Retour à l'Ouest
sommaires des
prisonniers par les troupes de Versailles (l’assassinat de Flourens et de Duval notamment), fusilla aux derniers moments un
certain nombre d’otages, une soixantaine. Par contre après sa défaite :
« Le chef de la justice militaire, le général Appert ,
assura que 17 000 personnes avaient été mises à mort durant les derniers
jours de mai. En fait le conseil municipal paya 17 000 inhumations, mais d’autres
victimes tombèrent ou furent incinérées hors Paris et le chiffre de 20 000
en tout peut être tenu pour véridique [59] . »
Le prolétariat finlandais tenta en 1918 de fonder une
démocratie nouvelle qui ne fut vaincue que grâce à l’intervention allemande. Ce
grand épisode de l’histoire moderne est trop peu connu en Occident, bien qu’il
soit du plus haut intérêt. Je ne l’évoque ici que pour citer une donnée
statistique plus récente que celle de la Commune de Paris. D’après un écrivain
blanc, M. Henning Söderhjelm, dont l’ouvrage,
La Révolution rouge en Finlande
[60] , parut à Londres
en 1919, plus d’un millier de personnes seraient tombées à l’arrière sous le
coup des Rouges, pendant la guerre civile. M. Söderhjelm n’en recense
pourtant que 624. Par contre, aucune statistique du nombre des travailleurs
massacrés par les Blancs après la victoire de ceux-ci n’existe ; mais on
estime que ce nombre peut varier entre dix et vingt mille… « Aux environs
de Lakhtis, écrit un survivant, les mitrailleuses travaillèrent plusieurs
heures par jour… On fusilla en un seul jour quelque deux cents femmes… »
L’histoire de toutes les répressions est la même. Nous
pourrions citer plusieurs fois la France (émeutes de Lyon en 1831, journées de
juin 1848), la Hongrie, l’Allemagne, la Chine… L’histoire montre
irréfutablement de quel côté se bat la bête humaine.
Ce qui naît…
19-20 septembre 1936
Les événements d’Espagne, s’ils nous apportent chaque jour
des raisons d’inquiétudes et de souffrance, attestent aussi, par certains
traits, de grands changements en cours dans le monde. Ceci, indépendamment même
de leurs propres péripéties. Je ne veux aujourd’hui que souligner un fait d’ordre
capital.
La presse a rapporté avec quel héroïsme acharné des
combattants étrangers [61] se sont battus à Irun [62] .
Un collaborateur de
Vu
rencontre là, parmi les tout derniers défenseurs, un grand gaillard de trente
ans vêtu d’une combinaison beige avec une cartouchière de cuir… Il est
ingénieur et parisien. Chaque année, il vient passer ses vacances dans le pays
basque : « Ils avaient besoin de techniciens, me dit-il en souriant. Que
je passe mes vacances ici ou à Biarritz… » Il y est resté « pour
surveiller le fonctionnement des mitrailleuses et d’un canon antiaérien… Il ne
devait jamais repasser le pont d’Irun ». Frère de ce René Pasque, ouvrier
bruxellois, deux fois tué non loin du pont d’Irun : une balle l’atteignit,
puis un obus l’ensevelit. Ses camarades ont écrit qu’il fut d’un courage
admirable. Le cinéaste français Manécheur commandait la défense de La Puncha. L’Allemand
Hoffman « commandait soixante hommes sur les hauteurs de San Marcial ».
« Ce sont ces volontaires, véritable Légion rouge, qui résistèrent dans
les premières lignes jusqu’à la dernière cartouche, jusqu’à l’écrasement… »
(
Marianne
, 9 sept.) « Je
n’oublierai jamais, écrit le même journaliste, ce socialiste belge qu’un obus coupa
en deux lorsque l’artillerie des insurgés se mit à pilonner durement les nids
de mitrailleuses perchés sur les crêtes qui protégeaient Béhobie [63] … » Ailleurs,
les Italiens Sylvani et Mario Angelini se sont fait tuer de même…
Ces traits de sang et de feu inscrivent dans la chronique de
notre temps l’avènement d’un sentiment nouveau. Il a pu paraître, par instant, que
nous vivions à une époque de réaction nationaliste, de retour aux haines des
tribus, d’économie fermée (les économistes disent : l’autarcie). Le
communisme même prétendait, avec Staline, s’enfermer « dans un seul pays »…
La terre se hérissait de barrières douanières, de barbelés tendus le long des
frontières, de tribunes d’où les micros déversaient sur la foule les délires
nationalistes, l’antisémitisme, l’orgueil impérial de Rome, le culte des Chefs,
la menace contre les voisins… L’analyse révélait bien, sur
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