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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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d'endurer les conséquences d'événements sur lesquels il n'avait pas prise.
     
    – Allez prendre un peu de repos. Nous nous reverrons plus tard. Je vous remercie, messieurs, conclut-il, mettant ainsi fin à l'entretien.
     
    Comme Charles se préparait à quitter la pièce avec le major et les marins, lord Simon le retint et l'invita à s'asseoir.
     
    – Votre ami Robert Lowell est-il ici ? demanda-t-il.
     
    – Locomotive et wagons n'ayant pu être embarqués pour Soledad, sa présence à bord de l' Arawak ne se justifiait plus. Il est resté aux États-Unis et a dû regagner Pittsburgh, dit Charles.
     
    – Bien. J'imagine qu'il a conservé les plans de notre matériel. Vous allez donc lui commander une nouvelle locomotive et des wagons. Mais, cette fois, il les fera livrer à New York où l' Arawak ira les prendre. La traversée sera plus longue, mais on peut espérer des gens du Nord qu'ils se conduisent plus honnêtement que les esclavagistes. En attendant, je vais donner l'ordre de payer ce qui reste dû aux ateliers de Pittsburgh et à votre ami, comme si le matériel avait été livré. Ces gens ont fait leur travail et ne doivent pas pâtir des agissements des rebelles de Charleston. Je ferai aussi envoyer des arrhes pour la nouvelle commande, décida Cornfield.
     
    Desteyrac s'inclina et promit de faire diligence, étonné de constater que lord Simon endossait sans hésiter un préjudice financier de plusieurs milliers de dollars. « Geste de grand seigneur », se dit l'ingénieur en regagnant Valmy.
     
    Il y trouva lady Lamia, au comble de la satisfaction, qui jouait avec Pacal. Bien qu'elle n'eût aucune sympathie pour les planteurs esclavagistes, la confiscation de la « puante machine à vapeur » de son frère la réjouissait.
     
    – Nous ne verrons pas de sitôt des panaches de fumée noire insulter notre ciel, ni des escarbilles salir nos fleurs ! dit-elle.
     
    – Ce n'est que partie remise. J'ai l'ordre de commander une nouvelle machine, révéla Charles.
     
    – Si les gens du Nord et ceux du Sud en viennent aux armes, les fabricants de locomotives devront plutôt couler des canons. Nous serons tranquilles pour un temps et mon frère oubliera son train de nabab, pronostiqua Fish Lady.
     
    Au lendemain du retour de l' Arawak , Charles Desteyrac, obéissant à lord Simon, rédigea une longue lettre à Robert Lowell pour qu'il lançât au plus tôt la construction en Pennsylvanie d'une nouvelle locomotive, identique à celle tombée aux mains des Caroliniens.
     
    Parmi ceux qui, comme lord Simon, avaient éprouvé une grande déception, figurait discrètement Viola, sœur de la nurse de Pacal. Une quinzaine plus tôt, Ounca Lou, ayant reconnu, sur une lettre arrivée à Valmy au nom de la jeune fille, le cachet de la poste de Pittsburgh, l'avait remise à sa destinataire en disant : « Voici, je crois, des nouvelles de votre amoureux ». Bob Lowell annonçait alors son retour prochain à Soledad, et Viola n'avait pas plus caché sa joie à Mme Desteyrac qu'elle ne tentait maintenant de dissimuler sa désillusion. Silencieuse et le regard éteint, elle vaquait aux travaux domestiques sans pouvoir contenir des soupirs de délaissée.
     
    « Robert Lowell viendra plus tard avec la nouvelle locomotive », lui disait Ounca Lou.
     
    « Dans combien de mois, m'ame ? Y m'aura oubliée, c'est sûr », gémissait-elle.
     
    Ces lamentations agaçaient Adila, sa sœur aînée, qui désapprouvait le flirt ébauché avec l'ingénieur. « Les Américains ne sont pas comme les Anglais, Viola. Ils ont toujours méprisé les Indiens qui habitaient l'Amérique avant eux. Ils en ont tué beaucoup et ils ont volé leurs terres et leurs troupeaux. Aujourd'hui, ils n'ont pas changé et ne pensent qu'à prendre leur plaisir avec les filles des îles comme nous », assurait-elle, l'œil sévère.
     
    Viola se mordait les lèvres pour ne pas divulguer le secret qui expliquait son désappointement un peu exagéré. Dans ses lettres, Bob Lowell lui avait fait de telles déclarations et promesses de fidélité qu'elle se prenait à imaginer une union possible avec l'ingénieur. Ounca Lou, seule confidente informée de la correspondance amoureuse de la jeune fille qu'elle aidait à perfectionner sa pratique de l'anglais, tentait de modérer son enthousiasme. Bien qu'elle eût apprécié le sérieux et les qualités de cœur de Lowell, Mme Desteyrac répétait ses mises en garde :

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