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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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des nôtres. Nous refusons en effet de comprendre dans les échanges les nègres que les Fédéraux ont enrégimentés et que nous avons capturés. »
     
    Bertie III terminait sa lettre par une information qui ne pouvait laisser personne insensible, quel que fût son camp.
     
    « Un deuil cruel a frappé notre président Jefferson Davis. Le quatrième de ses enfants, un fils de cinq ans, Joseph Evan, a fait une chute mortelle à Richmond. Plus que jamais, cher cousin, nous sommes déterminés à nous battre pour que la Confédération des États du Sud soit reconnue comme nation indépendante. »
     
    Quelques semaines après réception de ces nouvelles, on apprit à Soledad, par des marins de passage, que le gouvernement confédéré, en proie à de grandes difficultés financières, venait de lancer un emprunt forcé, d'augmenter les impôts, de mobiliser tous les hommes de moins de quarante-cinq ans. Le fer manquait, on fondait barrières et balcons pour faire des rails, car les communications devenaient de plus en plus difficiles du fait des fréquentes destructions de voies ferrées.
     
    Commentant ces informations devant ses intimes, comme souvent à l'heure des rafraîchissements, sur la galerie de Cornfield Manor, lord Simon s'indigna en apprenant que des forceurs de blocus racontaient que, les jours de bombardement, les gens de Charleston tiraient de leur geôles les prisonniers nordistes et les exposaient, bien en vue, sur les quais, au feu des leurs.
     
    – C'est un acte inhumain dont Bertie s'est bien gardé de se vanter. Cette guerre tourne à la barbarie ! Ah, ils peuvent en parler, du point d'honneur ! rugit le lord.
     
    Ce soir-là, Charles Desteyrac fit état d'une lettre reçue le matin même de son ami le peintre Lucien Grandioux, dit Diou. La missive contenait des détails sur la bataille navale qui avait opposé, au large de Cherbourg, le navire confédéré Alabama au vapeur fédéral US Kearsarge . L'artiste, embarqué sur un petit voilier, avait assisté au combat avec son éminent confrère Édouard Manet 4 et une foule de Cherbourgeois et de Parisiens conduits à Cherbourg par des trains spéciaux, dits « de plaisir ».
     
    « Dès le 11 juin, les journaux rapportèrent que l' Alabama , un navire sudiste, avait été autorisé par le gouvernement français à réparer des avaries et à s'approvisionner dans le bassin de Cherbourg. Quelques jours plus tard, on sut que le Kearsarge , une corvette à vapeur bien armée des États-Unis, qui poursuivait l' Alabama depuis longtemps, croisait maintenant devant le port, attendant la sortie du bateau confédéré pour le détruire. Parfait gentilhomme et marin intrépide, Raphael Semmes, capitaine de l' Alabama , fit savoir au commandant du Kearsarge qu'il acceptait le combat et prendrait la mer le 19 juin, entre neuf et dix heures du matin.
     
    » Pendant une semaine, les Cherbourgeois avaient fêté les officiers et l'équipage de l' Alabama . Surtout le capitaine Semmes, descendant d'une famille française émigrée aux États-Unis, qui se vantait d'avoir coulé, en deux ans, soixante-cinq bateaux de commerce nordistes. À Cherbourg, on avait tendance à considérer l'affrontement prévu comme une régate ! L'excitation augmenta quand on apprit que le capitaine Raphael Semmes avait été, à l'Académie navale d'Annapolis, le condisciple du capitaine du Kearsarge , John Winslow. Les deux cadets avaient partagé la même chambre ! De ce fait, la bataille devenait duel entre deux marins qu'opposait la sécession des États du Sud. »
     
    Sur l'affrontement, Diou ne relatait rien de plus que ce qu'en rapportaient les journaux. Devant les curieux les plus téméraires, montés à bord d'embarcations variées, les canons du Kearsarge avaient eu raison, en neuf bordées, de l' Alabama , dont douze des marins avaient perdu la vie. Les autres, tombés à l'eau pendant le naufrage, avaient été recueillis par les petits bateaux français présents sur le lieu du combat, et aussi, comme le capitaine Raphael Semmes, par un yacht à vapeur britannique, le Deerhound , propriété de lord John Lancaster.
     
    « Ce gentleman avait décidé d'offrir à sa femme, à ses quatre enfants et à sa nièce une bonne place pour assister à ce qu'il considérait comme une épreuve sportive. Naturellement, comme les Cherbourgeois, Lancaster tenait pour l' Alabama , construit en 1862 pour les Sudistes par les chantiers de la Mersey, donc un peu

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