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Requiem sous le Rialto

Requiem sous le Rialto

Titel: Requiem sous le Rialto Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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personne et il pouvait compter sur notre discrétion.
    — Donc, il a bel et bien quelque chose à cacher, conclut Spaur.
    — Que suggérez-vous, baron ?
    — Je vous suggère d’écrire aujourd’hui même un rapport dans lequel vous ferez allusion à la dimension internationale de l’affaire et vous demanderez si la garde civile est vraiment compétente en l’espèce.
    — En d’autres termes, la Kommandantur prendra les choses en main ?
    Le commandant de police acquiesça.
    — Toggenburg ne sera pas ravi des conséquences positives de ce changement sur les statistiques de la police. Mais il n’aura pas le choix.

45
    Alphonse de Sivry, dont la boutique sur la place Saint-Marc jouissait d’une excellente réputation quoiqu’il ne fût pas très regardant quant à l’authenticité et à l’origine de ses antiquités, examina à travers sa loupe la boîte à priser qu’on lui avait confiée en dépôt-vente le matin même. C’était prétendument un bien de famille, mais on lui avait déjà servi de meilleurs mensonges.
    La boîte ovale, de la taille d’une paume d’enfant, était un objet de fabrication française remontant au Grand Siècle. En dehors du châssis et de la charnière, cette pièce était tout entière en or pur. Deux douzaines de minuscules rubis dessinaient une guirlande de fruits sur le couvercle, et surtout, une petite rayure presque invisible en traversait le fond. Bref, il s’agissait à n’en pas douter de la pièce qu’il avait vendue au mois d’octobre précédent à un client n’ayant assurément aucune raison de s’en séparer, ce qui ne pouvait signifier qu’une chose : à savoir que cette boîte à priser était aussi louche qu’un hôtel borgne, et l’inconnu qui la lui avait apportée, un âne de la pire espèce.
    Alphonse de Sivry reposa sa loupe et rangea l’objet dans le tiroir de son bureau. Puis il but avec jubilation une gorgée de café, s’appuya contre le dossier de sa chaise et sourit d’un air satisfait. Une alternative plaisante s’offrait à lui : ou bien il achetait cette pièce à un prix dérisoire en prétextant son origine frauduleuse et la revendait plus tard à l’étranger, ou bien il se rendait au commissariat pour signaler la réapparition de l’objet volé et s’attirer les faveurs de la police ainsi que celles du propriétaire. Cette dernière solution était assurément la meilleure, pensa-t-il, surtout compte tenu des rumeurs récurrentes sur la provenance trop souvent suspecte de ses articles.
    Il rouvrit donc son tiroir, en sortit la boîte à priser et l’emballa avec soin dans son mouchoir. Ensuite, il se leva, enfila sa redingote, accrocha le panneau «  chiuso 1  » à la porte du magasin et tourna la clé dans la serrure. Avant de quitter les arcades des anciennes Procuraties, il ouvrit son parapluie car il s’était remis à pleuvoir et il détestait que l’eau s’accumulât dans le rebord de son chapeau.
     
    À peine une demi-heure plus tard, l’antiquaire se trouvait devant la porte d’un appartement situé au deuxième étage d’une maison bien entretenue, sur laquelle on pouvait lire le nom d’ Antonio Lupi . Tron et Bossi s’étaient postés de chaque côté afin de rester invisibles de l’intérieur. L’inspecteur, le dos plaqué contre le mur, tenait son arme à la main et faisait de gros yeux. Son supérieur semblant juger ce comportement excessif, il avait adopté une attitude plus décontractée.
    Sur un signe de celui-ci, Alphonse de Sivry tira sur la tige en métal. Il avait été surpris que sa déposition déclenchât tout à coup une intervention panique, car au départ, les deux policiers, plongés dans la rédaction d’un rapport, avaient manifesté un intérêt plutôt médiocre pour son histoire. Dès qu’ils avaient su à qui la boîte à priser appartenait, ils avaient cependant eu l’air exalté. Et voilà qu’il se retrouvait maintenant entraîné dans des événements qu’il ne comprenait pas, en train d’obéir à des ordres dont le sens lui échappait.
    Après un deuxième coup de sonnette, il entendit des pas dans le couloir et la porte s’ouvrit. En l’apercevant, M. Lupi afficha une mine joyeuse et lui demanda, ce qui facilitait considérablement l’opération :
    — Vous avez déjà trouvé un acquéreur ?
    L’antiquaire se faisait l’effet de Judas en personne.
    — Je vous amène deux messieurs que la boîte à priser intéresse beaucoup.
    Avec cette

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