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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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engagement est personnel. Ils ont accepté de n'être pas soutenus par l'Amirauté en cas d'ennuis avec les Fédéraux, mais ils sont assurés de retrouver leur grade et leur commandement dans la Royal Navy – ou dans l'armée – quand ils décideront de rentrer dans le rang. Si le Sud l'emporte et que la Confédération devient indépendante, on peut penser que les services rendus par nos forceurs de blocus issus de la Royal Navy seront pris en considération..., expliqua Murray avec un sourire entendu.
     
    – Comme ceux d'alliés occultes mais efficaces, puisque ces marins livrent aux Sudistes armes et munitions, venues d'Angleterre, sur des bateaux construits sous de faux noms par vos chantiers de la Mersey et de la Clyde. De quoi ouvrir droit à la reconnaissance des esclavagistes, n'est-ce pas ? grommela l'ingénieur.
     
    – N'oubliez pas, Charles, que votre gouvernement, comme le nôtre, est dans l'expectative. C'est pour ça, j'imagine, que votre empereur Napoléon III, qui a fort à faire au Mexique, accepte que les chantiers Arman Frères 13 , de Bordeaux, construisent, sous les noms d' El Toussan , El Monastir , Cheops et Sphinx , des navires semblables à ceux produits par nos chantiers. Ces bateaux français, officiellement destinés au gouvernement égyptien, rejoindront Nassau, les Bermudes ou La Havane où ils changeront d'identité et grossiront la flotte des forceurs de blocus, répliqua Murray.
     
    – Nos souverains respectifs ont donc la même conception de la neutralité, se résigna à reconnaître Desteyrac.
     
    – Après la prise de New Orleans, les chances des Sudistes de gagner la guerre et de fonder une nation indépendante se sont sérieusement amenuisées. Mieux vaudrait miser sur la victoire du Nord, observa Mark Tilloy.
     
    – Rien n'est sûr, si l'on en juge par les derniers combats. Et puis, d'après les nouvelles que nous recevons de Londres, les Anglais libéraux sont plutôt favorables aux Sudistes. Nous n'avons jamais aimé les Yankees, à cause de leurs mauvaises manières. Ils s'appuient sur les basses classes et ont fait de la démocratie un régime empreint de vulgarité. Beaucoup de citoyens britanniques estiment que la partition de l'Union assurerait l'existence d'un Sud indépendant et aristocratique. The Times considérait récemment « la destruction du colosse américain comme la bonne délivrance d'un cauchemar ». Et le journaliste ajoutait : « Excepté quelques gentlemen de tendance républicaine, tous ne sont pas éloignés de souhaiter le succès de la cause sudiste. » Quant au Morning Post , il s'est montré encore plus catégorique : « Si le Nord gagne, qui peut douter que la démocratie sera plus arrogante, plus agressive, plus nivelante et plus vulgaire, si cela est possible, que jamais avant ? » Même Punch émet des doutes sur les vraies causes du conflit : « La justice pour les nègres n'est qu'une réflexion d'après coup 14  », cita Malcolm Murray.
     
    – En France, certains polygraphes, avec un humour qui n'a rien d'oxfordien, traitent la guerre civile américaine avec dérision. Ainsi ce quatrain du journal Tintamarre que m'a envoyé mon ami Fouquet, dit Desteyrac en tirant une lettre de sa poche pour citer à son tour :
     

    Dans le Sud, avec le canon,
    Avant d'avoir rétabli l'ordre,
    Quoique n'ayant pas de coton,
    Nous aurons du fil à retordre.
     

    » Et c'est signé “Un nègre fin” ! acheva Charles, rendu un peu confus par la stupidité du calembour.
     

    Avant le départ, très matinal, pour Soledad, Malcolm Murray fit porter à bord de l' Arawak plusieurs caisses de whisky et de porto, des boîtes de thé et des sacs de café récemment arrivés de Liverpool.
     
    – Un forceur de blocus a prélevé ça pour moi sur sa cargaison personnelle à destination des Sudistes. Je lui ai vendu, à deux cents la livre, huit cents kilos de bon sel de nos salines d'Inagua. Il revendra ce sel cinquante cents la livre à Wilmington. Ça valait bien un petit présent, non ? confessa-t-il en riant.
     
    Les colis rejoignirent dans la cale les bidons de peinture grise dont Mark Tilloy avait fait sans plaisir l'emplette chez le seul shipchandler de Nassau.
     
    – Dommage que vous n'ayez pas d'acier à vendre aux esclavagistes. On dit qu'il est passé de vingt-cinq dollars à mille cinq cents dollars la tonne, dit l'officier, une fois les manœuvres d'appareillage terminées et le cap donné au

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