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Retour à l'Ouest

Retour à l'Ouest

Titel: Retour à l'Ouest Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Victor Serge
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Hitler, tenté avec lui le coup de force de Munich en 1923, été
un des animateurs du parti nazi à ses débuts et un des promoteurs de l’antisémitisme…)
    L’histoire qui se fait est tout entière dominée par une
question de propriété : socialisme ou capitalisme – le fascisme n’étant
que l’expédient suprême du capitalisme. Un expédient qui lui sera
vraisemblablement mortel, avec le temps, après avoir coûté fort cher à l’humanité.
Et la politique des vingt dernières années tient tout entière dans ce « plutôt… »
du maréchal Foch, répété diversement par beaucoup d’autres. La Grande-Bretagne
pouvait s’opposer à la conquête de l’Éthiopie par l’Italie ; mais la
défaite en Afrique eût ouvert la crise du fascisme, peut-être provoqué son
effondrement. « Plutôt la route des Indes menacée qu’une révolution en
Italie. » La victoire de la République espagnole pouvait être facilement
assurée, par le simple jeu de la légalité internationale. Mais elle eût
signifié l’entrée de l’Espagne dans une période d’audacieuse transformation
sociale. « Plutôt Franco que le pouvoir aux mains des CNT-UGT… Plutôt
Mussolini maître de la Méditerranée qu’une Espagne socialiste ! »
    Le même raisonnement a conduit les démocraties à abandonner
l’Europe centrale à l’impérialisme italo-allemand. La République allemande
était viable, à condition de donner quelques satisfactions aux masses
laborieuses. Son prolétariat s’est trouvé pendant quinze ans accablé par la
double pression des puissances victorieuses à l’extérieur et des classes réactionnaires
à l’intérieur. Sans cesse, jusqu’au moment où Hitler reçut le pouvoir des mains
défaillantes du vieil Hindenburg, les hommes d’État du monde entier se sont
répété le mot de Foch… L’Autriche, même après l’avènement d’Hitler, pouvait
être sauvée – mais elle ne pouvait l’être que par une démocratie où l’esprit de
Vienne socialiste eût prévalu. « Plutôt Dollfuss… » On est servi !
    Du point de vue de l’intérêt des nations, cette façon de
raisonner, consistant à tout subordonner aux intérêts des classes riches, aboutit
à une trahison permanente. Et ce qu’on appelle quelquefois la débilité des
démocraties n’est pas autre chose que cette trahison. Les démocraties sont
délibérément trahies, vis-à-vis des impérialismes totalitaires, par les
dirigeants de la bourgeoisie, qui préfèrent le fascisme, serait-il imposé par
des baïonnettes étrangères, à une abdication rendue nécessaire par l’intérêt supérieur
des collectivités nationales et internationales.

Le Birobidjan, République juive
    9-10 juillet 1938
    Le territoire de Birobidjan [240] , situé en
Extrême-Orient, en bordure du fleuve Amour, affecté depuis 1928 à la
colonisation juive, était solennellement érigé le 29 août 1936, par un décret
du gouvernement soviétique, en « État national juif », sous la forme
d’une République autonome, incluse dans la République socialiste fédérative de
Russie. On avait songé auparavant à constituer en Crimée ou dans la région de
Kherson, non loin de la mer Noire, un territoire autonome juif. La révolution, ayant
amené à la conscience nationale une foule de peuples naguère maintenus dans une
sujétion coloniale, tenait à leur reconnaître des foyers nationaux. Pourquoi
les deux à trois millions de Juifs répandus surtout en Ukraine et en Russie
blanche n’eussent-ils pas bénéficié du même traitement ? Mais il
paraissait difficile de leur découper un territoire sur la carte de républiques
fédérées au sein desquelles ils ne formaient que d’importantes minorités
ethniques. Ils ne prétendaient pas, du reste, à former un État ; par
contre, le mouvement sioniste demeurait vivace parmi eux, malgré la répression
qui l’atteignait sans cesse ; et beaucoup, privés de moyens d’existence
par l’étatisation du commerce ou réduits à la misère par les mesures prises
contre l’artisanat indépendant (afin de favoriser la coopération artisanale
contrôlée par l’État), ne savaient en vérité ni où aller ni que devenir.
    Le continent russe ne manque ni de terres à défricher ni de
contrées à peupler. Bien des solutions au problème juif y étaient possibles… Il
pourrait aujourd’hui, si son régime politique ne l’en empêchait, accueillir les
Juifs persécutés de l’Europe

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