Richelieu ou la quête d'Europe
revenus extraordinaires réservés à l’armée. Il annonce l’intention du gouvernement de réformer le système de rétribution des soldats, ainsi que le mode de ravitaillement et d’entretien des troupes. Richelieu complète les allocutions prononcées par ses collègues en termes très généraux : il justifie les dépenses de l’État et réitère la nécessité de trouver de nouvelles ressources financières.
La réforme militaire est discutée jusqu’au 23 décembre. L’assemblée s’accorde sur le renforcement de la discipline, sur la systématisation du recrutement, sur la mise en place de magasins de vivres, sur la régularisation des soldes… et sur leur propre exemption du logement des gens de guerre !
Pour les finances, les débats sont plus houleux. La noblesse de robe, la noblesse d’épée et les officiers ne cessent de se quereller pour préserver leurs intérêts respectifs. Afin de gagner du temps, Richelieu présente le 11 janvier 1627 un mémoire reprenant l’essentiel des propositions gouvernementales. Le mémoire est lu par le secrétaire de l’assemblée, Paul Ardier de Beauregard [42] . Le point de vue est ensuite étayé par une adresse du surintendant des finances, le marquis d’Effiat. Il est envisagé de supprimer les offices et pensions inutiles, ou encore de valoriser les enseignements scientifiques et techniques. Michel de Marillac prononce un autre discours remarqué, constituant une véritable apologie du mercantilisme. Une attention particulière est réservée aux conditions de vie des petites gens. Concerné par le développement de l’économie et les réformes fiscales, le peuple l’est aussi par les réformes militaires visant à remédier au problème de la vie des troupes sur le pays.
Deux commissions se forment pour examiner les propositions du gouvernement. Les notables proposent de conserver les forteresses du Poitou , occupées par des garnisons royales, utiles contre les huguenots, nombreux, de la région. Toutes les fortifications de l’ Angoumois devraient, au contraire, être rasées. La destruction systématique est également décidée pour la Provence , exception faite des frontières. Les notables acceptent l’interdiction de traiter avec les ambassadeurs étrangers, malgré le problème posé par le nonce apostolique. Quel statut lui est-il réservé ? Personne n’est d’accord. Tous approuvent en revanche l’interdiction des levées de troupes par une autre autorité que celle du roi, l’introduction au Conseil de membres de la noblesse seconde, la réglementation du commerce du grain et la réorganisation de la taille. La proposition concernant une chambre des Grands Jours est rendue caduque par les officiers qui réclament que la nouvelle assemblée ne soit composée que de parlementaires. Concernant l’entretien et le maintien de l’armée dans les provinces, les notables font part de leur voeu que le Trésor royal prenne en charge les deux tiers des frais ! La construction de 45 navires de commerce et la fondation de compagnies sont acceptées.
L’assemblée des notables se sépare le 24 février. Le programme politique de Richelieu paraît avalisé, mais, encore une fois, les conflits d’intérêts ont renvoyé les décisions importantes à l’arbitrage royal. L’assemblée des notables s’avère aussi inutile que les états généraux ; elle n’est plus réunie jusqu’en 1788.
Louis XIII et Richelieu ont un point commun qui les rapproche : la volonté de se faire obéir. L’ordre du jour de l’assemblée des notables de 1626 est révélateur. Au cours des mois qui suivent, cet état d’esprit se confirme. Un gentilhomme en fait les frais, François de Montmorency-Bouteville. Alors qu’en 1624, malgré les dispositions royales prises par le passé pour interdire les duels, il a tué l’un de ses adversaires, Thorigny, le roi l’autorise à réapparaître en France , mais pas à Paris . Le bretteur s’est fait des ennemis, dont le marquis de Beuvron, un proche de Thorigny. Par pure provocation, Bouteville décide de se battre contre Beuvron sur la place Royale, en pleine capitale. L’affrontement a lieu le 14 mai 1627. Selon les usages du temps, les témoins se battent aussi. Celui de Beuvron, Bussy d’Amboise, est tué par son adversaire, le comte Des Chapelles. Aussitôt, Montmorency-Bouteville et Des Chapelles prennent la fuite. Ils sont rattrapés sur la route de la Lorraine et embastillés. La noblesse
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