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Richelieu ou la quête d'Europe

Richelieu ou la quête d'Europe

Titel: Richelieu ou la quête d'Europe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie-Catherine Vignal Souleyreau
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chacun une place de sûreté : quelques jours plus tard, Condé et Soissons sont de retour à la cour, et le 25 août, les contrats de mariage sont enfin signés. De somptueuses fêtes sont données pour saluer l’heureux dénouement de la crise.

    Si Richelieu, introduit au plus haut niveau de l’État, entretient des liens personnels indépendants avec les Concini, et surtout avec Marie de Médicis, il reste, comme ses aïeux et comme la majorité de la population, avant tout attaché à la personne du roi et au principe monarchique. Les huguenots eux-mêmes font preuve de la plus grande loyauté à l’égard de l’autorité royale. C’est pourquoi la politique espagnole de la régente inquiète et ce d’autant plus qu’elle entre encore en conflit avec le duc de Rohan à propos de la lieutenance de Saint-Jean-d’Angély , une des places de sûreté concédées aux protestants par l’édit de Nantes  : la reine y a placé un maire hostile au duc, lui-même gouverneur de la place.
    Le 20 octobre 1612, Rohan convoque brusquement une assemblée de ses coreligionnaires, à La Rochelle . La réunion est illégale, car la reine mère n’a pas donné son accord préalable, mais l’initiative souligne l’attachement de ces hommes à l’égard de la monarchie. Il s’agit d’obtenir l’autorisation de tenir des conseils provinciaux périodiques, l’exemption de la taille pour les pasteurs, et la suppression de l’épithète « prétendue » dans l’expression « Religion Prétendue Réformée ». Marie de Médicis ne se trompe pas sur les dispositions d’esprit des huguenots et de leur chef : elle met tout en oeuvre pour se rallier le duc de Rohan, pour détacher les villes protestantes d’un mouvement d’opposition mené par de grands seigneurs, qui se servent de la religion pour mieux défendre leurs intérêts personnels, et cède aux requêtes des protestants pour Saint-Jean-d’Angély . Les villes se déclarent d’ailleurs satisfaites de la régence et surtout de la paix civile qui règne désormais dans le royaume.
    Le climat semble d’autant mieux s’apaiser que le comte de Soissons décède de la petite vérole, le 31 octobre 1612 [9] . La perte affaiblit encore davantage le clan des Bourbons. Pourtant, sous l’influence de Concini et du baron de Lux, Marie de Médicis se rapproche du parti formé par le prince de Condé et les ducs de Bouillon, Nevers , Mayenne. Fin 1612, un calme relatif règne en France  ; un autre problème subsiste cependant, celui des finances. Les pensions atteignent cette année-là plus de cinq millions de livres, alors que les caisses pleines léguées par Henri IV et Sully sont déjà vides.

    Ayant gagné la confiance de la reine mère, Richelieu alterne plus aisément les séjours à Paris et à Luçon . L’éloignement géographique n’est plus un obstacle à ses ambitions. L’attitude d’Henri et d’Armand Jean du Plessis de Richelieu a déjà prouvé à Marie de Médicis l’attachement de la lignée au service de la cause royale. Au mois de septembre 1612, un événement majeur dans l’histoire familiale rappelle l’attachement de ces hommes à leur propre lignage.
    Henri, Armand Jean et leur frère Alphonse réunissent un conseil de famille pour décider du sort d’une de leurs soeurs, Isabelle, déjà âgée de trente-cinq ou trente-six ans et restée célibataire [10] . Depuis 1607 pourtant, le château de Richelieu reçoit les fréquentes visites d’un voisin, Louis Pidoux, qui poursuit des études de médecine. Le jeune homme soutient sa thèse de doctorat en 1612 et demande la cadette des Richelieu en mariage. À cette époque, les fils et les filles majeurs sont tenus d’obtenir un accord écrit de leur famille pour convoler. La famille Pidoux est très ancienne ; ses lettres d’anoblissement ont même été renouvelées à plusieurs reprises. Mais la lignée exerce la profession de médecin de père en fils et ne porte pas les armes. Accepter une telle union serait indigne pour les Richelieu : le conseil de famille rejette formellement la demande en mariage. Isabelle du Plessis et Louis Pidoux prennent brusquement la fuite et se réfugient en Franche-Comté , à Dole , où leur mariage est célébré presque clandestinement, le 2 juin 1613. Tous deux passent leur existence en exil. De leur union, naissent au moins trois enfants. À la suite de son mariage considéré comme une mésalliance, Isabelle est volontairement

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