Richelieu ou la quête d'Europe
pour fermer le chenal d’accès à La Rochelle débute rapidement. Les travaux s’achèvent à la fin du mois de mars 1628. Au siège par la terre, s’ajoute le blocus maritime. Le marquis de Spinola visite l’ouvrage : il est impressionné. Pour honorer l’alliance de 1627, Philippe IV a dépêché sur place une escadre espagnole, placée sous les ordres de Don Frédéric de Tolède, qu’accompagne Spinola. Mais les vaisseaux du roi catholique ne s’attardent pas, prétextant une querelle de protocole.
Au printemps, l’assemblée du clergé de France vote une subvention extraordinaire de trois millions de livres pour aider Louis XIII. Au soutien financier, les capucins ajoutent le soutien moral des troupes. Les collaborateurs du père Joseph veillent au maintien de l’ordre et à la bonne tenue des soldats. Le roi lui-même est en mauvaise santé, le froid et le vent rendant les conditions de vie éprouvantes. À la prière de Richelieu, le souverain regagne la cour et abandonne l’entière direction des opérations à son ministre, promu lieutenant général pour l’occasion, alors que les fonctions étaient jusque-là détenues par le duc d’Orléans. L’honneur fait au cardinal est immense, mais l’inquiète aussi. Monsieur, évincé, ne peut que lui en vouloir, et la rancune domine désormais les relations entre les deux hommes. En regagnant Paris , Louis XIII s’expose également aux pressions exercées par les adversaires du siège. Parmi ceux-ci, paradoxalement, les chefs du parti dévot sont particulièrement virulents. Ils critiquent ouvertement l’autoritarisme de Richelieu. Marie de Médicis elle-même réclame un accommodement avec les rebelles. Le cardinal ne peut s’empêcher d’y voir la main de Philippe IV, qui prône le compromis. Et une seconde expédition anglaise est envisagée dans l’entourage du roi d’ Angleterre .
Charles i er ressent l’échec de ses navires face à l’ île de Ré comme une humiliation. Il est décidé à se venger mais ses caisses sont aussi vides que celles de Louis XIII. Le roi d’ Angleterre convoque donc le Parlement pour tenter d’obtenir des crédits. En ce début d’année 1628, les marins de Portsmouth n’ont pas été payés depuis dix mois et se mutinent. Richelieu essaie de tirer parti de la situation. Il craint un enlisement du conflit qui pourrait lui être fatal. À la mi-mars, il lance une brusque offensive contre La Rochelle , en vain. Dans le même temps, il accélère la préparation d’une nouvelle flotte destinée à accueillir les Anglais. Tous les bâtiments disponibles entre Bayonne et la Somme sont réquisitionnés. La construction de trente vaisseaux de haut bord pour l’armée royale est achevée. Les agents du cardinal basés en Hollande procèdent enfin à des achats de bateaux supplémentaires. La France et l’ Angleterre se livrent à une véritable course de vitesse. Londres parvient enfin à payer les marins et à armer 53 navires. La flotte anglaise prend la mer le 8 mai, sous les ordres de lord Denbigh, beau-frère de Buckingham. Profondément impopulaire, inquiet pour sa sécurité, celui-ci préfère ne pas quitter Londres et déléguer son parent.
Les Anglais arrivent en vue de La Rochelle une semaine plus tard. Ils commencent par bombarder la digue, en vain. Les batteries françaises répliquent aussitôt, sous les yeux de Louis XIII, de retour sur place. Le 18 mai, coup de théâtre : après avoir tenté de mettre le feu aux ouvrages français, la flotte anglaise rebrousse chemin : la retraite est totalement incompréhensible. Les navires sont bientôt de retour dans leur port d’attache. Charles i er ordonne leur renvoi à La Rochelle , mais les attaques dont Buckingham fait l’objet retardent le réarmement et le réapprovisionnement des vaisseaux de guerre anglais. Au cours de l’été, le duc se décide à se rendre lui-même à Portsmouth pour accélérer les choses. Il s’apprête à reprendre la mer quand il est assassiné par un puritain du nom de Felton.
À La Rochelle , les bellicistes dominent. Ils remportent la municipalité et placent Jean Guiton à la tête de la cité. L’arrivée de la flotte de lord Denbigh suscite l’espoir des assiégés, vite déçus, et affamés. Au mois de mai, toutes les bouches inutiles sont expulsées. Vieillards, femmes et enfants agonisent entre les murailles et les lignes royales, qui reçoivent l’ordre de les repousser. Au cours du mois
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