunes
    combattants à avoir reçu la Croix de fer.
    Gebhardt avait refusé la
    réforme. On avait fini par l’affecter à un groupe de reconnaissance, et depuis
    six mois il était cantonné à l’aérodrome de Rennes.
    À l’aube ensoleillée du
    16 juin, le lieutenant Wilhelm Gebhardt vient de se voir confier une mission. Il
    gagne son Fieseler Storch de sa démarche mécanique de robot ; il
    est gêné par la mollesse du terrain. Ses cannes s’enfoncent dans la terre imprégnée
    de la pluie des derniers jours. À plusieurs reprises, il refuse l’aide des deux
    soldats qui l’accompagnent ; il ne fait appel à eux qu’en cas d’extrême
    nécessité, notamment pour le hisser dans l’appareil. Les trois hommes ont l’habitude
    de l’opération qui est synchronisée comme un ballet. Les deux soldats forment
    de leurs mains une chaise à porteur et soulèvent l’officier qui lâche ses
    cannes et attrape un hauban sur lequel il fait une traction, ce qui lui permet
    de s’asseoir en bordure de la porte. Gebhardt pose alors ses pieds artificiels
    sur l’épaule de chaque homme et se redresse d’un coup de reins jusqu’à pouvoir
    se saisir d’une forte poignée fixée spécialement au plafond du poste de
    pilotage. D’un effort supplémentaire fourni de son seul bras droit, il se hisse
    alors sur le siège et ramène ses jambes mortes qu’il dispose sur la barre de
    terminaison des commandes.
    Contact. Le petit moteur
    pétarade dans un fracas de motocyclette. La frêle carcasse

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